MERSI !

« Mersi ! », c’est le récit d’un voyage. C’est aussi un hommage, modeste, à mon père qui a su me transmettre sa passion pour l’Histoire et son amour des géographies. Sur la base de son témoignage, j’ai entrepris de parcourir, à vélo, une partie de la Bulgarie, en suivant un itinéraire qu’il s’est proposé de tracer. Pourquoi ce pays-là plutôt qu’un autre ? Parce qu’il l’a étudié et visité dans les grandes largeurs et qu’il en a conservé un souvenir aussi ému que vivace. Et puis, à son âge et au mien, nous retrouver sur un projet commun était plus qu’une chance. Un véritable cadeau pour l’un comme pour l’autre ! Par les voyages qu’il a entrepris, par le travail passionnant qu’il a accompli, mon père a été et demeure source d’inspiration. C’est à lui sans doute que je dois d’avoir su rester curieux. C’est donc à moi désormais de partager un peu de ce qui m’a été donné. Un voyage en trois étapes J’ai découpé mon voyage et la carte du pays en trois morceaux. Trois bandes horizontales plutôt, comme celles qui composent le drapeau du pays : le blanc, symbole de paix, le vert, celui de la fertilité de ses terres et le rouge qui figure le courage de son peuple. Que sait-on de la Bulgarie ? Pour beaucoup de Français, c'est un confetti de l'ex-Union Soviétique qu'ils peinent à situer précisément sur la carte. Quant aux à priori, c'est peu dire s'ils sont grossiers : corruption et réseaux de prostitution, mafia, roms et yaourts constituent le gros des clichés véhiculés par les médias occidentaux. C'est oublier un peu vite la richesse de son patrimoine, le rayonnement de sa culture - théâtre, musique et littérature en tête - et la reconnaissance de ses artistes à travers le monde. Dans ce film, je souhaite interroger les liens qui unissent nos deux pays. Parce qu'on ne le sait pas toujours mais la Bulgarie possède des liens forts avec notre pays et ses habitants sont largement plus francophiles que nous ne sommes bulgarophiles. Itinéraire d'un projet au long cours Pour le premier chapitre du film, je suis parti de la capitale Sofia pour rejoindre les plaines Thraces en passant par le piémont de la Stara Planina et des Rhodopes. J’ai effectué ce périple à vélo en juin 2022, à raison de 80 à 100km/jour. Un premier circuit au cœur de ce pays, petit par la taille (1/5 de la France), mais grand par sa culture. 15 étapes. En m’appuyant, toujours, sur le témoignage de mon père, je repars en août 2023, pour écrire le deuxième chapitre et sillonner cette fois le nord. 18 étapes qui me conduiront de la chaîne du Grand Balkan aux rives de la mer Noire, en longeant notamment celles du Danube. La dernière partie de ce tryptique me verra parcourir le pays depuis la Strandja, au sud-est, jusqu’au Pirin, à l’extrémité ouest, en passant par la chaîne des Rhodopes. 20 étapes. Dispositif Quand on part à vélo à la découverte d’un pays avec l’espoir d’en ramener des images, il faut savoir faire des concessions. Une caméra de poing, un drone, une GoPro et un ordinateur portable. C’est tout ce que je me suis autorisé à emporter, le reste des sacoches étant occupé par quelques vêtements, un matelas, une tente et une trousse à outils. Recevoir et transmettre Initialement, j’avais pour ambition d’aller sur les traces d’Aleko Konstantinov, auteur bulgare qui, à la fin du XIXe siècle a mis sur pied les premiers circuits touristiques de son pays. "Si tu veux connaitre ton pays, aime-le." Aleko Konstantinov. Alors que mon projet n’en était qu’à ses prémices, je me suis entendu dire : « Quand on parle de tourisme dans les Balkans, ce n’est pas à la Bulgarie qu’on pense en premier... ». Ce qui, en plus d'être regrettable, est une erreur assez grossière puisque la chaîne du Balkan nait et finit en Bulgarie. C’est par abus de langage qu'avec le temps on a commencé à dire "Balkans" pour parler de la péninsule balkanique. J’ai donc eu à cœur de réparer cette injustice en traitant de la question du tourisme et des liens entre nos deux pays, avec les personnes rencontrées en chemin. Et puis, mon père y ayant conduit, dix ans durant, des séjours culturels en tant que guide touristique, le choix de ma thématique se révélait parfaitement cohérent… Le vélo Les routes bulgares alimentent beaucoup de fantasmes. Réputées parmi les plus dangereuses d’Europe, on m’a souvent déconseillé de les parcourir à vélo. Mais je suis têtu et j’avais besoin d’aller vérifier par moi-même. Résultat : ce n’est pas tout à fait faux, mais pas tout à fait vrai non plus. Si j’ai pu me faire peur parfois, c’est que j’avais mal choisi mon itinéraire. Ou qu’il pleuvait à seaux. Quant à l’état des routes à proprement parler… le bilan est lui aussi à nuancer : des fois c’est presque lisse. Et des fois pas du tout. Mais ça fait partie des charmes du pays. Sinon, on reste en France, pays qui compte de très belles véloroutes… Ah, et puis j’ai pour marotte la restauration de vélos vintage. Cela ne fait pas de moi un spécialiste en mécanique mais c’est une activité qui me permet de décrocher un peu de l’ordinateur, tout en préparant les montures qui m'enverront pédaler ailleurs que dans le Luberon, ma région d'adoption. Enfin, voyager à vélo, c’est un peu comme se déplacer à cheval. On chemine à une vitesse qui permet pleinement d’apprécier les paysages et on est accueilli partout avec une certaine bienveillance (et parfois même un brin d’incrédulité !). On respire à pleins poumons le parfum des bois et des montagnes, celui de la pluie et du vent (et des gaz d’échappement aussi, parfois). Bref, on sent mieux le pays ! La bande originale du film Hormis quelques écarts tout à fait anecdotiques, la musique de « Mersi ! » est signée par Isabelle Courroy, ou empruntée aux formations qu’elle conduit, à l'image du groupe Aksak dont on peut entendre deux des titres sur la bande-annonce. La raison : Isabelle est une spécialiste virtuose du kaval, cette flûte oblique qui possède ses lettres de noblesse en Thrace bulgare mais pas que... Cette flûte de berger est en effet jouée dans toute la partie orientale de l'Europe avec de nombreuses variantes. Si Isabelle emprunte parfois aux répertoires traditionnels, elle a néanmoins su s’en affranchir pour jouer une musique tout à la fois personnelle et universelle. Sa discographie est saluée par l’Académie Charles Cros, les Victoires de la Musique, "ffff" de Télérama, Choc du Monde de la Musique et Diapason d’Or. Je suis heureux qu’elle ait accepté d’habiller mon film de son souffle et de ses flûtes. Pour en savoir plus : www.kaval.org Objectif Au terme de ces trois voyages naîtra le film que j'ai rêvé de réaliser avec le concours de mon père, tout à la fois inspirateur et guide. D'une durée de 60', il concentrera l'essentiel de ce que j'y ai vu et filmé, et tentera de rendre compte de la diversité des paysages et des cultures de ce pays qui a su conserver son identité malgré les tumultes qu'il a connus, de l'occupation ottomane aux bouleversements qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale. Sans oublier les trésors laissés par la civilisation thrace, l'architecture de ses maisons traditionnelles ou la beauté de ses monastères. Des témoignages d'habitant.e.s rencontré.e.s en chemin émailleront le film pour nourrir la réflexion sur le pays et son rapport aux étrangers. Ce, en plus de la voix off qui fera le compte rendu de mon périple et à laquelle se superposera celle de mon père. Comme une surimpression destinée à éclairer les voyageurs et voyageuses qui seraient tenté.e.s de se rendre à leur tour dans ce pays, autant que celles et ceux qui désireraient en savoir plus sur son histoire et son patrimoine. Pour autant, ce film n'a pas vocation à devenir un documentaire touristique car je tiens à lui conserver, dans sa forme et sur le fond, le rapport intime qui me lie à mon père. C'est mon regard, nourri de ses réflexions à lui, qui donneront à voir ce que le pays et ses habitants auront bien voulu m'offrir en partage. Le cycliste Âge : 51 Profession : réalisateur Particularités : Persuadé qu’il a été un chat dans une vie antérieure. Passionné par les expériences de mort imminente. Fasciné par l’histoire des pionniers du cyclisme. Aime les motos, la musique et les guitares vintage. Éprouve du plaisir à regarder des documentaires longs et ennuyeux (parfois même en noir et blanc). Personnalités préférées : Frank Zappa, Alexandra David-Néel, Nicolas Bouvier. Défaut : ne sait pas où il va. Qualité : y va quand même. Perspectives : filmer, voyager, pédaler. La bio 1972 - 1980 : enfance heureuse. 1981 : découvre les Blues Brothers au cinéma (souhait de devenir musicien). 1984 - 1986 : pratique le cyclisme sur route et sur piste (souhait de devenir champion de vélo). 1988 : découvre les photos de Sebastiao Salgado (souhait de devenir photographe). 1990 : obtient son bac A3 option Arts Plastiques. 1992 : obtient un diplôme de photographie, joue de la musique. 1993 - 1994 : service national. S’engage à bord d’un porte-avions (conflit en ex-Yougoslavie). 1995 : obtient le permis moto. 1996 : part faire des photos au Vietnam. 1997 - 1999 : s’installe en Provence, devient dessinateur de bande dessinée pour un journal de sans-abris et croque la pègre marseillaise pour la télévision. 2000 - 2008 : devient rédacteur au journal La Provence et fait des enfants. 2010 - 2021 : crée Zoom Allure Sud et réalise des vidéos. 2022 : rejoint la coopérative culturelle Terra Incognita par la porte de la cuisine (qu’il transforme en atelier de restauration de vélos) et poursuit son travail de cadreur et monteur.