William Reymond

La Chute

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« J’ai pris les documents très légalement. Et je ne les ai pas cachés » Aujourd’hui, en Floride, la juge Cannon écoutera les arguments des avocats de Trump qui demandent l’annulation du procès de l’affaire des documents secrets retrouvés à Mar-a-Lago. Face à eux, l’équipe du procureur spécial Jack Smith tentera de démontrer qu’il s’agit d’une nouvelle tentative dilatoire pour échapper à la Justice. Et que l’affaire de Mar-a-Lago est avant tout une question de sécurité nationale. Trump de son côté était lui sur NewsMax où il a une nouvelle fois joué avec les limites de l’acceptable : utiliser l’antenne d’un média ami pour passer des messages à la magistrate et mentir aux Américains. Il n’y a rien de légal dans les actes de Trump autour des documents secrets. Aucune loi, aucune exception, aucun statut particulier ne l’autorise à emporter avec lui des rapports secrets, dont certains classés tellement confidentiels que seul une poignée de gradés étaient autorisés à les lire. En 1978, le Congrès US a passé le Presidential Records Act (le PRA) pour justement légiférer tout cela. Pourquoi ? Parce qu’en 1974, au moment de son départ de la Maison Blanche, impliqué dans le scandale du Watergate, le Président Nixon avait tenté de détruire des documents relatifs à son exercice du pouvoir. Le 20 janvier 2021, Trump dépendait du PRA et l’envoi de documents dans sa résidence de Mar-a-Lago est illégal. D’autant plus qu’ici, précisons le encore, il ne s’agit pas de notes personnelles ou de souvenirs de sa présidence, mais, par exemple, de rapports secret-défense sur la protection nucléaire US ou bien encore de plans de guerre pour faire tomber l’Iran. Mais ce n’est que la première partie du mensonge de Trump. L’affaire est aussi le récit de ses multiples efforts pour les cacher et empêcher les autorités de les récupérer. La journée du 3 juin 2022 est exemplaire à ce sujet. Ce jour-là, Trump va ouvertement mentir à ses avocats, aux Archives Nationales et au FBI. Après des mois d’efforts pour empêcher la restitution des documents, il n’a pas d’autres choix que de céder. Ce jour-là, il reçoit les agents à Mar-a-Lago et leur donne accès à la réserve où il stocke les documents. Il affirme aussi à ses avocats qui vont signer le certificat de remise pour lui que tous les documents sont restitués. En réalité, la veille, Trump a demandé à Walt Nauta, son valet devenu son inculpé, de déplacer certaines boîtes. Pire encore, le 3 juin, à la demande de Trump, ces boîtes sont transportées à l’aéroport de Palm Beach où le jet de Trump attend. Tandis qu’à Mar-a-Lago, Trump assure à tout qu’il a rendu l’ensemble des documents, entre « dix et quinze boites » sont chargées dans l’avion qui, quelques heures plus tard, transportera Trump et sa famille vers sa résidence d’été, à Bedminster, New Jersey. Cet épisode, authentique et prouvé, fait partie du dossier contre Trump. Un dossier si solide que lorsqu’il en a découvert les grandes lignes, Bill Barr, son ancien ministre de la Justice, a résumé l’avenir de Trump en quelques mots : HE’S TOAST. Il est cuit. Et comme il est cuit, comme il sait qu’il ne pourra pas échapper à l’accumulation des témoignages et des preuves rassemblées par Jack Smith, Trump n’a qu’une seule option : Retarder le procès. Avec l’espoir d’être élu et d’utiliser son pouvoir présidentiel pour faire annuler une procédure qui est fédérale. C’est une partie de cela qui va se jouer demain. Devant une magistrate qu’il a lui même nommé et qui, jusqu’à présent, mène la préparation du procès au ralenti. La journée du 3 juin et le transport des documents secrets vers l’aéroport afin qu’ils échappent aux autorités ne sont qu’un aspect d’un dossier passionnant et complètement fou. J’ai consacré plusieurs émissions à la véritable affaire Trump. Il y est question de mensonges, d’influences étrangères, d’espionnage et de sécurité nationale. Notre dernier épisode revenait sur les révélations explosives d’un témoin clé. Qui, au péril de sa vie, après avoir travaillé plus de 20 ans pour Trump, a décidé de raconter tout ce qu’il sait. Du moins, si la juge Cannon lui en laisse le temps.