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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Deux gars sont accoudés à un comptoir, une canette de bière à la main.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Il est tard. Ils ont l'air d'être fatigués et déprimés. Sur leur visage, figé dans une expression résignée, se lit une grande solitude qu'ils partagent à deux.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Ils ont environ 40 ans et semblent jeter un regard vitreux sur leur condition, qu'ils considèrent, à coup sûr, à cet instant comme misérable.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Dans un club d'échecs du Val d'Oise, en 1996, deux fillettes de 10 et 11 ans viennent en compétition par équipe d'infliger une véritable correction à 2 adultes un peu trop sûrs d'eux. Après les premiers coups de la partie, les 2 hommes n'ont plus jamais eu la possibilité de gagner. Agglutinés sur la toile bien tissée de 2 petites mygales, ils se sont fait ficeler puis dévorer tout vifs. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">En début de soirée, un rictus narquois avait pourtant laissé entrevoir leurs dents abîmées par l'alcool et le tabac, lorsqu'ils avaient su qu'ils seraient opposés à 2 petites mignonnes. Quoi de plus agréable en effet que de pouvoir en toute légalité démontrer l'ordre des choses et de la soumission ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p align="center" class="MsoNormal" style="text-align:center">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:purple">*<span style="mso-spacerun:yes"> </span>*<span style="mso-spacerun:yes"> </span>*</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Seulement voilà, cela ne s'était pas déroulé comme prévu. Aux échecs, il n'est pas permis de se dresser au-dessus de son adversaire, de crier sur lui, ou de l'empoigner. On peut tenter de l'intimider, de l'influencer, mais cela n'est pas un gage d'emprise certain. Protégés par les règles et par ceux qui les font respecter, les plus faibles physiquement peuvent ici prendre une impitoyable revanche sur les autoritaires, en faisant simplement glisser quelques pièces de bois sur un plateau luisant. Des pièces qui ressemblent trait pour trait à celles qui se tiennent en face. Elles ne sont ni plus fortes, ni moins fortes. Elles sont simplement guidées différemment, comme ce fut le cas sur les 2 parties en question. 2 moments de pur bonheur pour tous ceux qui aiment voir les petits gagner contre les gros, ou qui aiment voir la morale triompher. <span style="mso-spacerun:yes"> </span></span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:8.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:purple"> </span></p>
<p align="center" class="MsoNormal" style="text-align:center">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:purple">*<span style="mso-spacerun:yes"> </span>*<span style="mso-spacerun:yes"> </span>*</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">En fin de soirée, un rictus résigné avait assombri le regard abîmé par la fatigue et le malheur des 2 hommes, lorsqu'ils avaient compris que leur hiérarchie à eux n'était pas la hiérarchie universelle. Quoi de plus désagréable en effet que de découvrir par la force des choses qui doit en réalité se soumettre ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Dans un club d'échecs du Val d'Oise, en 1996, deux fillettes de 10 et 11 ans viennent d'administrer une mémorable punition à 2 adultes un peu trop sûrs d'eux. Après les premiers coups de la partie, les 2 hommes ont été mis hors d'état de nuire. Ils se sont fait suspendre par les pieds à la toile bien tissée de 2 petites tarentules qui leur ont inoculé le sérum de raison. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Les 2 gars restent là, accoudés à un comptoir, une canette de bière presque vide à la main. On ne sait plus quelle heure il est. Dans le silence de la grande solitude qu'ils partagent ensemble, l'un des 2 dit à l'autre : "oh la la, j'ai rien compris, et toi ?". </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">L'autre répond, enveloppé d'une condition qu'il considérait, à cet instant, comme misérable : "Moi non plus"...</span></p>
Vive les échecs 2 - Trouvailles et destins des grands champions
Il s'agit d'un ouvrage abondamment documenté concernant les grands champions d'échecs, leur vie, et ce qu'ils ont apporté à ce jeu.
Réussi
89
Contributions
22/04/2014
Date de fin
5 796 €
Sur 4 500 €
129 %
Les publications
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Les Marocains sont fous, et les Fous, marocains.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">De passage à Marrakech avec ma femme, nous n'avons eu de cesse de vérifier à quel point les habitants de cette ville remarquable sont accueillants, dynamiques et parfois très mystérieux...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Nous décidâmes tout d'abord de sortir fissa des sentiers battus d'un tourisme ultra encadré où nous nous serions fourvoyés. Nous nous écartâmes de toute cette fournaise commerciale pour nous rendre dans d'improbables quartiers où nous croisâmes entre autres misère et travail des enfants. En fin de journée, fourbus, et après avoir bien fouiné et échangé avec les charmeurs de serpents fous, les suceurs de crânes de moutons fous, les artisans aux pieds d'or fous ou les vendeurs de tout fous, nous nous rendîmes au club d'échecs de la Koutoubia, que nous avions déjà fréquenté lors d'un précédent voyage.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Nous apportions à nos amis, après avoir farfouillé dans nos armoires à matériel avant de partir, de vieilles horloges d'échecs mécaniques hors d'état de nuire. Nul doute que les plus habiles d'entre eux, grâce à leur travail de fourmi, sauraient remettre dans le bon tempo ces providentielles fournitures. Leur joie fut folle et quelque temps plus tard, il nous invitèrent à manger un couscous à la marocaine foutrement bon. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Le légendaire mets du Maghreb nous fut servi dans un grand plat commun, et comme nous étions des invités de marque, on nous confisqua les fourchettes. C'est fou comme c'est tout de suite plus convivial quand tout le monde met la main à la pâte !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">La nouba se prolongea en rires et fous rires (sauf quand nous parlions de l'équipe de foot marocaine), ce qui nous permit de constater que tout ce que nous avions enfourné était d'excellente qualité. Car il est bien connu qu'il n'est pas bon de rire en mangeant. Puis, défoulés et repus, nous nous quittâmes chaleureusement en prenant rendez-vous pour le lendemain dans leur club de fous d'échecs. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Après une bonne nuit, nous nous décidâmes à faire quelques courses dans la foule et le fouillis des souks. Une foultitude de pâtisseries orientales fut notre principal choix de cadeaux à ramener. Nous en avions vraiment bezef, et donc partagions quelques doutes sur leur passage à la frontière. Qu'à cela ne tienne (dans notre estomac), refoulés à l'aéroport, foutus pour foutus, les gâteaux fourrés seraient mangés plutôt que jetés à la fourrière ! Nous ramènerions là de bons souvenirs... Et on ne pouvait pas trop se tromper, hormis peut-être en ce qui concernait les loukoums un chouïa trop sucré, tout était délicieux ! Puis, le midi, pris d'un fougueux appétit, nous nous rendîmes "Chez Grouni", un restau populaire loin d'être un gourbi, de la célèbre place Jamaa el Fna. Dans cet endroit animé, nous liâmes conversation avec 3 gentilles filles en foulard qui partageaient un même tagine tout juste sorti du four, dont elles poussaient les morceaux avec de simples bouts de pain, les folles !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Suite à ce bon coup de fouet gastronomique, nous étions tous deux fins prêts (surtout moi) pour aller affronter les foudroyants joueurs de la Koutoubia !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">C'est cet après-midi-là, après avoir vu ce que j'ai vu sur les échiquiers tout usés du club, que certaines de mes certitudes ont volé en éclat. Moi qui enseignais depuis de longues années que la Tour était moins forte que le Fou (5 pions contre 3 pions), je me suis retrouvé fourré dans de fourbes situations où mes lascars d'opposants sacrifiaient leurs Tours contre mes Fous presque systématiquement ! Kif-kif ? Même pas ! Les Fous sont plus forts, répétaient-ils. Incrédule, je compris vite que c'était ici une obsession de tous les instants. Un véritable art de jouer. Les mouvements obliques de ces pièces étaient apprivoisés, maîtrisés et poussés à l'excellence !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Les échanges de pièces qui étaient apparemment effectués en ma faveur, me laissaient dans chaque partie penser que j'avais l'avantage. Mais pfffiou... je ne fus pas long à savoir qui étaient les caïds, et que les victoires adverses ne devaient rien à la baraka !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je ne pouvais souvent rien faire, car leurs Fous mabouls <span style="mso-spacerun:yes"> </span>devenaient les Rois de l'échiquier ! Des combinaisons en veux-tu en voilà... Enfilade ! Fourchette ! Une véritable razzia. Pires que des Cavaliers fourrageurs... Ils auraient été capables de changer leurs pions promus en Fous plutôt qu'en Dames ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">J'avais déjà étudié les fantastiques parties du champion Janowski (voir Janowski-NN Paris 1895), le Maître des Fous, pensant qu'il était une sorte d'exception, mais jamais je n'aurais pensé que c'était ici, à Marrakech que je découvrirais ses dignes héritiers. Pourtant logique pour un peuple qui a transmis les échecs en Europe au moyen âge !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Et jamais je n'aurais non plus pensé qu'il faudrait que j'atterrisse ici pour subir de telles </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">foudres artistiques... Fouchtra !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">C'est depuis cette aventure que je ne cesse de me répéter : certes, tu ne t'es pas mangé le fameux mat arabe avec le Cavalier et la Tour, mais les Marocains sont fous, et les Fous, marocains !</span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
Ainsi s'achève sans doute le feuilleton de mes histoires d'échecs sur ce site (15 autres hitoires inédites sont en réserve).</p>
<p class="MsoNormal">
Merci à tous ceux qui m'ont aidé !</p>
<p class="MsoNormal">
Il n'est pas encore trop tard pour les autres, puisque j'ai encore besoin d'un petit coup de pouce.</p>
<p class="MsoNormal">
Soit ils versent quelque chose aujourd'hui sur l'excellent KISS KISS BANK BANK, soit il peuvent le faire auprès de moi directement.</p>
<p class="MsoNormal">
A bientôt !</p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
Ph</p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Le monde de la nuit, ce sont plein de mondes différents, avec beaucoup de monde dans la plupart des cas... Sous l'effet de la forte densité de population et de l'excitation due à un sentiment de liberté soudain, les réactions de certains personnages d'ordinaire plutôt raisonnables peuvent s'en trouver altérées. L'univers des joueurs d'échecs noctambules n'échappe pas à la règle : perception des événements modifiée, comportement désinhibé, oubli des non présents...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">La plupart du temps, tout cela ne prête pas à conséquence. Enfin pas tout de suite...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">L'action ci-dessous se passe au Club d’Échecs de Pontoise, il y a bien longtemps. C'était presque jadis.</span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">BIP... BIP... BIP...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:black"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">C'est au club, c'est la nuit,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Comme au pub, point d'ennui.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Bon Thomas le blagueur</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Téléphone sans rigueur.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il appelle un ami.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Ce n'est point infamie</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">De siffler un fêtard,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Bien qu'il soit vraiment tard.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Mais par pure méprise</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A sa grande surprise</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il mélangea bien trop</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Tous ses chers numéros. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Allo, allo qui c'est ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dit une voix qui grinçait,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Bon Thomas se rend compte</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Et il a très très honte.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">C'est qu'il vient à minuit</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">D'accabler à grand bruit</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">la maman d'un enfant</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">En sonnant l'oliphant.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">S'il se met à parler</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">On va le dévoiler,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A regrets optimaux</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il raccroche sans un mot...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">(Poème inédit, non tiré des fables du Bon Thomas).</span></p>
<p>
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<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Donner des cours d'échecs, ce n'est pas toujours simple. Donner des cours d'échecs en prison, c'est plus compliqué. Alors donner des cours d'échecs aux mineurs en prison, ça devient vraiment très technique. On appelle cela aller au charbon.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avant le regroupement des détenus mineurs dans de grands centres spécialisés en 2008, il y avait dans la Maison d'Arrêt d'Osny une vingtaine de pensionnaires n'ayant pas encore atteint la majorité légale. Oh, bien sûr, ils s'étaient octroyés tout un tas d'autres majorités, mais celles-ci, la loi ne les reconnaissait pas. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">En zonzon, y a rien à faire, c'est la zermi, les activités woualllaaa ! Et la console, elle est niquée, on peut plus jouer...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mon travail pendant 10 ans exactement, fut de proposer l'activité "échecs" à ces gars-là, qui n'aimaient pas se lever le matin, qui n'aimaient pas les activités, qui n'aimaient pas les échecs et qui ne voulaient rien faire du tout.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Voici comment je procédais :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avec la complicité des surveillants du quartier mineurs, des gars patients, diplomates et réactifs qu'on prendrait aisément pour des éducateurs spécialisés, je me faisais amener de bon matin (10h00) devant la porte d'une cellule occupée par un lascar. Ce n'est pas très réglementaire qu'un intervenant vienne à la pêche comme ça, mais bon, c'était devenu ma spécialité.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Clic-clac ! Le geôlier m'ouvrait la lourde porte en fer et c'était à moi de commencer la partie. Je me rappelle d'un grand black qui avait calfeutré sa fenêtre avec une serviette pour faire l'obscurité complète, et qui dormait enroulé dans une couverture pire qu'à l'armée...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Bonjour Abdou ! C'est l'heure des échecs !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Hein... Quoi... Vas-y, ferme la porte...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Je suis le prof d'échecs, tu viens jouer aux échecs ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Zyva tu m'vénères, laisse-moi dormir !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Allez, tu viens jouer aux échecs ? Est-ce que tu sais jouer aux échecs ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Truc de ouf ! Vas-y, ferme la porte, je viens pas !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Bon ok, tu viens quand ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Chépa, J'ai le seum, fous-moi la paix ! Je viens pas j't'ai dit !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Ok, tu viens la semaine prochaine ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Siii siii...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Salut Abdou, à la semaine prochaine !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Et évidemment, la semaine suivante, à la même heure, j'étais devant sa porte...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Clic-clac !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Coucou Abdou ! C'est l'heure des échecs !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il faisait semblant de dormir, enfoui dans sa couverture douteuse...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Bonjour Abdou ! C'est l'heure des échecs !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Zyva, cousin, je viens pas...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Hè Abdou, tu m'as promis la semaine dernière !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- J'tai rien promis du tout, c'est des mitos, j'viens pas...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Si, si, tu m'as promis, j'ai un témoin, le surveillant !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Mais tu vois pas que j'suis foncedé... J'peux pas me lever là...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Il parait que t'es de la Dame blanche, à Garges. je connais les mecs de là-bas. Ces mecs-là n'ont qu'une parole. Quand ils disent un truc, ils le font. Si tu viens pas, je vais me mettre en mode poucave et je vais te balancer à tout le monde. Surtout qu'il y a des grands à toi dans mes élèves majeurs...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Wesh, t'es relou, ça va, je viens...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- <span style="mso-spacerun:yes"> </span>...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Wesh, vas-y, je viens, j't'ai dit !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Bon, super, je t'attends dans la salle d'activités.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'avais régulièrement 6 à 8 gars. Mon job, c'était de les contaminer. Mais une fois confinés dans ma salle, ils ne pouvaient plus échapper au virus... Ma méthode d'apprentissage était infaillible. Je tablais sur 2 choses : la simplicité des consignes de départ et la concurrence entre eux pour la suprématie dans le groupe. Je lançais des petits jeux du type "montante-descendante" avec seulement les pions au départ. Ensuite, je rajoutais les Tours, les Fous, etc. Comme les parties étaient plutôt courtes, on jouait beaucoup. Une défaite était donc noyée dans une masse d'autres péripéties, ce qui relativisait son aspect dramatique. Perdre ou gagner devenait légèrement moins vital. Et puis ça chambrait sec !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Rapidement, ils se piquaient au truc et devenaient des accros. C'était la seule raison qui les faisait se lever le matin, me disaient les éducateurs. Après, je leur enseignais le jeu des niveaux, dans lequel il faut parvenir à mater le prof de la meilleure façon possible en déjouant les pièges. Quand on se trompe, c'est au suivant. La honte !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ça, c'était la folie. Celui qui obtenait un premier tampon (il y avait 10 positions) sur sa carte de niveaux était jalousé par tout le monde. La hiérarchie était établie et ne demandait plus qu'à être bousculée.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pendant la semaine ça parlait pas mal. Et quand un nouvel arrivant se retrouvait engrainé dans l'activité échecs, il venait désormais avec curiosité, sans toutefois se départir d'une certaine prudence. Au bout d'un moment, je n'avais plus du tout besoin d'aller les tirer du lits, les gars venaient tout seuls, racolés par leurs potes ou bien par les surveillants, brillants dans l'art de vendre le traquenard.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Bonjour, Je suis Philippe, le prof d'échecs. Et toi ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Djylan. Ca se passe, ou quoi ? C'est cheulou, les échecs. je viens juste pour voir. Moi, c'est les dames où j'chuis fort...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Tu sais jouer Dylan ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Vite fait... (Ça veut dire non).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Ça te dirait de devenir le plus fort ici ? (Je disais bien sûr ça devant les autres).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Siii-siii...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Et la formation commençait. Le deal était toujours basé sur le concept du défi. J'annonçais que mon nouveau poulain allait tous les marave dans un bref laps de temps.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je gagnais toujours mon pari qui était de sans cesse obliger les plus forts à se remettre en question. Et donc le niveau du groupe ne cessait d'augmenter !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- C'est portnawak, c'est pas ce narvalo qui va me mettre à l'amende ! Sa race ! Wesh, il m'a péta ma Reine !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Ouaille ! Téma le keum mon frère, tu fais pitié ! Comment je t'ai pécho tes pions ! C'est trop stylé les échecs ! Je kiffe à fond !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- Wesh, sauss, comment tu l'as bouyave ! Chanmé !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">- J'avoue... Sa mère !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Et voici comment je ne me suis jamais fait tèje par les jeunes tellement c'était darre !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Le processus avait au départ mis un petit temps à se mettre en marche, mais une fois lancé, il aura duré une décennie. Parfois, comme les peines des mineurs étaient assez courtes, je devais réamorcer la pompe et recommencer à répandre l'épidémie en repartant des cellules souches. Pour mon plus grand bonheur, ça marchait tout le temps. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je retiendrai longtemps que dans les dernières années de l'existence de cette petite communauté d'ados en marge de la société, il y avait en permanence un échiquier de sorti et prêt à l'emploi dans le bureau des surveillants. Ces derniers, s'étant mis aux échecs, lançaient de temps en temps à un petit malin : "Toi, dans mon bureau !" Ils défiaient ainsi en guise de récompense les plus sages de leurs voyous, qui pouvaient du coup sortir de leur "chambre" de 2 mètres sur 3 et établir de nouvelles relations avec leurs gardiens. Unique !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Alors pour tout ce à quoi j'ai pu assister dans ce recoin de cabane, cimer les gars... et cimer les surveillants !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La partie d'échecs la plus incroyable qu'il m'ait été donné de disputer est peut-être celle que j'ai jouée un soir de l'an 2000, contre un certain Jean-Luc M, au club de Carrière sur Seine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En cette année de fin du monde, il n'était pas rare de relever partout des éléments bizarres, ou de se croire impliqué dans quelque chaos où l'on sautait à pieds joints. C'est ce qui m'est arrivé lors de la partie que je vais vous raconter ici.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Aux échecs, notamment en compétition, je suis plutôt d'un genre prudent, qui m'est dicté par une lenteur intellectuelle naturelle à calculer combien un gros arbre a de ramifications. Il ne serait pas avisé, en ce qui me concerne de m'élancer de branche en branche, tel un jeune gibbon maîtrisant l'art de la pirouette scabreuse. Je suis davantage du genre gorille au sol, ou alors sur des troncs pouvant supporter mes compétences de primate.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mais bon, comme je vous l'ai dit, on était en l'an 2000. Ceux qui sont nés après cette année-là ne peuvent pas connaître l'état d'esprit qui pouvait régner dans certaines situations, et la folie passagère de ceux qui sont morts de nombreuses fois avant cette date tellement on le leur avait promis... Tout, après ce terrible passage ressemblait à un sursis, on s'en donnait donc à cœur joie.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Alors il faut comprendre, me pardonner d'avoir joué ce jour-là un peu contre nature, à contre-jour, mais pas à contresens. Mon adversaire, que je connaissais déjà un peu était un type très sympathique, vif et d'un grand dynamisme. Plus du genre ouistiti malin. Une opposition de styles qui s'annonçait palpitante, avec en perspective l'un qui prendrait les bananes de l'autre.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Quand on me joue le pion du King Louis, j'ai l'impression qu'on me jette une cacahuète, et je ne peux m'empêcher d'inventer une guenon Louise en jouant le pion de ma Dame, ça s'appelle la défense scandinave. C'est un début asymétrique qui donne plutôt des parties spectaculaires. Mais, moi, j'aime bien vite revenir dans ma base et vers un style plus prudent et plus chaloupé. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ce n'est pas ce qui s'est passé. Pour des raisons de circonstances de l'an 2000 sans doute, je suis sorti du couvert pour me précipiter dans un monde sauvage qui ne m'était pas familier. La partie a vite pris une tournure fantaisiste, devenant une jungle touffue, les singes hurleurs en moins. Mais je m'en suis bien tiré. Pas de faute de branche. Et comme je n'aime pas tellement me faire stresser la liane outre mesure lors d'une partie de compétition, j'anticipe et j'essaie de gérer au mieux mon temps de suspension afin de ne pas tomber par terre en "zeitnot". Vous savez, c'est la fameuse crise de temps, quand la situation en est au paroxysme de la complication et que la pendule en est au compte à rebours...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Saignante comme un combat de mandrills, la partie ne divulguait pas beaucoup d'indices laissant entrevoir qui serait le roi de la jungle. Chacun des protagonistes alternait le génie et la misère. Nous oscillions entre un travail d'orfèvre et un travail de sagouin. Alors dans ce cas, comment repérer le futur vainqueur ? Difficile. On avait l'impression que c'était celui qui venait de jouer. Ça changeait tout le temps.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Plus notre histoire boisée avançait, plus une certaine nervosité s'installait dans l'atmosphère tropicale. A une quinzaine de coups de la limite de temps (on doit en jouer 40 en moins de 2 heures), et alors qu'il ne me restait que 15 minutes contre 5 petites minutes à mon adversaire, je pris la décision de tenter de lui faire perdre l'équilibre en jouant par rafales de coups. Malin comme un singe, je voulais jouer 3 coups compliqués très vite, puis prendre un peu de temps, et recommencer. Je ne suis pas extrêmement sûr d'avoir exactement compris toutes mes actions, mais ceci se révéla excellent, puisque mon adversaire accéda malgré lui à de profondes et anxieuses réflexions extrayant chez lui une nature surexcitée. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La partie, devenue folle, partit dans tous les sens, il ne restait plus à chacun d'entre nous que quelques minutes pour jouer une dizaine de coups. Ce n'était plus le temps de la compréhension mais de l'intuition. Il fallait avoir le nez du nasique. Nous frappions maintenant les pièces et la pendule à la vitesse d'un éclair pas toujours très lumineux. Il ne fallait pas que le petit drapeau rouge qui s'agitait, soulevé par une aiguille trop rapide ne retombe, car cela signifiait : plus de temps - c'est perdu !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">A un moment, mon adversaire, dans un geste simiesque, frappa si fort l'horloge que cette dernière chavira et heurta les</span><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:#993300"> </span><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">pièces à proximité, qui elles-mêmes, telles des dominos envoyèrent leurs semblables un peu partout autour de la table. Pause ! La partie s'interrompit un instant et nous partîmes à quatre mains et à quatre pattes à la recherche des éléments éparpillés un peu partout, sur la table et sur le sol. On reconstitua la position et la partie reprit frénétiquement. Puis, les quarante coups dépassés, nous fîmes le bilan après la tempête. Il était évident que je m'en étais tiré bien mieux, puisqu'à la clarté d'une trouée végétale, il ressortait que l'issue de notre rencontre n'était plus désormais qu'une simple formalité. Quelques instants plus tard, mon adversaire abandonna, dépourvu de tout espoir.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ce fut un "ouf " moite pour moi, mais aussi pour lui je crois. Nous avions fourni bien des efforts et il faut reconnaître que tout le monde n'est pas à l'aise dans la vie arboricole. L'épreuve que nous venions de vivre, saupoudrée de la sportivité de mon adversaire, nous rapprocha de la table d'analyse où nous fîmes de sacrées découvertes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En examinant de près la partie, nous remarquâmes qu'au plus intense de l'agitation crépusculaire de nos échanges sauvages, j'avais loupé un échec et mat simple. Au coup suivant, mon adversaire colmata la brèche, juste avant, encore tout suintant de l'émotion de celui qui s'en était sorti par miracle, de manquer à son tour le chapardage d'une de mes pièces !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Enfin, nous ne comprîmes pas pourquoi, en fin de partie, il avait totalement oublié d'avancer un véritable pion candidat à sa transformation en Dame ! Mais ce pion, il n'était pas sur le plateau au moment de l'abandon ! Soudain, nous comprîmes... C'était incroyable ! Le petit coquin de bois était resté dissimulé sous une armoire. Il n'était pas remonté sur l'échiquier lors de la reconstitution de la position. Et personne n'avait remarqué son absence par la suite. Nous avions tout bonnement oublié de replacer ce pion qui aurait sans doute changé le déroulement du jeu. Une bonne obole !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Voilà l'histoire.... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Cette folle partie de quadrumanes à plus d'un titre m'aura enseigné plusieurs choses :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- On peut rester calme au milieu des branches comme un orang-outang.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- La fin du monde du type "la planète des singes" n'était pas pour tout de suite, même en la sollicitant avec force gesticulations.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Ce n'est pas à un vieux chimpanzé qu'on apprend à manger des termites.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Quelle épreuve que d'avoir son enfant dans une compétition d'échecs !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je sais de quoi je parle, j'en ai eu plein, d'enfants et de compétitions... Ce que l'on ressent, en assistant, impuissant aux efforts désordonnés de son petit face à un adversaire pour lequel on n'a pas d'affection particulière, est parfois une torture.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Notre enfant doit gagner, non pas parce qu'il est le plus fort, mais il doit gagner avant tout car il est notre enfant. On ne se trompe pas de contexte, là ? Bon, je dois avouer que les premières années, ma petite fille, devenue très grande maintenant, était, aux échecs l'objet de tous mes encouragements. Ayant beaucoup pratiqué le sport dans ma jeunesse, je savais de manière catégorique, que l'on gagne un plus souvent quand on est supérieur à l'autre dans la discipline pratiquée. Mais bon, c'était ma petite fille quand même. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Elle méritait de gagner, parce qu'elle était merveilleuse, qu'elle faisait beaucoup d'efforts et qu'elle jouait bien aux échecs. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- L'autre aussi ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Mais voyons, ne compliquez donc pas tout !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Elle devait aussi gagner (je n'ai pas dit vaincre, hein !) car comme ça, on pouvait faire la fête. Après l'épreuve, on pouvait se relâcher, se remémorer en rigolant les petites péripéties du parcours. Comme c'était bon ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Et l'autre, ce n'est pas triste pour lui ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Mais vous allez arrêter de tout mélanger ! On ne parle pas de ça, là...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Elle avait aussi pour mission de gagner (je n'ai pas dit tout écrabouiller, hein !) afin de rendre heureux les gens qui l'aimaient et qui l'accompagnaient. Oui, quoi, on prenait du temps pour aller la soutenir et l'attendre des journées entières dans les championnats de France et d'Ile de France... Et souvent, on n'avait rien d'autre à faire. Donc, on ne voulait pas repartir sans rien.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Et les autres parents, ceux des petits qui ne gagnent pas ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Il faut des gagnants et des perdants ! Ils doivent comprendre qu'eux aussi gagneront peut-être un jour...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Enfin, elle devait gagner (Je n'ai pas dit atomiser tous les autres enfants, hein !) pour qu'on soit les plus fort, qu'on nous remarque, qu'on nous envie et qu'on nous respecte. Ainsi, les gens nous reconnaissaient, ils chuchotaient avec déférence à notre passage, et ils nous disaient bonjour avec de grands sourires.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Ces gens-là, ne sont-ils pas envieux, jaloux ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">- Mais non, quelle idée ! Ils sont heureux pour nous, tout simplement ! Ils nous envoient des petits bouquets de bonheur quand on les croise...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Et puis j'ai compris. Assez vite d'ailleurs. J'ai compris qu'il fallait un peu mieux réfléchir à tout ça. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Que ce qu'il y avait de formidable, c'était de serrer ma fille dans mes bras quand elle gagnait. Que lorsqu'elle venait de se prendre un mat du couloir dans une partie gagnante importante (Hé oui), c'était aussi de la serrer en larmes dans mes bras en lui disant avec sincérité que ce n'était pas grave. Que lorsqu'elle avait la trouille, je pouvais encore la réchauffer dans mes bras, lui dire de faire du mieux qu'elle pouvait et qu'après, on irait manger ensemble au restaurant. Et comme tous mes autres enfants ont aussi joué tout plein de tournois d'échecs, nous sommes allés de nombreuses fois nous régaler. Ha ! ça, c'était vraiment le meilleur ! Et maintenant, quand on en reparle, ce ne sont plus tellement les performances sportives, un peu floues, qui ressurgissent, mais les restaurants, les hôtels, la plage d'à côté, les copains et les rigolades. Le plus important, quoi ! </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">On n'y peut rien encore. On classifie les humains que l'on rencontre. On le fait tout à fait grossièrement et de manière souvent très approximative. On dit : les petits, les grands, les noirs et les blancs, comme aux échecs, les chinois, les imbéciles, les handicapés. Un jour, peut-être qu'on sera mélangé et on se ressemblera tous. Ça fera quelques sujets de discorde en moins et de nouveaux thèmes intéressants à inventer.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Aux échecs, j'ai entendu dire : "j'aime pas jouer contre les gamins, ils sont souvent bien plus forts que le niveau affiché par leur classement sous-évalué". Ou bien : "Je tombe contre un asiatique, je suis fichu !". Admettons que ce ne sont que des billevesées. Ça ne tient pas debout. Comment considérer quelqu'un qui ne nous ressemble pas comme différent ? Voyons, un peu de sérieux !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Tout ça me fait bien rire, même si je n'ai jamais gagné contre un asiatique. Mais ce n'est là que pure coïncidence. Il n'y a pas de raison pour que ces forts en math soient aussi forts en mats ! C'est simplement parce que j'étais, de mon côté, plutôt littéraire. Je vous répète donc une fois encore qu'il ne faut pas ranger les joueurs d'échecs dans des catégories d'apparence. Ça n'a pas de sens.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Sauf pour les handicapés. Un ami qui venait de perdre 2 parties en 2 semaines contre 2 handicapés m'avait clairement dit qu'il n'aimait pas jouer contre ces personnes-là, qui sont évidemment comme nous, mais en un peu plus redoutables.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Il avait d'abord affronté un sourd, qui criait par intermittence durant la partie. Cela faisait grand peur à mon camarade qui avait bien de la peine à communiquer avec lui pour le raisonner. Il n'y a pas coupé. Son sort fut réglé en un rien de temps.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">La fois d'après, il dut affronter un nain. Traumatisé par sa toute fraîche déconvenue, il avait développé une petite tendance paranoïaque à l'encontre de ces adversaires inhabituels. Et à vouloir être trop prudent, il s'emmêla les pinceaux et il se retrouva accroché au tableau de chasse de l'artiste qui était devant lui. Je suis tenté de dire qu'il ne pouvait plus les voir en peinture...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">J'ai souvent déambulé dans les allées de grands tournois, comme au championnat de France ou aux rencontres du Cap. Et comme un promeneur interrompant sa marche pour profiter de quelque scène troublante, je n'hésitais pas à observer les affrontements les plus singuliers. Je restais muet d'admiration en recouvrant la vue devant un type en fauteuil qui jouait à cent à l'heure, ou près d'un aveugle qui déplaçait à merveille ses pièces en tâtonnant sur son échiquier en relief. Je n'étais soudain plus sourd à la sublime musique de ce pianiste génial... <span style="mso-spacerun:yes"> </span></span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Je remarquais régulièrement combien il était frappant de voir un joueur d'échecs handicapé donner de sa personne pendant une partie. La mobilité de ses pièces n'est pas réduite, la clarté de ses idées surgit au grand jour. Il n'est plus seulement normal, il a quelque chose de plus. Ou son adversaire a quelque chose de moins.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">D'ailleurs, le mot "handicap" ne vient-il pas de l'anglais "Hand in cap" : "main dans le chapeau" ? Lors de jeux de hasard, on remettait autrefois de l'argent ou un objet supplémentaire dans un chapeau pour rééquilibrer les mises. C'est ensuite devenu un lest dont on chargeait les chevaux lors de courses pour l'équité entre les équidés.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">C'est ainsi que lorsqu'un non handicapé, voit soudainement apparaître chez lui-même des infirmités insoupçonnées dans la gestion de son combat, on peut considérer qu'un "Hand in cap" mystérieux à eu lieu, pour mettre ou retirer quelque chose dans les chapeaux. Les plateaux de la balance se retrouvent alors à la même hauteur. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"><span style="mso-spacerun:yes"> </span></span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">C'est donc en toute logique que je souhaite ici remercier la chance que nous avons de nous rencontrer tous autour d'une même activité, qu'elle soit une passion ou non, le jeu d'échecs. Il suffit d'avoir un cerveau qui marche assez convenablement et ensuite, en avant la musique !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">La main dans la main au début et à la fin de la partie, la main dans le chapeau qui rétablit toujours quelque chose, et la main dans le sac pour celui qui n'a toujours rien compris !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Qui peut dire qu'il n'est plus, aujourd'hui encore, poursuivi par la honte d'un acte passé ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Et aux échecs, sans pour autant parler d'un sentiment aussi fort, n'avez-vous pas un jour ressenti une incertitude, une pointe de regret après avoir effectué telle ou telle action, après avoir dit telle ou telle chose ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Moi oui. Bon, ce n'était pas si grave, mais c'est resté gravé quand même. J'ai toujours pensé que les petites flétrissures pouvaient disparaître au fil du temps, surtout quand on les raconte de bon cœur. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">En 1990, lors d'une de mes premières années de compétition, dans un match par équipes de 5 joueurs, je fus amené à jouer contre un certain André D. L'homme en question était un ancien. Un très ancien, même, car il semblait avoir dépassé les quatre-vingts ans depuis belle lurette. Lent, affaibli et d'aspect vulnérable, il gardait dans l’œil une certaine malice, pour ne pas dire une malice certaine. Je m'étais laissé dire qu'aux échecs, les vieux chefs déplumés et pitoyables pouvaient rester de redoutables scalpeurs de Rois. La méfiance était de rigueur, d'autant plus que j'avais la responsabilité d'apporter un point précieux à mon équipe de jeunes visages pâles. Il n'était point question que je me laisse attendrir... Quand on joue pour le groupe, pas de sentiments !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je ne fus pas long à comprendre à qui j'avais affaire. Sous des dehors de malheureux vieillard sympathique et affable, mon adversaire cachait en réalité un grand instinct de conservation, et une envie de faire comprendre au blanc bec que ce dernier ne sait pas encore tout. Sa façon de jouer laissait croire qu'il disputait là une paisible partie d'échecs au coin du feu. Il était détendu, souriant, et laissait parfois échapper une petite parole dans un dialecte inconnu quand il déplaçait une pièce. Mais il était sorti de sa réserve et la grande précision de ses coups ajouté à l'arc de ses pièces qui se resserrait, laissait de plus en plus penser qu'il était fait d'un bois dur. Plus le combat durait, plus je me disais : "ça va être ta fête mon gars. Tu vas finir attaché au poteau de torture. Cet indien-là, tout chancelant qu'il paraisse, a encore un bon classement. Ça veut dire que lorsqu'il était un jeune guerrier en pleine possession de ses moyens, il devait être autrement mieux situé dans la hiérarchie, et bien plus redoutable..." Je sentais la ruse et la perfidie à chaque mouvement adverse. Je craignais son expérience... Combien ce vieux sorcier avait-il réduit de freluquets en poudre à marmite ? Non, pas la marmite !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">La lutte acharnée qui nous opposait démontrait combien j'avais eu raison de ne pas le sous-estimer, comme il le souhaitait sans doute, dans son inoffensive panoplie de départ. Il me fallut éviter bien des flèches pour avoir la chance d'avoir ma chance. Celle-ci se présenta au treizième coup. Sur le champ de bataille aux 64 cases, je fis mine d'avoir joué trop rapidement en lâchant un petit son. Vous savez, le léger bruit qui vient du décollement de la langue du palais, le petit "ttti" que l'on émet lorsqu'un mauvais mouvement de pièce nous a échappé et qu'on en fait part à l'autre, malgré soi. Comme un "imbécile", j'avais laissé un Fou en prise. Ce petit claquement d'agacement fit oublier à mon adversaire de prendre les précautions de vérification, ce qu'il aurait sans doute fait au milieu d'un silence pesant. Dans une imprudente impulsion, il s'empara de la pauvre pièce abandonnée, avec une satisfaction qui sentait bon le "merci cher ami, je suis désolé pour vous, mais je dois prendre la pièce". </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Hélas, le vieux sachem déchanta vite. L'appât assommé d'un coup de tomahawk et consommé, il constata qu'il avait enlevé la pièce qui contrôlait une case sur laquelle se jeta mon Cavalier. Hop ! Fourchette royale ! Mon appaloosa de guerre menaçait à présent sa Dame et son Roi du même coup... Ha ! Ha !, C'était moi le vieux roublard. Au jeu des grimaces et des ruses de sioux, j'avais été le plus fort. Tel était pris qui croyait être le vieux singe...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Après cette fourberie, mon vieil ennemi parut un peu sonné, mais il retrouva bien vite son œil qui frise et poursuivit quelques instants avec une Dame de moins. Mais que peut un vieux chef sans sa précieuse squaw ? C'est avec dignité et révérence au vainqueur que le guerrier fatigué abandonna la partie. Fier et souriant, il me rendit les honneurs de la victoire, tout en n'étant pas dupe de l'habile moyen dont j'avais usé...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Bien longtemps après, je repense à ce moment où, vainqueur, j'ai découvert comment on pouvait perdre un combat. Car si on ne sait pas toujours gagner correctement, alors que cela devrait être très simple, on peut, à condition d'en avoir l'envergure, apprendre à apprivoiser la défaite. L'aigle planant dans les airs l'avait, ce jour-là, enseigné au crotale rampant sur la terre...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Dans le club de Pontoise, il y avait une extraordinaire animation ! Les locaux miteux et poussiéreux qui nous permettaient de nous réunir plusieurs fois par semaine étaient très fréquentés. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Chacun se souvient de l'atmosphère toute particulière qui se dégageait de ce lieu incroyable. Il régnait à l'intérieur une chaleureuse ambiance de fête et de continuelles retrouvailles, qui devait ressembler un peu à l'atmosphère du célèbre Café de la Régence parisien aujourd'hui disparu. Lumière, exclamations, et rires de toutes sortes réchauffaient les 4 pièces souvent pleines de monde.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le bâtiment se trouvait dans la rue Debussy du quartier des Cordeliers. Dans cette partie de la rue peu habitée, il y avait notre bâtiment et 2 maisons sur le trottoir d'en face. Ces demeures étaient occupées par des gens que nous ne connaissions pas. Ils étaient discrets et nous les avions oubliés, à force d'être aspirés par notre lieu magique.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Un vendredi soir, cependant, alors que j'étais occupé à discuter avec d'autres joueurs d'échecs, on vint me chercher en me disant qu'une dame en robe de chambre voulait absolument me voir à l'entrée du Club. Qui cela pouvait-il bien être ? Personne de ma famille ne sortait en robe de chambre, et je n'avais pas d'amie intime dans le quartier.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Il ne s'agissait évidemment pas de ça. La dame en question n'était pas venue pour rigoler. Elle avait même l'air passablement excédée. Après un "bonsoir" des plus bref, elle se présenta comme étant notre voisine en vis à vis et nous raconta qu'elle en avait plus qu'assez qu'on sonne à sa porte à onze heures du soir ! Et que ce n'était pas la première fois !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après une rapide introspection de mon cerveau qui se demandait pourquoi c'est à nous que cette brave citoyenne venait nous sonner les cloches, je répondis poliment que je ne comprenais pas exactement pourquoi un joueur d'échecs s'amuserait à sortir dans la rue appuyer sur des sonnettes, alors qu'il y avait largement ce qu'il fallait pour se divertir à l'intérieur de nos locaux. De plus, je n'avais rien remarqué de particulier. Un peu pour me débarrasser d'elle, je lui promis d'être très vigilant dorénavant.</span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La semaine suivante, vers 23h00, la même dame vint de nouveau frapper à la porte, avec une mine à la fois plus gênée et plus énervée encore. Elle me raconta que vraiment trop, c'était trop ! Et cette fois, elle avait des preuves ! Elle avait monté la garde derrières les arbustes qui séparaient sa maison de son portail et avait aperçu les coupables. Deux jeunes étaient sortis du club, avaient appuyé sur le bouton de sa sonnette, puis étaient repartis en courant se réfugier dans le bâtiment !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mon sang ne fit qu'un tour ! Je sus immédiatement de qui il s'agissait. De toute façon, on n'avait au club que deux "grands ados" à ce moment-là, le vendredi soir. Carl et Olivier, encore ces 2 chenapans ! Quelle créativité dans la plaisanterie encore une fois !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Soit je les traînais par l'oreille devant notre voisine afin de les obliger à implorer son pardon, soit en tant que Président de club, je prenais sur moi, présentais mes excuses les plus plates et allais sans délai régler mes comptes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je fus obligé de prendre cette décision en un quart de seconde, pour ne pas laisser de blanc dévastateur. Dans le souci d'éviter un scandale dans notre respectable confrérie, ce fut l'option de balayer devant et derrière ma porte qui l'emporta. Après avoir donné ma parole que cela ne se reproduirait plus et que les coupables seraient durement châtiés, nous nous quittâmes moyennement bons amis.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mais que pouvais-je faire d'autre que promettre à cette femme ce qu'elle voulait entendre ? Et comment à présent régler cela ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je m'interrogeai pour savoir quel serait le châtiment exemplaire le plus approprié pour les fauteurs de troubles. L'installation d'un pilori au milieu de la grande salle ? Ça gênerait les autres joueurs. Une interdiction de club aux deux brigands pendant plusieurs semaines ? Comme ils étaient sympathiques et excellents, ça pénaliserait le club. Une amende ? Les deux rapiats feraient rapidement raquer leurs parents.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Si je condamnais l'acte, je ne pouvais complètement en condamner leurs jeunes auteurs, encore inexpérimentés dans la vie. Surtout quand je me remémorais les bonnes blagues que j'avais moi-même faites dans ma prolifique jeunesse. La créativité de l'adolescent ne tombe pas toujours juste, soit ! Mais en attendant qu'elle soit louable et altruiste, ne nous faut-il pas nous armer de patience et de compréhension ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">C'est avec l'air des "Quatre bacheliers" de Brassens dans la tête que je convoquai mes deux farceurs et que je leur fis la morale, en leur expliquant que j'avais réussi à éloigner une brave dame en chemise de nuit qui les cherchait avec détermination. Je leur suggérai de passer au plus vite à d'autres blagues et d'oublier celle-ci. Au fil des bonnes idées qui leur vinrent par la suite, je me suis longtemps demandé si j'avais eu raison de leur parler en ces termes...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dans les années 1990, j'ai appris de mon ami Thomas comment on pouvait lever une armée, avec la voix, avec le sourire et avec de la suite dans les idées !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">L'immanquable figure du Club d'Echecs de Pontoise avait, pour ses études, monté un projet de tournoi dans son école. Il était important pour lui que cette compétition soit une grande réussite, avec, notamment un nombre élevé de participants. C'est pourquoi, il ratissa large et profond dans le monde des échecs, et utilisa, dans notre association, un râteau aux dents fort serrées d'entre lesquelles personne ne pouvait s'échapper !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">QUI M'AIME ME SUIVE !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:black"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il était missionnaire</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Au pays des échecs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il tapait sur les nerfs</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">En ouvrant son grand bec.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il cherchait un troupeau</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A mener en tournoi.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il usa d'un appeau</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Et nous cassa les noix.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Parmi tous les joueurs,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Certains pouvaient venir,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Si d'autres étaient ailleurs</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Ce n'était pas trahir !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Ces derniers furent victimes</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">D'une traque impitoyable,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">En paroles intimes,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">En menaces effroyables !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Au final, par magie</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">L'effectif intégral, </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">C'était la stratégie</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Suivit son général.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Bon Thomas satisfait</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Fit une belle performance</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Son tournoi fut parfait</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Et sa joie fut immense !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:red">Poème inédit non tiré des "fables du Bon Thomas".</span></i></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Alors lui, Kader, c'était un sacré numéro comme on dit. Non pas parce qu'il n'était qu'un matricule dans la prison d'Osny (95), mais parce qu'il créait l'animation partout où il passait. Le petit barbu dégarni à la langue bien pendue avait toujours quelque chose à dire, à exprimer. C'était un moyen d'exister avant les parties, pendant les parties et après les parties d'échecs qu'il jouait au sein de l'activité.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Dans ce lieu de parole libre qu'est la prison, son sujet favori était la politique, avec une rancœur tenace envers le système et surtout à l'encontre d'un ancien Président de la République en particulier qu'il appelait le nabot. Jamais il ne prononçait son nom qui était pour lui tabou, et une électricité toute particulière l'agitait quand quelqu'un abordait le sujet. Il avait une propension à défier l'autorité.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Entre deux parties d'échecs, il avait toujours une bonne histoire à raconter, qu'elle se soit située dans, ou à l'extérieur des murs de détention. Celle qui m'avait le plus marquée avait eu lieu une nuit, où, pris d'une folie de plaisantin trublion, il décida pendant que tout le monde dormait de créer un mini chaos dans la prison. Il plaça les enceintes de sa console de jeux sur le rebord de la fenêtre de sa cellule et démarra un jeu de combat à l'arme automatique. Il mit le volume si fort que l'on crut à une attaque générale ! Il est vrai que sur l'échiquier, il était très offensif ! Il omit de nous raconter comment l'histoire s'était terminé.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Kader était aussi un genre de médiateur. Malin, vif dans la réaction, je l'avais vu un jour désamorcer une querelle qui s'annonçait volcanique entre deux gars bouillonnants. Les mêmes qualités lui servaient évidemment aux échecs où, même s'il n'était pas exactement de première force, il demeurait un empoisonneur de première, avec toujours un guet-apens ou un mat surprise dans sa poche. Quand je l'affrontais, je restais toujours sur mes gardes. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Un beau jour, l'équipe du canal vidéo interne à la Maison d'Arrêt, qui était composée de deux détenus et d'un intervenant extérieur, vint nous rendre visite pour effectuer un reportage sur l'activité échecs. Lorsque les trois gars de la télé arrivèrent, j'étais en train de construire une partie "pédagogique" contre Kader. Une partie pédagogique, c'est une partie sérieuse où le prof commente ses coups et évite à son élève de commettre de grosses bévues. Il ne l'assomme pas en lui capturant toutes ses pièces, mais fait en sorte de conserver l'équilibre matériel pour que la partie soit intéressante jusque dans les ultimes anicroches de la finale. A ce moment-là, comme le bon pédagogue a gardé le contrôle du jeu, il peut se permettre de gagner sans triompher, et il félicite son élève, en lui prouvant par des exemples concrets issus de la partie, ce qu'il aurait pu faire et combien il a progressé. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Pendant cette partie, Kader était, fidèle à son personnage, dans un état de grande détermination contre moi. Son rêve du moment était de me battre aux échecs, moi, le prof, l'autorité en la matière ! Il pourrait alors pavoiser, parader et parler pardi !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">d'ordinaire volubile et doté d'une énergie démonstrative, il pouvait étonnamment se mettre dans un état de concentration insoupçonné. Il se plongeait alors la tête entre les mains et déployait tout son être vers un objectif qui lui échappait depuis des mois. De mon côté, j'étais serein, je possédais encore une bonne marge d'avance avant que le petit malin n'entame une danse de gloire éternelle qui ferait pleuvoir des poules dentues...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Après avoir effectué le tour de la petite salle occupée par une douzaine de joueurs en action, le caméraman et ses collègues s'approchèrent de notre échiquier pour nous filmer et m'interviewer. Je dus donc relever la tête et me prêter de la meilleure grâce au jeu des questions tout en poursuivant ma partie. Ce petit reportage était destiné à la télé interne de la MAVO, et tous les détenus pourraient le voir. Je fis donc de mon mieux pour répondre précisément et éclairer les futurs téléspectateurs sur ce qu'était le jeu d'échecs, et sur la manière dont j'animais le club local. Du jeu, beaucoup de jeu, des réponses au cas par cas, en sautant d'un jeu à l'autre, des analyses de parties courtes et spectaculaires sur l'échiquier mural, et parfois un tournoi commun. Et je leur expliquai ce que j'étais en train de faire avec Kader, un de mes meilleurs élèves du moment.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Pendant tout ce temps-là, Kader n'avait pas relevé sa tête fumante. Il cogitait dur, mais je contrôlais ses assauts belliqueux d'un œil, avec une décontraction destinée à la caméra, à ceux qui la tenaient et à ceux qui verraient le reportage. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Soudain, alors que je développais toute une liste d'arguments sur l'apport du jeu d'échecs dans la construction de la personnalité, je vis mon adversaire relever la tête et s'écrier : " échec et mat ! Échec et mat !"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je revins au jeu et me mis à examiner la situation de mon Roi. Il ne pouvait plus fuir ! Un mat surprise. Une Dame protégée par un Fou avaient eu raison de ma distraction. Un mat de bébé, comme je dis aux enfants de mon club. Et le tout avait été filmé ! Dans la boîte, comme on dit, idem pour les pièces... Ce fut l'un des plus beaux jours de la vie de Kader qui voulut acheter la cassette vidéo ! Pour le faire enrager, je lui dis que j'allais aller dans les bureaux et la détruire ! Il me supplia de ne rien en faire, mais je lui répondis qu'il fallait absolument que j'efface toute trace de ce désastre et de cette forfanterie... Il en allait de ma réputation.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Dans une bonne humeur générale nous nous quittâmes ce jour-là plus unis que jamais, lui formidablement heureux d'avoir atteint son objectif régicide compliqué, et moi absolument pas malheureux d'avoir été vaincu. S'il y avait un moment à choisir pour une humiliation pédagogique, c'était bien celui-ci ! Mon travail avait pris toute sa signification dans l'infortuné coup du sort qui m'avait abattu. En perdant, j'avais gagné beaucoup plus qu'une défaite ! </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Hormis le champion du monde actuel, et encore, on peut dire qu'on a tous un Maître aux échecs. Tout au moins des joueurs qu'on révère ou qu'on redoute si on est amené à croiser leur chemin. A défaut de ces gens-là, on a des bêtes noires. La bête foncée est l'adversaire, pas forcément supérieur, mais qui ne nous convient pas, ou qui nous ridiculise à chaque fois.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Et puis, il y a la bête noire occasionnelle. Celle qui se faufile dans un trou noir, par un sombre concours de circonstances. Cette bête noire-là peut être une bonne âme, mais on la déteste clairement à un moment donné parce qu'elle nous a fait du mal. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">C'est de cette inhabituelle bestiole-là, au comportement exceptionnel d'un moment dont je veux parler. Elle n'a pas déjà sévi, elle apparaît soudain, c'est sa naissance...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">J'en ai rencontré deux lors de parties d'échecs. L'une m'a fait un petit sourire entre poli et narquois, l'autre a soudain regardé apparaître ma pâleur avec des yeux ronds et surpris...<span style="mso-spacerun:yes"> </span>au moment de me faire échec et mat en un coup ! Dans les deux cas, je me suis pris un coup de bambou sur la tête. Tout jaune, je me suis mis en pilotage automatique : "Ha ! Ha ! je ne l'avais pas vu, bien joué à bientôt", mais j'étais anéanti intérieurement. Comment peut-on nager avec volupté pendant des heures et mourir piqué par une méduse au moment de sortir de l'eau ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Comment considérer autrement que par un obscur sortilège lancé par quelque sorcière malfaisante (c'est souvent le cas) l'apparition si soudaine de cette bête noire ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Bien sûr, dans les deux cas, je me suis dit que j'avais dû relâcher mon attention, ou qu'inconsciemment j'avais mésestimé mon adversaire. Mais ces explications ne suffisent pas. Expliquez-moi comment il se fait que l'adversaire soit le premier surpris d'enfiler cet odieux déguisement ? Moi je vous dis qu'il ne l'a pas enfilée seul, sa carapace velue et piquante. Quelque chose a interagi. Il y a eut réunion entre une désinvolture et un état de grâce. Une alchimie du plateau de jeu.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Qu'elle soit apparue lentement ou subitement, la sombre et éphémère créature est programmée pour nous prendre en passant et nous entraîner dans son antre carrelée. Lorsque l'on tombe nez à nez avec elle, il est trop tard, elle tient la pièce assassine à bout de patte. On n'avait rien vu venir, et parfois, elle non plus... On n'y peut rien, c'est comme ça, alea jacta est, mourir de ça ou d'autre chose, inch'Allah et amen.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Quant aux bêtes noires de longue durée, on en a tous une qu'il ne faut pas nommer, car il est à craindre de la réveiller. Laissons-là plutôt dormir au fond d'un océan, comme la boîte noire d'un avion perdue dans les abysses. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Un dernier petit mot : ne vous tourmentez pas trop avec ces histoires. Je racontais surtout ça pour plaisanter un peu. On ne peut raisonnablement pas croire à ces histoires d'êtres malsains disposés sur notre route échiquéenne. Les bêtes noires, ça n'existe pas ! Oui, ça n'existe pas vraiment. Je veux dire qu'on n'en rencontre pas tous les jours. Enfin, on n'en rencontre pas tous, tous les jours... </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Comment peut-on se quereller pour un jeu de guerre ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Lors d'un match acharné entre le club de Pontoise (mon club) et le club d'Ermont (nos amis), il se passa sous mes yeux incrédules une scène que je n'aurais pas imaginée. Cet épisode se déroula au siècle dernier, en 1990, dans notre spacieux bâtiment préfabriqué de Pontoise. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Notre équipe de 5 joueurs était adossée au mur du fond de la grande salle. Nos adversaires se retrouvaient donc dos à un espace dans lequel évoluaient déambulateurs et spectateurs. C'était une stratégie du club pour faire naître chez eux un sentiment d'insécurité par rapport à ce qui pourrait arriver par derrière. Quand on ne voit pas, on peut tout imaginer, un fou armé, un chien enragé sanguinaire ou un monstre mythologique affamé... Certains ne croyaient pas tellement à cette notion de stress engendrée par l'incertitude de ce qui se tramait derrière, qu'on sentait continuellement, mais qu'on ne visualisait pas. En tout cas, nous, on n'avait pas ce genre de problème et on pouvait même se balancer sur nos chaises et se caler en équilibre contre notre mur, sur deux pieds de chaise, le pied ! Nous pouvions ainsi voir clairement tout danger arriver et mourir face à l'ennemi, comme le général vendéen D'Elbée, fusillé dans un fauteuil !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mon partenaire Jean-Yves venait de plumer son adversaire, Claude M, un homme aux cheveux blancs et à la mine sévère. Suintant dans une vieille chemise auréolée, il était visiblement très aigri d'avoir perdu et disparut quelque part.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pour ma part, je jouais encore contre un certain Jean-Claude O et ma partie avait une importance particulière. Une victoire permettrait à mon équipe de gagner le match, et me permettrait à moi de prendre une revanche sur cet adversaire qui m'avait battu quelques mois plus tôt. Ce Jean-Claude était un joueur solide et sournois au possible. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Sur l'échiquier, depuis mon siège, je ne voyais que des coups intéressants. J'avais les Blancs et une grosse attaque sur son roque fragilisé. Il avait du monde en défense, mais manquait d'espace pour manœuvrer face à 6 pièces féroces qui ressemblaient à des mercenaires prêts à piller la ville dès qu'elle serait prise.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Cette situation peu enviable devenait de plus en plus intenable pour mon adversaire qui se prenait maintenant la tête à 2 mains et semblait sans cesse plonger dans les profondeurs inconnues d'un dédale sous-marin.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">C'est à ce moment qu'un personnage vint se placer à l'arrière de mon adversaire. Un spectateur qui avait terminé sa partie et qui s'ennuyait. C'était Claude M, le voisin de table que mon copain avait terrassé. Il était revenu d'on ne sait où et affichait une mine encore plus mécontente qu'au moment de sa défaite. Silencieusement grincheux, il se tenait au-dessus de son partenaire de club, légèrement décalé.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je n'aurais pas tellement aimé avoir ce genre d'ondes dans le dos. Je ne me serais pas senti totalement en sécurité... Heureusement, tel un joueur de poker dans l'ouest sauvage, j'étais tranquillement installé contre le mur et je ne pouvais pas me faire descendre en traître.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Au plus fort de sa suée, mon adversaire entendit au-dessus de lui : "t-t-t-t-t...". Vous savez, le petit bruit qu'on fait quand on veut dissuader un enfant de faire une bêtise, ou quand on appelle un chat ! Il l'entendit la première fois juste après un coup assez faible qu'il venait d'effectuer. Cela voulait clairement dire que l'homme debout n'était pas du tout d'accord avec ce qu'avait joué l'homme assis. Jean-Claude replongea sa tête encore plus profondément dans ses mains, choisissant délibérément d'ignorer cette détestable intervention, ou bien priant tout simplement Caïssa, la déesse des échecs, pour que cela ne se reproduise plus.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais après avoir joué son coup suivant, il réentendit "t-t-t-t-t..." une nouvelle fois dans son dos, au-dessus de sa tête bouillonnante. Il fulminait, les coudes fichés dans la table, la tête rouge. A l'évidence, il n'était plus en mesure de calculer quoi que ce soit.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Au coup d'après, voyant la position de son camarade se dégrader gravement, le faux frère chuchota quelque chose tout bas pour lui-même, mais également pour qu'on puisse l'entendre, à la manière des vieux qui sifflotent n'importe quoi sans le son, juste avec le souffle, à côté de votre oreille dans les magasins. Il le refit quelques instants pour tard, et là, on entendit plus clairement : "t-t-t-t-t... c'est mauvais, ça...", puis il lâcha : "n'importe quoi..." en parlant du coup que mon adversaire venait de jouer. Le malheureux, dans une position de jeu désespérée, en contrebas de voix sinistres et décourageantes, et exaspéré au possible ne réfléchissait plus. Il espérait un miracle, comme le foudroiement divin de cet ennemi inattendu, que ce dernier ait soudain envie de voir une autre partie ou bien qu'une soif impérieuse et irrépressible le saisisse. Redoutant que rien de tout cela ne se produise, il s'était figé. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il ne bougeait plus du tout, tel un lapin de garenne dans un champ, qui n'a que l'immobilité pour se camoufler. On redoutait lui et moi d'entendre encore les vilains commentaires du spectateur qui ne savait pas tenir sa langue. Celui-ci ouvrit la bouche une nouvelle fois, sans doute pour lâcher son habituel commentaire empli de fiel, mais il n'en eut pas le temps, Jean-Claude se retourna d'un coup, le regarda avec des yeux de tueur et lui jeta, à haute voix, dans la salle silencieuse : "mais quand vas-tu t'arrêter ? Tu vas te taire ? Y en a marre ! C'est toujours pareil ! Ferme-là ! " Il avait explosé et avait répondu en une seule fois à toutes les interventions indélicates qui lui étaient venues dans le dos. L'autre ne répondit pas et s'éloigna, penaud.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">La scène était à la fois spectaculaire et gênante pour tous. Voir deux collègues d'un même club ami se chamailler en public n'était pas chose courante. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mon adversaire perdit ensuite sa partie en peu de temps, me serra poliment la main et disparut encore plus aigri que celui qu'il avait fait fuir. Mais lui ne revint pas faire de décourageantes remarques sonores au-dessus d'un autre.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Une drôle d'expérience à vrai dire, et j'imagine que c'est bien là la dernière façon de se comporter avec un copain dans une compétition, qui plus est lorsque l'on joue en équipe, dans un même objectif. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">T-t-t-t-t, c'est vraiment mauvais de faire ça... N'importe quoi...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai très souvent une pensée pour tous les élèves que j'ai vus grandir, de tout petit-petit à l'âge adulte.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Cécile V fut un symbole extraordinaire de cette chance que j'ai eue de connaître des élèves bien avant qu'ils ne soient mes élèves dans les écoles ou les clubs, et bien après qu'ils ne le soient plus.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Cécile vivait à Us et avait un grand frère, Guillaume, ainsi que deux grandes sœurs, Emilie et Charlotte. Tous étaient plutôt doués pour les échecs, mais ils jouèrent peu de tournois. Leurs performances échiquéennes ne me rappellent rien de particulier. Leur gentillesse de toujours, ça, oui, je ne suis pas près de l'oublier.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai connu Cécile très jeune. Une toute petite fille que j'ai rencontrée un jour devant le portail métallique de l'école de Us alors que je parlais avec sa maman, que je connaissais bien. J'ai dit bonjour à la petite et lui ai expliqué qu'un jour, elle jouerait aux échecs avec moi à l'école. Je n'ai pas entendu sa réponse, mais cela n'a pas semblé l'effrayer le moins du monde. Elle devait déjà attendre ce moment avec impatience.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai revu Cécile quelques semaines plus tard dans sa poussette. A ce moment-là, elle était née. Je lui ai rappelé notre accord, et encore une fois, elle parut enchantée.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En maternelle, ce fut un vrai plaisir. Cécile était toujours heureuse et aimait bien les échecs. On s'entendait vraiment très bien. Il est vrai que nous nous connaissions déjà depuis longtemps.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En primaire, un total bonheur. Le jeu des niveaux, les pyramides infernales et les nouveaux jeux que j'inventais pour mes incroyables élèves. Ce moment de grâce, je le reconnaissais année après année. Mais pendant ces 5 ans-là, il y avait peut-être un petit quelque chose en plus.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Cécile partit dans un collège où je n'intervenais pas. Mais ce n'était pas grave, car elle ne déménagea pas et moi non plus. Nous nous croisâmes dans la rue, dans les magasins ou à la fameuse brocante de son village.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Elle est maintenant au lycée. On s'est vu l'autre jour au supermarché du coin. Elle était avec son copain et rien n'avait changé. On était vraiment content de se rencontrer, comme des amis qui se connaissent depuis on ne sait plus trop quand. Elle m'a donné des nouvelles de son super frère et de ses super sœurs. Il ne nous est pas venu à l'esprit de parler d'échecs. De toute façon, elle sait jouer...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">On va bientôt se revoir, ici ou là, sur la route ou dans une gare. Et ça me rappellera, comme à chaque fois, ô combien il est bon de connaître des personnes qu'on aime depuis très longtemps.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Normalement constitué, le joueur d'échecs est habité par le doute. C'est un habitué de la perplexité dans la complexité, mais en même temps, il doit savoir prendre des décisions à sens unique. Des certitudes qui sont nécessaires mais très souvent imposées par le facteur temps. Aveuglé parfois, il arrive au joueur d'omettre des précautions d'usage qui mériteraient d'être prises deux fois plutôt qu'une.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Car c'est à coup sûr du coup soi-disant gagnant dont il faut se méfier le plus, car c'est de ce dernier que viendra le guet-apens fatal, ou la chute dans la tombe qu'on s'est soi-même creusée. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Une trop grande décontraction valut un jour au plus prudent des jeunes joueurs de Pontoise cette petite histoire que je vous raconte ici, et qui ne se passe devant une assiette, comme si cela avait eu lieu devant un échiquier.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">L'action se déroula lors du championnat de France jeunes de Romans sur Isère en 1999.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Vous allez voir que même un joueur d'échecs averti n'en vaut pas toujours deux, surtout en desserts !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Avec quelques ados du club de Pontoise, nous étions, après la partie du jour attablés chez un vendeur de sandwichs oriental </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(Chacun se trouvait devant son échiquier, pour disputer sa partie)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:
Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. Nous avions fort bien mangé, lorsque nous optâmes pour un bon dessert sucré </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(tout le monde fit une bonne partie)</span></i><span style="font-size:14.0pt;
font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. Il y avait dans la vitrine tout un assortiment de douceurs au sucre et au miel : des makrouts, des cornes de gazelle, des loukoums, des baklawas, des cornets aux amandes et des kadaïfs, les fameux gâteaux allongés aux cheveux d'ange emmêlés et plein de miel, donc emmiellés. Miam ! Chacun commanda sa petite pâtisserie </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(chacun se retrouva dans une finale très agréable à jouer) </span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:green">et s'en régala </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(victoire pour tous !)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Seul François F, un garçon plaisant, prometteur et prudent, </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(sauf pour François, un excellent joueur au style assez perfectionniste)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:green">, eut envie d'un autre dessert </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(il prolongea sa partie)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. Il me demanda comment s'appelait le gâteau </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:
Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(il vit une variante intéressante)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> avec tout ces fils </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(c'était une variante compliquée)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:blue"> </span><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">qui l'entouraient et qui avait l'air si appétissant pour qui n'était pas déjà écœuré </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(il avait encore la force de calculer)</span></i><span style="font-size:14.0pt;
font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">, c'est à dire lui seul </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:
Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(les autres parties étaient de toute façon terminées)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:
Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je lui répondit très naturellement que c'était un "Pollux" et que c'était délicieux </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(une petite voix lui conseilla de jouer avec conviction un plan original mais solide)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:
Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Ça pouvait être drôle, puisque François, trop jeune, ne connaissait sans doute pas le célèbre personnage du manège enchanté, une ancienne série d'animation pour les petits </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(néanmoins, François, encore jeune, ne connaissait pas toutes les subtilités historiques de la position)</span></i><span style="font-size:
14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. Pollux, c'était le chien à l'accent anglais qui avait de longs poils qui lui tombaient de chaque côté un peu comme le kadaïf, qui lui, parlait plutôt arabe. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Notre gourmand se leva et partit commander son Pollux au gars </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(c'était parti, il lança contre son adversaire sa variante avec détermination)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:blue"> </span><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">qui était derrière le comptoir. Comme celui-ci ne comprenait rien du tout, François lui répéta plus fort. L'autre, </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(l'adversaire opposa une farouche résistance)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:green"> qui apparemment n'était pas sourd, lui redemanda ce qu'il voulait précisément. Là, il réitéra sa commande </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(François insista et sacrifia une pièce)</span></i><span style="font-size:14.0pt;
font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> de Pollux une dernière fois, mais beaucoup plus bas, comme paralysé et résigné à devenir la malheureuse victime d'une grossière plaisanterie </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(son entêtement s'avéra finalement perdant, c'était cuit)</span></i><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:green">. Je pense qu'à ce moment-là, il a vraiment prié pour que ça s'appelle comme ça... </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(Il espéra brièvement un miracle, en vain...)</span></i></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Désespéré, il se retourna vers nous et vit des spectateurs pris d'un fou rire devant la scène du dialogue de sourds </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(ses bons camarades tentèrent de dédramatiser la contre performance en lui souriant gentiment)</span></i><span style="font-size:14.0pt;
font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">. Comment un gâteau oriental peut-il se nommer "Pollux" ? Qui peur croire cela ? </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:blue">(Comment a-t-il pu se lancer dans cette ligne de jeu suicidaire ? Chacun confirme qu'il avait bien sûr vu au premier coup d’œil que c'était une erreur grossière)</span></i><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:green">.</span></i></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Comprenant la farce dont il avait été le jouet, François revint s'asseoir tout penaud en grognant : "vous abusez, je me suis tapé l'affiche". </span><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(Amère défaite, je suis mécontent d'avoir ainsi perdu sous vos yeux)</span></i><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:green">.</span></i></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Cette expression voulait dire que toutes les autres personnes présentes dans la pièce avaient profité, elles aussi de la joyeuse blague ! </span><i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(Chacun avait assisté, consterné, au naufrage de son ami).</span></i></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Voici comment un excellent joueur d'échecs, pas du genre à tomber dans la première ornière et dans une situation qu'il pensait conquise, a de manière fatale relâché son attention. A table, comme aux échecs, il vaut mieux réfléchir avant de prendre des pièces qui font envie.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Quels sont les problèmes que peut rencontrer un club d'échecs ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le pire, est sans doute de ne pas avoir d'adhérents, de joueurs. Ou de ne plus en avoir. Rien de plus triste que de voir une race s'éteindre... Plus que sept joueurs, plus que quatre... C'est affreux. Les piliers du groupe se débattent et essaient tant qu'ils peuvent de recruter pour ne pas disparaître. Mais c'est parfois inexorable.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Un autre souci est sans doute le manque de dirigeants. Le Président, le Trésorier, le secrétaire, des rouages essentiels pour que survive l'association administrativement et légalement. Si ces postes ne sont pas pourvus, ou bien si personne ne veut prendre la relève de celui ou celle qui ne peut plus assumer l'une de ces fonctions nécessaires, les "consommateurs" cessent un beau jour d'être alimentés et s'étonnent soudain de l'abandon dont ils font l'objet. Et ce n'est pas un gambit ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Parfois, oui, parfois il y a une prise de conscience de l'importance des responsables, qui, épuisés, sont partis en jetant l'éponge, sans pour autant avoir laissé une ardoise. Le club est alors sauvé de justesse, mais jusqu'à la prochaine agonie de ses nouveaux responsables. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En troisième lieu des problèmes, on peut citer... le lieu, justement. Là où vont se tenir les réunions des amateurs, des amoureux du jeu d'échecs. Les locaux sont pour la majeure partie d'entre eux prêtés par la Mairie ou une association, ou bien loués à ces mêmes bienfaiteurs. Et être des non lucratifs qui sont rançonnés par des lucratifs, c'est dur (au passage, duur en Hollandais veut dire coûteux). J'ai connu des clubs qui ne parvenaient pas à établir leur colonie. Ils devaient régulièrement prendre leurs cliques et de grosses claques pour échoir là où ils pouvaient. Alors qu'ils avaient des membres, des dirigeants, des sous ! Ils ne parvenaient pas à s'enraciner quelque part, et tels des bonsaïs sans cesse dépotés, ils restaient petits. C'est souvent le cas des associations de grandes villes, auxquelles, certes tiennent les autorités, mais qui sont trimballées d'un local à un autre en passant par la rue. A Pontoise, nous fûmes hébergés, le temps de l'été 1991, dans une cave voûté de la place des Moineaux, avant d'être relogés dans nos célèbres préfabriqués en ruines des Cordeliers. Mais la Mairie aimait bien l'armée d'électeurs que nous étions !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La petite histoire qui suit, illustre très bien toute l'attention et toute la rigueur dont il faut faire preuve pour éviter les faux pas, surtout sur les surfaces glissantes... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Avec le club du Perchay, étant donné notre situation particulière, avec des adhérents venus de 10 villages différents au moins, nous rencontrions moins de soucis de logement que certains clubs de grandes villes, puisque plusieurs villages pouvaient nous confier une salle de jeu. Le tout étant bien sûr de la rendre parfaitement impeccable, car le moindre manquement à la tenue de l'équipement souvent unique de la commune, aurait de graves conséquences. Dans les petits pays, la faible densité de population favorise une excellente communication humaine. Tout et même souvent beaucoup plus parvient aux oreilles du maire en moins d'une journée. Et le scénario en cas de drame est souvent sans imagination : sous la pression populaire des malveillants, le Maire fait un rappel à l'ordre, puis peut menacer et enfin nous chasser à coup de fourche ! Alors gare à ne pas faire trop de bruit, salir les tables de la cantine ou souiller le sol !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'aurais dû être plus sourcilleux lorsque je vis, ce soir-là, débarquer dans la cantine de l'école de Santeuil l'équipe de Saint Ouen pour un match de compétition régionale FSGT. Il n'y avait vraiment rien de personnel à reprocher à nos excellents amis du Club Audonien, tant nos relations étaient cordiales depuis des années. De plus, l'un de nos campagnards, Jean S avait débuté dans ce Club, ce qui ajoutait à la convivialité des deux<span style="mso-spacerun:yes"> </span>groupes. Mais trop de convivialité mène souvent à trop de libertés. Et trop de libertés à de regrettables animalités. L'un des membres de l'équipe de Saint Ouen, le très sympathique et très apprécié Tony D avait amené avec lui son fidèle compagnon, un bon gros chien dont la race et le nom m'échappent. Il s'agissait là d'une situation inédite, qui allait en amener une autre par la suite. L'animal avait, parait-il l'habitude de suivre son Maître qui nous assura qu'il serait sage comme une image. Devant le fait accompli, nous n'avions pas beaucoup de marge de manoeuvre. Soit le gentil chien se reposait dans un coin de la salle, car pas question de gesticuler sous une table de jeu, soit la sale bête se voyait enchaîner à l'entrée du magasin.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Nous, à la campagne, on aime bien les bêtes. On n'a pas le choix, car quand on y prête attention, on se rend compte que c'est nous qui vivons chez d'elles, dans leur univers. Mais bon, on les aime bien tout de même. Voilà pourquoi on accepta sans sourciller le copain de Tony dans la salle, tout en priant pour qu'un quelconque membre du village ne vienne pas de façon fortuite nous souhaiter une bonne soirée.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le match s'engagea et la rencontre fut plaisante jusqu'au moment où nous remarquâmes une grosse flaque jaune tout près de l'endroit où le toutou patientait. Ce dernier n'avait pas osé nous déranger durant nos ébats intellectuels, et comme Tony avait de son côté été absorbé par sa partie, l'animal s'était soulagé là où il se trouvait.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ce qui n'était qu'une péripétie du quotidien de la cohabitation entre les deux espèces devint une petite catastrophe. Nous fûmes, et moi le premier, tout à fait déconcentrés et un peu contrariés par l'incident, ce qui nous aida à perdre le match. Mais surtout, il allait falloir faire disparaître toute trace de la fuite canine avec la plus grande intransigeance. Tous ceux qui ont eu un chien savent combien l'odeur de son urine est forte. Ses congénères n'y reniflent-ils pas l'identité complète de celui qui l'a déposée ? Sans compter d'autres informations beaucoup plus improbables à notre esprit humain appauvri, telles que le moment du message, l'état d'esprit de son auteur ou la date du prochain rendez-vous... Nous nous trouvions donc, puisque dans l'esprit de certains d'entre nous, c'est là que se trouvait maintenant la priorité, dans une logique de criminel. Il fallait faire disparaître toute trace du crime. Si l'inspectrice sanitaire de la cantine scolaire apprenait les faits, c'en serait fait de nous !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le match se termina par une grosse déconvenue sportive de notre équipe qui ne chercha pas d'excuse, même si quelques-unes de nos pensées se tournèrent malgré elles vers la malice adverse.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Tony s'excusa humblement et sincèrement avec le petit sourire qu'il arborait toujours, et après nous avoir remercié pour le bon accueil, nos invités repartirent dans la nuit noire.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Nous nous retrouvâmes en chiens de faïence à nous regarder sans savoir comment nous allions purifier le sanctuaire, puisque nous n'avions pas trouvé de quoi nettoyer. La situation était abominable, et nous, de beaux minables. Il était bien 2 heures du matin. Fatigués et sur le chemin de l'inconscience, nous serions bien rentrés nous coucher, mais le spectre des employés municipaux aux yeux noirs nous apparut alors. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Nous nous remîmes donc en quête de matériel désinfectant, qui ne passerait pas inaperçu sous de bonnes narines, mais qui masquerait au moins les effluves acides du liquide croupissant laissé par l'énurétique cerbère !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après une inspection des recoins de la salle, de la cuisine heureusement ouverte, des toilettes, des meubles et du cagibi très encombré, nous trouvâmes enfin où la personne chargée de l'entretien dissimulait ses ustensiles. L'un d'entre nous (mort dans d'affreux spasmes en rentrant chez lui) se colla à l'affreuse besogne. Il essora la serpillière dans l'évier (où on lavait la vaisselle des enfants !) de la cuisine heureusement ouverte et nous désinfectâmes, sans toutefois vider la bouteille d'eau de Javel pour ne pas attirer les soupçons. Nous rangeâmes soigneusement le matériel providentiel, refermâmes la cuisine heureusement ouverte, et quittâmes les lieux, comme des malfrats.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Lorsque Christine S, vint un jour jouer avec son gentil chien Gambit, ce dernier fut contraint de stationner dehors, avec un bol à concombres rempli d'eau, héritant du lourd passif de son congénère poilu.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">De nombreuses autres aventures peuvent égayer la vie d'une association, d'un club. Pour ne pas vous affoler, je vais faire comme si je ne pouvais pas vous en citer. Je préfère de loin me remémorer l'immense bonheur d'expériences humaines comme celle-ci, qui soudent parfois pour la vie. Soyons heureux, nom d'un chien !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Peut-on ne pas perdre une partie d'échecs, alors que son portable retentit au milieu de 100 personnes ? On a tous assisté au la fin abrupte et regrettable d'une partie de compétition entre deux joueurs, parce que l'un des deux avait distraitement laissé allumé son génial engin de communication... Malheur au pas vaincu ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Mais qui d'entre nous a-t-il pu assister à la survie d'un misérable dont le téléphone à sonné dans une salle silencieuse et noire de monde ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Moi ! Aux rencontres internationales du Cap d'Agde 2008, dans l'open du Cavalier ! La partie continua comme si de rien n'était.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Et concernant ma santé, rassurez-vous, ce n'était qu'une bonne grosse toux...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">KOF ! KOF !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dans une salle embuée</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Où l'on jouait aux échecs,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Bon Thomas exténué</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Recherchait de l'air sec.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il allait et venait,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Ne tenant pas en place.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Une partie, on connaît,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Ca traîne comme une limace.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">J'assistais de mon siège,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">En plein combat rageur,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A l'habituel manège</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">De l'ami voyageur.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Quand soudain le silence</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Fut brisé, quelle horreur !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Par la grande imprudence</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">De quelqu'agitateur.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Une musique électrique</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Réveilla chaque personne</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dans la belle acoustique.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">C'était un téléphone !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Chacun sait qu'en tournoi,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Sous peine de guillotine,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">On ne peut, c'est la loi,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Faire chanter sa machine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Je vous le donne en mille,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">C'est Bon Thomas qu'on sonne...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il n'est pas volubile</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dans son beau bigophone.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Il s'échappe au plus vite</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">De la salle des penseurs,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Grâce à la feinte subite</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">D'un ami bon tousseur.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">(Poème inédit non tiré du recueil des fables du Bon Thomas).</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mon poney de bataille à moi, c'est l'éducation. Pour affirmer mes convictions, j'ai trouvé plusieurs moyens éducatifs, dont le jeu d'échecs fait partie. Quand on n'est pas très doué, dit-on, il faut enseigner. C'est tout à fait valable pour moi, mais j'en connais qui enseignent tout en étant fortiches. Cela relativise les grandes performances que l'on vous prête. Voici une bonne chose de faite.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Enseigner, c'est avoir des convictions. Vous voyez, vous, le prof dire : "c'est peut-être comme ça, ou comme ça, à moins que ce ne soit comme ça..." Avec nos mioches de l'an 2000, on serait vite raillé et mis au pilori. Et les tomates pourries, très peu pour moi. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'en ai cependant connu un, qui n'était pas sûr de ce qu'il faisait, c'était mon jeune prof d'EPS de seconde. M. Thévenot. Un exceptionnel, qui mettait en place toute une longueur d'obstacles, avec des trampolines, un cheval d'arçons, des barrières de mousses et tout un tas d'autres trucs effrayants. Il disait devant ses élèves qui se tenaient à la queue leu leu : "attendez, je vais vérifier que ça marche". Il élançait son corps d'athlète juvénil, enchaînait les bonds et se ratatinait à l'autre bout. En se relevant, il disait : "Ca marche pas, je vais enlever des trucs". Mais on avait un immense respect pour lui, qui savait se hisser sur une corniche avec un seul bras.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">L'enseignement de tout ça, c'est qu'on n'est jamais vraiment sûrs, mais qu'il faut paraître sûr de soi. Pas facile. Carrément compliqué, même.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'ai longtemps pensé, avec tout ce que j'avais observé pendant mon enfance, de mes profs, de mes entraîneurs sportifs et de par ma solide expérience, que je m'en sortais largement mieux que la plupart des éducateurs. J'étais certain de ma façon d'enseigner et de lutter pour le bon comportement des enfants envers leurs aînés.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pourtant, on assiste parfois à des épisodes qui vous marquent durablement. Surtout si ils ont un lien étroit avec ce que vous êtes ou ce que vous faites dans la vie. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">C'est ainsi que je fus un jour le témoin d'une scène qui me laissa pantois... Je découvris ce qu'était le respect absolu d'un enfant vis-à-vis d'un adulte. Je croyais savoir, et je ne savais pas...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avec le Club d'Echecs du Perchay nous étions partis jouer le tournoi d'échecs de "la bataille des Géants" à Leiderdorp, aux Pays-bas. 20 joueurs, du Perchay-Marines plus quelques chouettes renforts de clubs amis formaient, avec une poignée d'accompagnateurs la délégation française. Nous étions la seule équipe tricolore présente, face aux Hollandais, Anglais, Allemands, Belges ou Russes. Mais dans chacune des équipes se trouvaient des jeunes issus d'un autre pays. Chez nous, il y avait Akira, qui avait une maman japonaise. Alors lui, c'était un phénomène. Arrivé en CE1 ou CE2 me semble-t-il, il avait eu quelques difficultés à comprendre ce que je racontais pendant les cours d'échecs de l'école de Boissy l'Aillerie. 2 ans plus tard, il était le meilleur joueur du club de Boissy et le premier de sa classe !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">C'est donc tout naturellement que je l'avais sélectionné dans notre équipe. On avait donc un Japonais dans notre équipe. C'était pas rien.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il y avait un monde fou dans la grande salle de compétition. Encore plus lors de l'énorme buffet inaugural dressé pour les invités. C'est là que je l'ai vue. Une très gentille dame, qui ressemblait elle aussi à une Japonaise. Je ne me suis pas dégonflé, je suis allé l'aborder, ce qui n'est pas mon genre. Pas de femme, mais d'aborder les femmes très jolies.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Elle m'a confirmé en hollandais (je parle cette langue dissuasive pour un français car j'ai habité dans ce beau pays étant jeune) qu'elle était effectivement japonaise, mais qu'elle vivait aux Pays-Bas. Afin qu'il n'y ai pas de quiproquo, je lui ai rapidement expliqué que nous avions un petit Japonais dans notre groupe qui s'appelait Akira et je lui ai demandé si elle voulait le rencontrer. Elle répondit qu'elle en serait ravie.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je me mis donc à la recherche d'Akira que je localisai sans peine, car nos joueurs arboraient tous un splendide tee-shirt orange aux couleurs du club, pour se reconnaître entre eux, pour intimider les adversaires et pour se faire voir des voitures quand ils traversaient la route. Je lui dis qu'il n'y avaient peut-être que 2 japonais qui jouaient aux échecs en Europe, et chose étrange, il étaient réunis ici ce soir. Il rigola et me suivit pour aller voir la gentille dame. C'est à ce moment que je me suis rendu compte de ce qu'était le respect d'un enfant envers un adulte.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Akira était placé à un petit mètre de son interlocutrice. Il la regardait dans les yeux en lui présentant son visage le plus aimable. Sans qu'on le lui intime, il avait de lui-même placé ses mains derrière son dos et écoutait la dame lui parler.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Par respect pour ces retrouvailles inattendues, je m'étais poliment mis en retrait des 2 compatriotes, même si j'aurais bien aimé participer à leur conversation, et profiter de leur langue aux intonations abruptes, aussi distinctement que les acteurs des sublimes films de Kurosawa. Je tentais pourtant de ne pas perdre une bribe de cette discussion à laquelle je ne comprenais pas un traître mot. Ce son codé embellissait suffisamment l'image de ces incroyables personnes, pour que je n'ai pas le moins du monde envie de changer de programme. Aux questions souriantes et enjouées de la dame, Akira répondait avec révérence en hochant légèrement la tête et les mains toujours derrière lui. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'avais déjà souvent vu des enfants parler à des adultes qu'ils ne connaissaient pas. Ils se grattaient la tête, regardaient ailleurs, faisaient les muets ou même tournaient le dos. Là, à cet instant précis, j'assistais à une scène pour laquelle j'aurais payé. Ils se séparèrent au bout de quelques minutes d'une conversation d'une grande intensité, et la soirée continua. Le tournoi aussi, d'ailleurs, pendant deux jours, où nous nous défendîmes du mieux que nous pûmes face à de nombreux joueurs de première force.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Cette aventure fut un vrai bonheur, saupoudré de quelques moments de pur plaisir.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Jamais il ne m'avait été donné d'assister à une telle scène : un enfant qui savait rester parfaitement à sa place d'enfant, écoutant, apprenant d'un adulte qui savait ne pas abuser de sa position d'adulte.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ce jour-là, je pris une grande claque, alors que j'avais les mains derrière le dos. Je me mis alors à hocher la tête et à dire merci pour ce que j'avais appris.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">A la Maison d'Arrêt du Val d'Oise d'Osny, on trouve toutes sortes de personnes. En fait, le monde entier stagne entre ces murs de béton. Les gars viennent de tous les pays, et de tous les mondes. Certains sont des pauvres, d'autres ont vécu dans l'opulence. Certains sont des malchanceux, d'autres de vrais coquins. Il y a des types qui ont complètement dévié d'une trajectoire qui semblait sans histoire, et d'autres qui sont restés sur le chemin poussiéreux qui leur était proposé à la naissance. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Quand on naît dans une cité mal placée, mal fréquentée et mal réputée, on part sur une ligne toute tracée différente de celle qui démarre de la zone pavillonnaire d'un beau quartier. Les gars de cité peuvent s'en sortir. Mais ils peuvent aussi rester dans leur milieu, bien à l'abri de toute la perversion du monde honnête. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Jaïr DB était arrivé un beau jour dans le groupe d'échecs du vendredi matin un peu par hasard. Et quand le hasard est trop évident, je n'ai de cesse d'essayer de comprendre la véritable raison qui se cache derrière. Il avait toutes les qualités de base : Cap Verdien, pas très costaud, noir ou presque, discret, et il n'avait pas l'air très futé en communication. Tout du naufragé qui peut s'accrocher à ce qui flottera à la surface. Coup de chance, il se trouve que ça fait plus de 17 ans que je jette des bouées par là, dans les courants des couloirs et dans la mare d'activités dédiée aux échecs de la MAVO. Plutôt que jeter des pavés dans cette mare, j'essaie de les sortir de l'eau.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">"Sloum" était son surnom. Dans la prison, il avait des potes, qui, comme lui, n'avaient pas tenu longtemps face aux nouvelles techniques policières, de leur secteur. Il était tombé et avait fini par échoir à l'activité "échecs", par hasard, comme on l'a dit plus haut.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je lui appris donc les rudiments de ce bon jeu en adaptant ma pédagogie. Mais attention, pas question qu'il échappe à la comptine des pions. Vous savez, "les pions avancent toujours tout..." et l'élève doit répondre : "...droit !" , "Ils ne reculent... jamais !" "Ils ne vont jamais sur le... côté !", etc. J'ai vérifié que des élèves que j'ai eus il y a plus de 20 ans terminent encore la phrase automatiquement, sans avoir recours à la réflexion. C'est gravé sur le marbre gris de leur matière de la même couleur.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Après avoir appris par cœur - pas le choix - toutes les petites phrases que j'enseigne à mes maternelles, nous commençâmes à jouer. Quelle délivrance ! Du jeu ! mais attention, on commence par une bataille de pions. Et un pion qui arrive tout au bout de l'échiquier peut se transformer en Tour, en cavalier, en Dame ou en...<span style="mso-spacerun:yes"> </span>Fou ! Très bien Mon gars, on y va.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">L'intérêt de la bataille de pions, avec ses combinaisons limitées, c'est que l'Elève ne met pas tellement de temps pour rejoindre son Maître. Après avoir fait de nombreux cadeaux, Jaïr adopta un mode plus rapace et plus familier dans son jeu. Il découvrit les proies qu'il pouvait se mettre sous la serre. Nous passâmes au fil des semaines aux étapes suivantes qui étaient l'ajout de nouvelles pièces. Les parties pions-Tours donnaient une âme au jeu, comme disait le grand champion français Philidor ("les pions sont l'âme des échecs"), puis il avait appris à mater avec le jeu des niveaux, ce qui lui avait permis de plonger dans les parties Roi-pions-Tours, si proches des parties normales. Au fil des semaines, Jaïr, le petit mec des cités qui n'avait rien de mieux à faire dans la prison, était devenu un habitué. Balayé par les anciens au départ, il arrivait au bout de quelques semaines à se rendre coriace, chose qu'il connaissait d'une vie précédente. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Une des premières réflexions qui m'envahissaient, quand un de ces gars-là s'accrochait à un jeu qui ne valait rien pour lui auparavant, et pour lequel il ne semblait pas clairement doué, c'était que tout le monde pouvait se mettre aux échecs, et que donc, forcément, il n'y avait pas d'activité ou de science qui soit fermée à qui que ce soit. Pas de restriction pour personne. Et pour rien. Cela fait réfléchir, lorsqu'on entend continuellement les "grands spécialistes" locaux ou pas, déclarer fermement en parlant d'enfants, qu'untel n'a rien à faire dans cette activité ou qu'untel ferait mieux d'aller jouer aux billes ! Il n'y a qu'un seul critère qui vaille, celui de l'envie et de l'amour de faire ou de participer à quelque chose.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">En quelques mois, au fil de ses progrès et de la disparition du groupe de certains anciens (transferts, libérations), Sloum avait pris du gallon. Sur l'échiquier, il était devenu l'un des plus redoutés. Ça bagarrait sec, car la suprématie était en jeu. Une suprématie sans cesse à conquérir, dans le "club", ou à la promenade, là où ceux qui possédaient un échiquier étaient pris d'assaut et défiés. Il faisait maintenant partie des cadres, de ceux qui sont respectés par les nouveaux arrivants, qui voient en eux des intouchables. Et ça, il l'avait découvert par le regard des autres. C'était arrivé tout seul dans son esprit, un beau matin, en entendant des commentaires du genre : "je joue pas contre lui, il est trop fort pour moi, il va me massacrer". Quoi, lui, Sloum qui venait presque d'apprendre, il était déjà considéré comme un boss ? Ça allait drôlement plus vite que dehors dis donc !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Ce n'était pas fini, au bout d'une année à peu près, il était parvenu à un niveau très respectable. Quand nous jouions ensemble, il tentait crânement sa chance. Il me tenait tête et n'avait plus peur de me manquer de respect avec ses pièces. Il avait bien compris les rigoureux principes qu'il devait, coûte que coûte observer pour apprendre toujours plus, pour s'élever davantage. Cette rigueur, je n'aurais pas peur d'oser affirmer qu'il l'a apprise en prison, aux échecs. La partie libre aux échecs, c'est tout ce qu'il n'est pas vital de faire dans le jeu. Et ça, c'est une des spécialités maison d'arrêt. La seule fois où j'avais vu une telle créativité illogique mais si redoutablement efficace, c'était dans un parc de Baltimore, auprès de SDF qui jouaient toute la journée. Ici, les bords de l'échiquier étaient comme les quatre murs du quotidien, au milieu desquels une imagination débridée partait dans un galop pas toujours droit, un peu comme le déplacement du Cavalier. Le plaisir de jouer, d'être libre de ses mouvements quelque part au moins poussait à la créativité. Notre ami en était devenu le parfait exemple.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">En fin de séjour, après environ 2 ans de détention, Sloum était assis dans un coin de la salle, dos à l'angle des murs, à gauche des fenêtres à barreaux. Il attendait là, installé avec la plus grande décontraction, les jambes allongées en diagonale, et les mains dans les poches. Comme c'était un garçon d'un naturel décontracté, ce n'était pas choquant. Pas choquant non plus de le voir assis toutes les semaines à "sa" place, à attendre quelque adversaire, ou quelque élève. Car, et c'est ce qui m'avait le plus frappé, il était devenu pour moi une sorte d'assistant, avec son style propre. Disponible, il ne rechignait pas à donner une leçon humble et éclairée aux débutants qui venaient lui demander conseil. <span style="mso-spacerun:yes"> </span>Bien sûr, il donnait également d'autres types de leçons aux impertinents qui lorgnaient sur sa réputation, et qui finissaient par entendre raison : ils avaient joué contre un gars impressionnant qui devait venir d'un grand club quand il était à l'extérieur !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Sloum fut un de mes élèves les plus marquants. Il avait l'ambition secrète de créer dans ses îles du Cap Vert une Fédération des échecs qui n'existait pas. Il disparut un jour de la circulation carcérale pour peut-être mettre à profit quelques enseignements du jeu d'échecs, tels que calculer les conséquences de ses actes ou savoir approfondir pour découvrir des horizons cachés à la naissance.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Au début des années 1990 commença une ère nouvelle pour les échecs dans le département du Val d'Oise. Progressivement, la plupart des clubs considérèrent comme important d'organiser un tournoi pour les jeunes. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Un des tout premiers tournois jeunes eut lieu à Pontoise en avril 1990, dans la Maison de Quartier des Louvrais. Dans le petit Théâtre exactement, sur le même espace qui avait accueilli les tumultueux groupes rock des Béruriers Noirs ou des Wampas. Un endroit chargé d'énergie peut-on dire...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Le club de Pontoise fut le précurseur dans le domaine de la formation des jeunes dans le département. Nous devons le déclenchement de cette avancée pédagogique à deux petits bonhommes, qui ont pointé le bout de leur nez le 9 décembre 1988, dans la salle du club, 2 semaines seulement après l'ouverture officielle des portes le 25 novembre 1988.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Qu'allait-on faire d'eux ? Ils avaient l'air d'avoir réellement envie de découvrir les échecs. Le petit Henri P, surtout, qui, près de 20 ans plus tard deviendra le Président du club de Cergy-Pontoise. Je décidai de m'y coller et le vendredi soir, une heure avant l'arrivée des "satels" (surnoms des joueurs de Pontoise de l'époque), je pris la responsabilité de former les petits. 2 jeunes de plus débarquèrent au printemps. Ils étaient 12 à la rentrée suivante (dont le fameux Fabrice M). Ce nombre ne cessa pas d'augmenter pendant des années, et le tournoi jeunes que nous organisions chaque année prenait beaucoup d'envergure. Nous eûmes même la charge d'organiser le plus grand tournoi jeunes d'Ile de France pendant quelques années avec plus de 260 participants venus de toute l'Ile de France !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Ce mouvement fut suivi par de très nombreux clubs, pour le plus grand plaisir des enfants qui rejoignaient les clubs du département en masse. Ils purent ainsi, tout au long des 25 dernières années sillonner le Val d'Oise, et aller à Argenteuil, Beaumont sur Oise, Boissy l'Aillerie, Bruyères sur Oise, Butry, Cergy, Cormeilles en Parisis, Deuil-Epinay, Ecouen, Ermont, Eragny, Franconville, Frépillon, Herblay, Le Perchay, Magny en Vexin, Pontoise, Roissy, Survilliers ou Taverny. Merci à tous ces clubs d'avoir contribué à populariser le jeu d'échecs auprès des enfants.</span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Si je devais raconter une seule anecdote sur la centaine (au moins) de tournois auxquels j'ai assisté en tant qu'organisateur, arbitre ou parent, je serais bien embêté. Ce serait peut-être celle du jour où j'ai vu l'ami Didier M, Président du Club de Beaumont sur Oise venir vers moi, un jour de tournoi, comme s'il avait vu la vierge. <span style="mso-spacerun:yes"> </span></span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Didier était un Président déterminé. Il a réussi à maintenir son club en vie depuis toujours. Un club à l'ancienne, où l'on ne se prend la tête qu'en voyant arriver cinq pièces adverses sur son roque. En homme intelligent, il avait su prendre les bonnes idées un peu partout et les propager chez lui. Il avait donc ouvert un espace pour les jeunes à Beaumont sur Oise.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Nous étions là, tous deux, avec d'autres bons copains des autres clubs, en train de veiller à la bonne marche d'un tournoi de jeunes. Lui, arbitrant chez les petits, et moi chez les grands. La ronde était pratiquement terminée. Seuls quelques échiquiers étaient encore animés par des joueurs jetant leurs dernières forces dans la finale de leur partie.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Je le vis soudain quitter son poste, à l'autre bout de la salle, et me chercher du regard. La dernière partie de son groupe venait de s'achever et il venait dans ma direction, d'un pas dynamique. Qu'avait-il donc vu ? Son visage défait révélait qu'il avait été témoin de quelque fait surnaturel. Arrivé à ma hauteur, il me dit : "Philippe, Philippe, incroyable, j'ai vu un truc incroyable !" De quoi s'agissait-il donc ? Avait-il assisté à un retournement de situation inattendu ? Avait-il vu un mat qu'il ne connaissait pas ? Non, tout cela n'allait pas avec la bouille qu'il me faisait. Il continua : "J'ai vu une toute petite, ch'sais pas, elle a 5 ou 6 ans, elle est hyper forte, elle va finir championne du monde, c'est sûr !" Je lui demandai ce qu'il avait vu exactement et de me désigner celle qui l'avait mis dans cet état. "Elle a massacré un plus grand qu'elle comme j'ai jamais vu ça. Elle était dans une finale Dame-Roi contre Roi et elle a maté en quelques secondes. Elle a tout joué à tempo ! Même moi, je ne sais pas faire ça ! Elle est maximum au CP !" Il me désigna la fillette.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Une petite, une toute petite fille que je connaissait bien. C'était Morgane L, une de mes minus du Club de Pontoise. En effet, elle avait 6 ans, les cheveux longs, une bobine de coquine et une maman prévenante et distinguée, dont je me rappelle aussi très bien. Morgane n'était pas spécialement douée, mais il y avait quelque chose qu'elle aimait plus que tout, aux échecs, c'étaient les "niveaux". Les niveaux étaient un jeu que j'avais mis en place au début des années 1990 avec l'approbation de Bruce R "l'invincible", qui m'aidait pour les cours à Pontoise. Le jeu consistait à partir d'une position de finale simple (Roi + 2 Tours contre Roi seul pour le niveau 1) et de demander à l'enfant de faire mat par les coups les plus simples et les plus logiques en un temps court. Pour corser l'exercice, le prof examinateur tendait de nombreux pièges, plus mesquins les uns que les autres. Il plaçait son Roi en échec ou il l'avançait de 2 cases, ou bien il se mettait soudain à compter jusqu'à trois pour stresser l'élève. La liste des pièges et provocations infâmes ne fit qu'augmenter par la suite. Dans ces conditions presque inhumaines, le petit joueur qui parvenait à déjouer toutes les ruses sans se déconcentrer, notamment quand le prof se mettait à chanter ou à poser des questions troublantes sur le nom du chat de l'enfant, et qui réussissait à mater le vilain Roi adverse, se voyait remettre la fabuleuse carte de niveaux, tamponnée d'un motif que seul le prof possédait. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Certains élèves mettaient plus d'une année à obtenir leur niveau 1 : Roi et Tour contre Roi. Le niveau 2 était un petit peu plus compliqué. Il fallait avoir raison du Roi ennemi seul, avec un Roi et une Dame. Nouvelles positions, nouveaux pièges ignobles : un plateau de jeu qui tournait progressivement, un éternuement du prof qui éparpillait les pièces qu'il fallait replacer précisément et les cages logiques qu'il fallait trouver pour réduire du mieux l'espace du Roi adverse. Les niveaux, c'était vraiment difficile. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Au club, Morgane était à deux doigts d'en finir avec son niveau 2, sur lequel elle s'acharnait depuis plusieurs semaines. Bientôt, ce serait le niveau 3, avec un Roi et une Tour contre un Roi seul. Alors, mater un autre mouflet sans les horribles pièges, c'était du gâteau au chocolat ! Même si le mioche se trompait de case et posait involontairement son Roi en échec, Morgane lui disait : "échec ! T'as pas le droit !" en une fraction de seconde. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Je répondis à Didier : "cette petite s'appelle Morgane, elle a en effet 6 ans et en finale Roi-Tour contre Roi, elle sait jouer 20 coups précis en 15 secondes, ce qui est tout à fait normal, puisqu'elle est tout près de décrocher son niveau 2 !" </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">C'est ainsi que le jeu des niveaux, que j'explique dans mon livre "Vive les Echecs" se propagea dans de nombreux endroits de France. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Chez nous, ce jeu, somme toute convivial, aura permit à des centaines d'enfants de prendre confiance en eux, d'affirmer leur caractère et, au passage de savoir mater sans coup férir, comme Morgane, pas plus surdouée que les autres. Morgane, qui un beau jour déménagea pour Lyon, en emportant avec elle tous ses bons souvenirs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:fuchsia">Ma petite, si tu lis un jour ces lignes, n'oublie pas de me donner des nouvelles !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je me disais qu'on partait pour quelque gueuleton dont le Président de Belfort-Echecs était coutumier, comme chacun savait. N'était-il pas capable de faire des dizaines de Km pour aller déguster son mets préféré, la tarte aux myrtilles sauvages ? Chouette, un bon repas ! Ça fêterait aussi mon arrivée et me montrerait à quel point les Francs-comtois étaient accueillants. C'était super sympa, et je l'avais bien mérité. Il y avait dans la voiture, 2 copains de Jean-Paul qui étaient eux aussi tout contents d'être là.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La grosse berline se mit à vrombir et démarra d'une roue décidée. Je ne pus me contenir longtemps et je demandai à Jean-Claude quelle était notre destination. C'est là que mes rêves de rêves se sont évaporés. "Bah mon copain, on fa faire un tournoi d'échecs !" (Je me rappelle plus du bled). C'était pas vrai ! Tout sauf ça ! Pensais-je...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ha super ! Formidable ! dis-je en songeant qu'après une journée de 100 Km à vélo, dont quelques dizaines sous la pluie à un train de malade, j'aurais quand même pu prétendre à m'étendre. En plus, j'avais drôlement faim... Mais il ne fallait pas traîner, car le tournoi se situait à une heure de route de là.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">C'était un tournoi du soir. Vers une heure du matin, ce serait fini... Youpi ! Moi qui avais précisément envie de jouer une nocturne pendant mon temps de récupération. C'était l'agonie assurée... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Dans la voiture, le chemin me paraissait long quand je reprenais conscience par intermittences et que je me demandais : où suis-je ? Ha oui, je suis en sécurité dans la belle voiture de Jean Paul Touzé. Puis je me rendormais. Au bout d'un temps que je ne pus jamais mesurer, nous arrivâmes dans un endroit bizarre, une petite bâtisse blanche avec de nombreuses petites salles dans lesquelles il y avait des tables avec des échiquiers dessus. Les joueurs présents étaient arrivés de partout, tels les membres d'une secte secrète. C'était là le signe que les échecs étaient très populaires dans la région. Il régnait une ambiance très bon enfant. Les gens étaient détendus et je n'ai pas tellement remarqué de pression particulière. De toute façon, ma rage de vaincre était restée quelque part sur la route, dans les derniers instants de mon périple. Pour reprendre quelques forces, je crois bien que j'ai mangé des gâteaux, mais je ne sais plus d'où ils venaient. D'une aumône, sans doute.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Porté par des anges, je fis un tournoi aérien. Je me rappelle m'être cogné contre des pylônes ou avoir plongé avec bonheur dans le molleton des nuages. Rien ne me fut désagréable, j'étais dans un état insensible. La défaite et la victoire aux échecs n'ont plus la même saveur après 100 bornes à vélo, 2 bonnes douches et 60 nouvelles bornes de taxi. Je suis demeuré dans cette insensibilité de bout en bout, y compris lorsque j'ai battu Maître Touzé qui s'était retrouvé par une coïncidence qui ne m'étonnait plus, face à moi vers la 4<sup>ème</sup> ronde. Je ne me rappelle plus comment j'ai fait et je ne peux l'expliquer, car il était plus fort que moi et il était très motivé par ce tournoi. Mais je me souviens qu'il n'en a pas paru affecté le moins du monde. J'ai mis sa réaction calme et sportive sur le compte du savoir-vivre et de l'hospitalité du personnage. Le tournoi se termina dans la nuit et dans la bonne humeur et nous repartîmes dans une chorale de : "A pientôt ! " ou " Ponsoir tout le monte !" Je fus pour ma part extrêmement vigilant dans ce désordre à ne pas être oublié, moi qui n'avais pas la moindre idée de l'endroit où je me trouvais !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après coup, en y repensant, ce comportement de gentleman m'a beaucoup marqué, ainsi que la belle générosité qu'il avait avec ses amis ! Surtout envers moi qui n'étais qu'un copain de passage ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le lendemain, dans les locaux du célèbre club de Belfort, nous déjeunâmes ensemble ce que sa fille nous avait préparé et amené sur un plateau. Tout était organisé avec précision. L'emploi du temps, la gestion administrative, les moments d'accueil, les compétitions internes et externes. Ce devait être un grand honneur de participer à la vie de ce club, alors que dans de nombreuses associations, on peine à attirer par des ruses malicieuses quelques bonnes volontés. Si j'avais habité le secteur, je n'aurais pas résisté à m'investir. Je comprenais comment il avait une telle équipe derrière lui.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je fus enchanté par ce séjour qui se prolongea encore un peu, puisque ma chambre d'hôtel fut payée une nuit de plus. Mais il ne fallait pas que je traîne trop en route, sinon, je serais de nouveau dans l'obligation de fournir de gros efforts pour rejoindre Auxerre en temps et en heure. Ce championnat de France fut d'ailleurs pour moi une belle réussite, puisque j'y ai terminé 7<sup>ème</sup> sur 180 dans l'Open B ! Ça situe le niveau, tout relatif, mais j'étais en grande forme...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après cette histoire, j'ai croisé Jean-Paul Touzé plusieurs fois. Si l'envergure du personnage m'a véritablement impressionné, il ne fait aucun doute que lui aussi a été marqué à vie par l'image d'un type qu'il avait vu débarquer un jour chez lui, à vélo par temps d'orage. Il n'avait jamais oublié ça et me lançait à chaque fois qu'on se revoyait un : "Salut Philippe, t'es pas fenu en félo cette fois ?" Je lui répondais : "non, pas cette fois, mais méfie-toi..." </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Jean-Paul Touzé était un très bon joueur d'échecs. Il fut Président du club de l'usine où il travaillait, à Belfort, de 1971 à 1977. Ensuite, il créa "Belfort Echecs", un club qui devint l'un des meilleurs de France par la suite. Organisateur de très nombreux tournois internationaux, arbitre international, agent du champion du monde Karpov, ami personnel du ministre Chevènement, "Cheucheu", comme il disait, Jean-Paul Touzé a créé dans sa ville de Belfort un club d'échecs exceptionnel : le "Stade Échiquéen Anatoly Karpov" (430 m² !). Cet homme très imposant, au caractère extrêmement déterminé, aura marqué l'histoire des échecs en France. Disparu en octobre 2013, j'ai regretté de ne pas l'avoir revu avant son départ quelque part où il va sans doute encore remonter un truc. Comme dit ma maman, il faut faire les choses, ça passe vite, après on regrette.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai fait la connaissance de Jean-Paul Touzé le jour où je lui ai téléphoné pour le débat triangulaire (avec MM. Loubatière et Petiteau) précédant les élections fédérales de 1996. Le débat eut lieu dans le luxueux salon d'un hôtel super classe de Cergy Pontoise. Il voulait devenir le prochain Président de la Fédération Française d'échecs et était prêt à beaucoup d'actions pour y parvenir. C'est donc tout naturellement qu'il accepta l'invitation du Club de Pontoise, pour venir défier Jean-Claude Loubatière, le Président sortant dans une joute oratoire. Il arriva le premier et l'on vit à ce moment-là un type très fort en tout. Physiquement, intellectuellement et humainement. Il était une sorte de mélange entre une baleine, un requin et un dauphin. Son côté jovial avait instantanément séduit bon nombre d'entre nous, mais il était surtout venu pour en découdre. Après quelques frayeurs initiales dues à l'apparition de dernière minute du Président Loubatière, le débat put avoir lieu. Il se déroula parfaitement, et force fut de constater combien était grande la puissance de persuasion du challenger, un homme à soulever des montagnes, pour y installer des jeux d'échecs à la place. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le débat terminé, tous trois passèrent une nuit à l'hôtel, puis s'en retournèrent chez eux à Belfort, Montpellier ou ailleurs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">L'histoire que voici se situe quelques mois plus tard, lors d'un de mes voyages à vélo en solitaire. Ces raids me permettaient de partir à l'aventure, de chercher mes limites et de me rendre d'un point à un autre. J'étais ainsi allé jusqu'en Belgique, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Luxembourg, en Espagne (avec ma fille Marieke), ou dans quelques villes françaises éloignées de chez moi. Lors des premiers voyages, je dormais ou je pouvais, dehors dans la forêt, dans des cabanes de jardin, dans des abris bus, des écuries, ou parfois, par temps de chance, chez l'habitant. J'ai réalisé mon premier voyage à vélo en 1985, à 18 ans, d'Amsterdam à Pontoise. A l'époque, c'est ce qui me permettait de me calmer pour que je ne parte pas comme Raymond Maufrais, dans la jungle amazonienne (eh oui...). En vieillissant, car après 18 ans on vieillit, lors des autres voyages, j'ai alterné la récupération sauvage dans la nature avec les chambres miteuses des hôtels aux étoiles négatives. C'était trop difficile de répéter les étapes de 100 Km en ayant dormi sous la pluie à quelques mètres d'une voie de chemin de fer. Faut le faire ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Revenons à notre histoire. En 1996, je pris à vélo la route pour aller jouer le championnat de France d'échecs à Auxerre, que je voulais atteindre en passant derrière les Vosges, par Strasbourg. C'était en ligne droite, mais plusieurs lignes mises bout à bout, et pas toujours dans la même direction. Un beau défi qui m'a laissé de nombreux bons souvenirs, notamment la route le long du Rhin, entre la France et l'Allemagne, où je passais d'un pays à l'autre tous les quarts d'heure. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'avais entamé le retour vers Auxerre lorsque je vis que je pouvais faire une halte à Belfort dans la soirée. Je me dis alors que je passerais bien un coup de fil à Jean-Paul Touzé, avec lequel j'avais bien sympathisé au téléphone après le débat de Cergy-Pontoise. Qui ne tente rien n'a que des regrets. Mon calepin garni me donna son numéro de téléphone et je décidai de l'appeler de la cabine téléphonique de la place d'un village.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Fidèle au poste, il décrocha immédiatement et je perçus dans sa voix au fort accent franc-Comtois une pointe de surprise et une grande joie. "Ponchour Philippe, ça va ? Qu'est-ce que cheu peux faire pour toi ?" Je fus assez étonné qu'il me parle comme si j'étais un de ces vieux camarades qu'il avait grand plaisir à retrouver. Je lui fis un bref récit de ma situation, lui disant que j'étais en route pour Auxerre. Il me dit : "mais c'est pas la route, ça ! Qu'est-ce que tu fous par là, toi le Pontoisien ?" Je lui racontai que j'aimais la difficulté des choses tordues, et que s'il pouvait me renseigner sur un endroit près de chez lui où je pourrais passer la prochaine nuit, j'en serais très heureux. "Mais fiens chez moi, cheu vais te trouver ça ! Mais tarteu pas, je tois sortir ce soir fers 19h00 ! T'es où ?"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Il me restait une soixantaine de kilomètres à parcourir en quelques heures. C'était largement à ma portée. J'étais très excité à l'idée de revoir Jean-Paul chez lui, à Belfort, et peut-être même de pouvoir visiter son célèbre club ! Mais tout a un prix, y compris les choses gratuites. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après ces bonnes nouvelles, le temps se couvrit et de gros nuages tristes menaçaient soudain de fondre en larmes. Je me mis à augmenter la cadence circulaire de mes jambes et je fis 10 Km assez rapidement. Le vent se leva, ce qui n'augure rien de bon par temps gris, et je fis 10 autres Km encore plus rapidement. Quelques gouttes commençaient à humecter la route, mais je tenais bon train : 10 Km de mieux ! Il se mit soudain à pleuvoir dru. Très dru. Ca devint dur, très dur. Vent de face, pluie battante et compte à rebours. Il fallait passer en mode commando. Quand on a fait élève officier et qu'on a passé quelques semaines de nuits blanches et glacées comme à la Courtine dans le massif central, on peut tout. Les 10 Km suivant furent avalés comme on engloutit une bouteille d'eau dans l'air sec. Mais le temps pressait et j'avais la crainte de trouver porte close à Belfort. Il était déjà 18h00 et j'avais encore 20 Km à faire dans la tempête. Je m'arrêtai dans un village pour téléphoner à Jean-Claude, afin de lui rendre compte de la situation. "Quoi ? Encore fingt Km ? Mais dépêche-toi un peu, pétale plus fite mon cars !" C'est ce que je fis. Sous des trombes d'eau, trempé de la selle au guidon, je parcourus 10 nouveaux Km à la vitesse des éclairs que j'avais aux fesses. Allez, encore 10, allez, plus que 5. J'appelai une dernière fois Jean-Claude, qui partait dans un quart d'heure. "Mais dépêche-toi ! Je fais partir ! Cheu t'attends encore un quart d'heure defant là où tu fas tormir cette nuit". Il me donna l'adresse d'un bel hôtel de Belfort et je repris la route. J'arrivai en trombe d'eau devant l'hôtel complètement rincé et délavé. Me voyant ainsi accoster, il eut un sacré choc. Il m'a, j'en suis certain pris pour un plus fou que lui. Me tendant une clé il me lança : "ha toi, tu es fou. Fa prendre une touche en 4<sup>ème</sup> fitesse et retescends, cheu t'emmène !".</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Une fois arrivé dans la belle chambre d'hôtel, je pris une bonne, bonne douche, mis des vêtements secs, et résistant à l'envie presque irrépressible de me coucher sur le grand lit tout propre qui sentait bon, je parvins à redescendre en titubant, la main sur la rampe. Au pied de l'hôtel, la voiture de mon copain m'attendait. Je pris place à l'arrière du véhicule qui partit aussitôt. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A suivre...</span></p>
<p>
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<![endif]--><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Que celui qui a toujours joué aux échecs sans être dérangé par son adversaire vienne me voir, je l'emmènerai dans un restaurant aux mille senteurs enivrantes : moi pour oublier, lui pour le faire profiter encore de la chance qu'il a.</span></p>
<br />
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Mais je doute que ce moment arrive bientôt, car de même que l'on a été un jour importuné par un malpropre ou un brailleur dans un mobile (et cætera...), on a tous eu l'esprit accroché par notre adversaire plus fortement que par la variante que l'on devait calculer. A fortiori si l'on a essayé d'être soi-même irréprochable.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">A priori, je ne suis pas intolérant. En tout cas pas pour tout. Mais il y a des limites.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Le gars qui faisait remonter son ventre rond et flasque en serrant et desserrant<span style="mso-spacerun:yes"> </span>ses cuisses toute la partie, je lui pardonne, même si je fixais avec horreur ce que je voyais. Le petit jeune (aujourd'hui Grand Maître International) qui se fichait pas mal de moi ou de notre partie de championnat de Paris, et qui mangeait un sandwich au Thon dont les grasses miettes se répandaient sur l'échiquier, je lui pardonne in extremis. Le vieux qui avalait sa salive en claquant ses lèvres baveuses aux commissures blanches toutes les 27 secondes, je ne lui en veux plus, alors que j'ai distinctement pensé "liberate me ex inferis" devant cette vison diabolique. Grosso modo, je pardonne à quasiment tout le monde, alors que certains devraient être expulsés de l'aire de jeu manu militari. Je crois in petto que mon seuil de tolérance est élevé.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je me suis un jour retrouvé en face d'un cas où j'ai eu du mal à être ouvert et fraternel. L'attitude de mon colocataire du mètre carré de notre surface ludique m'entraîna ce jour-là vers des pensées néfastes et belliqueuses. Et je ne fus plus capable de vraiment moduler correctement ma tolérance envers lui. J'étais plus en colère après moi qu'après lui parce que je n'aime pas en vouloir aux gens, surtout quand ce n'est pas clairement de leur faute. J'étais donc énervé d'être en colère. Et lorsque, aveuglé par mes éclairs involontaires, je ne suis plus apte à faire mon mea culpa, il y a casus belli.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Ce jour-là, nous jouions dans l'exigu bungalow de l'école du Perchay, où nous recevions l'équipe de Clichy. Je ne fais pas de reproches directs à l'homme qui était en face de moi et qui a logiquement triomphé de mon infériorité technique. J'en veux surtout à la situation qui a mené à la décomposition de mon état, face à l'odeur pestilentielle de l'haleine de mon vis-à-vis.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Finalement, je lui en veux peut-être à lui. Quid est veritas ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Une lèvre inférieure fendue permettait à un mince filet de souffle de passer, concentré et puissant lorsqu'il expirait, la bouche presque fermée, un peu comme lorsque l'on siffle. Le bon air pur de la campagne inhalé était instantanément transformé en un gaz nocif sorti de quelque tombe. Mon adversaire semblait vivant mais "perinde ac cadaver", rendant continuellement son dernier souffle...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Le bouquet, si j'ose dire, de cette situation où nous étions nez à nez ad vitam aeternam aurait-on cru, était que l'horrible courant d'air vicié n'effectuait pas un voyage rectiligne vers mes narines. Il plongeait en oblique vers les cases d6 et e6 (il avait les Noirs) où il rebondissait comme une balle prenant de la vitesse, et m'infectait les naseaux traîtreusement par le dessous. Après un début de partie prometteur, je ne m'en sortais pas. Ni dans mon jeu, ni dans mon feu nasal qui me donnait à présent des haut-le-cœur de perdant cacochyme. Vase victis ! Me dis-je, je ne pouvais pas invoquer la moindre excuse après la défaite qui se profilait. En parlant de profil, j'ai essayé de jouer en tournant la tête, je me suis misérablement caché le nez avec la main, je suis sorti me promener dans les effluves florales crépusculaires, ou bien j'ai décalé ma chaise. Rien n'y fit, il n'y avait que des conditions perturbantes. Il y eut statu quo dans la pénible situation qui était la mienne.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">J'étais condamné à périr deux fois : une fois asphyxié et une fois en couchant mon Roi. J'aurais voulu dire : "mais fermez donc cette bouche, respirez par le nez, nom d'un putois !" Mais je n'osais rien dire et je croyais pouvoir surmonter ces miasmes. Ce ne fut pas le cas et je me suis retrouvé dans l'impasse de l'intolérance. Je ne pus tolérer d'être secrètement intolérant envers un adversaire qui avait eu l'inconscient toupet de propager ses fumets nauséabonds, voisins des armes chimiques interdites par la convention de Genève... Heureusement, la partie se termina avant que je ne sois irrémédiablement contaminé, et je pus reprendre haleine. Je crains néanmoins que la joute n'ait pas été loyale. J'ai encore la feuille de notation de ladite partie en ma possession, et lorsque l'on rejoue cette partie, on remarque que certains coups, curieusement, sont inexplicables. Un petit peu comme si leur auteur avait été frappé d'une maladie mentale passagère.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Dans cette histoire, je n'avais pas du tout aimé l'idée que je ne m'en sortirais pas et que ça sentirait si mauvais pour moi. Il y avait là un côté inexorable et définitif, un peu comme lorsque l'on vient de lâcher bêtement une pièce sur l'échiquier. On veut la reprendre, mais la pièce est jouée !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je m'étais donc dit en mon roque fort intérieur : Acta fabula est !</span></p>
<p>
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<![endif]--></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Voici une histoire tragique.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">J'avais tissé des liens assez forts avec le club d'échecs d'Alkmaar, une ville magnifique des Pays-Bas où j'ai passé une partie de ma jeunesse. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Avec le Club de Pontoise, nous allions visiter nos amis du nord pendant plusieurs jours, tous les deux ans environ, un coup chez eux, un coup chez nous. Quelle richesse lorsqu'une passion mène à la rencontre d'autres cultures ! Car la Hollande, tous ceux qui y sont allés comme invités vous le diront, c'est très différent de la France. Pas le même relief, pas la même nourriture, pas la même politesse, pas la même manière de s'occuper des vieux ou des handicapés, et pas la même façon de se qualifier pour une coupe du monde de football. C'est pour toutes ces raisons que nous nous y rendions chaque fois avec le plus grand des plaisirs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Cette année-là (1995 ?), je me souviens d'une scène particulière que je ne suis pas près d'oublier, et pour cause...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Après avoir roulé en car toute la journée, nous arrivâmes sur le parking où nous attendaient nos familles d'accueil, et le terme est on ne peut plus adapté, tant ces gens sont formidables. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Les retrouvailles faites, nos amis, voyant bien que nous étions fourbus, s'empressèrent de nous appeler à tour de rôle pour nous dire qui dormirait chez qui. Les Français appelés prirent leurs bagages et enjoignirent le pas de leurs hôtes. Les familles visiteuses n'étaient pas séparées et parfois gardaient des liens privilégiés avec celles qui les avaient accueillies.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Le parking se vida peu à peu, et je me retrouvai l'un des derniers avec mon ami Thomas D, qui était très apprécié au pays des fromages. Pas de malentendu sur ce point : nos amis Hollandais aimaient vraiment beaucoup Thomas qui représentait sans doute pour eux une forme d'humanité à grande échelle. De plus, Thomas en voyage, c'était l'énergique assurance de ne pas s'ennuyer un seul instant. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Hélas, alors que nous n'étions plus qu'une poignée, nos amis Hollandais nous apprirent que l'un des jeunes adultes du club, que nous connaissions bien était décédé accidentellement pendant l'année. Et ils avaient décidé que ce serait Thomas qui irait loger dans la famille en deuil...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Je vous laisse découvrir la suite, je n'aime pas trop la raconter. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">ACCUEIL MORTEL</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Bon Thomas en voyage,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Avec tous ses amis</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Au pays des fromages</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Jubilait, c'est permis.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Pour dormir, les chanceux</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Seraient tous hébergés</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Chez des hôtes gracieux.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Quel bon petit congé !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Chacun avait famille,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Avec joie s'y fondait...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Vive quand on s'éparpille</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Chez les grands Hollandais !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Mais malheureusement</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Il y en avait un</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Qui n'avait pas vraiment</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Apprécié son butin...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Bon Thomas, un glas sonne !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Etait mis sans remords</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Chez de pauvres personnes </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Dont le fils était mort...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Et il dut, tout le soir,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Regarder les photos</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Dans un grand désespoir</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">D'un parti bien trop tôt.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">(Extrait du recueil des fables du bon Thomas).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:gray">Toutes mes pensées pour cette famille.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je crois avoir tenu quelques semaines avant que Pierre ne soit fermement résolu à passer à l'offensive. Toutes ces métaphores à base de poulets traquant le malfaisant, ou de perchoir duquel il me guettait, n'étaient que de la fiente de pigeon, ou pour pigeon, oui, c'est mieux. Je ne devrais pas plaisanter avec ça. La réalité, c'est que pendant quelques soirées encore, il veillait au grain et attendait le bon moment pour venir m'aborder. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ce moment arriva tout naturellement. Le prédateur au sol attendit patiemment que je sois épuisé de me rendre indisponible. Je pensais à ce moment-là qu'il avait plutôt dû être militaire. Ou chasseur de primes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je reconnais que j'avais eu une crainte plutôt exagérée quant à la grande discussion qui devait nous réunir. Avec cette persévérance que je lui avais vue à sauter sur le poil des adhérents, je m'étais protégé, c'est tout. Jamais je n'ai eu de pensée réellement intolérante ou envie de lui voler dans les plumes. Et puis, ne devais-je pas, en tant que Président du club me rendre disponible pour tous ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pierre s'excusa humblement de m'importuner. Il avait fort bien remarqué à quel point j'étais tout le temps occupé. Il me complimenta sur notre club, qui était si vivant et plein de gens fort sympathiques. Il était heureux de venir, mais ne se sentait pas tellement à sa place, car il ne jouait pas bien aux échecs. Il avait appris au régiment, et n'avait plus joué ensuite. Il voulait s'y remettre. Après quelques mois, il s'était fait un copain débutant de son âge, Gérard A, avec lequel il passait du temps. Mais ce qu'il voulait, c'était apprendre sérieusement, car c'est ainsi qu'il avait tout fait dans sa vie. Simplement jouer aux échecs n'était pas suffisant, les cours du samedi après-midi étaient trop compliqués, il ne comprenait pas très bien les livres et tout ça l'énervait. Il me demanda au bout d'une demi-heure de compliments et de plaintes s'il était sensé de prendre des cours particuliers pour progresser. 150 tours de mangeoire pour finalement se décider à picorer...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je me souviens avoir immédiatement pensé "non, ça ne sert à rien !" Mais ne me devais-je pas à chacun ? Je répondis donc que ça pouvait éventuellement être une bonne idée, mais qu'il fallait trouver un prof pédagogue et disponible pour cela. De plus, il fallait que l'élève soit sacrément motivé. Et puis ça nécessitait quand même un certain investissement pécuniaire. Il enchaîna : "Combien ?". Là, je savais que ma réponse serait déterminante. Je lui dis qu'il faudrait débourser environ 200 francs pour une heure et demie. Le vieux pingre renoncerait, c'est certain. Mais au lieu de ça, il profita de cette information pour me demander si je connaissais un prof qui pourrait lui convenir. Certes, un prof d'échecs ne doit pas mettre tous ses œufs dans le même panier et il doit varier ses activités, mais donner des cours d'échecs à Pierre en tête-à-tête me semblait une tâche des plus ardues. C'était pour moi hors de question car ça ne m'emballait pas du tout.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il y avait presque toujours une place libre devant chez Pierre. Je m'y rangeais avec soin, car j'avais toujours l'impression de voir les rideaux bouger à mon arrivée. Pas question d'érafler le mur ou de louper mon créneau... Ding dong ! J'imaginais avec résignation le moment où l'énorme chien poilu viendrait me fêter comme un sauveur d'animaux désespérés. Sitôt la porte ouverte, la bête tournait autour de moi en effectuant des bonds gigantesques et en essayant de me lécher. La femme de Pierre me rejoignait alors dans l'entrée pour me porter secours en tentant vainement de retenir le sympathique monstre canin. A ce moment exactement, et à chaque fois, Pierre apparaissait du salon en traînant ses savates et sermonnait le chien dont je ne me rappelle plus le prénom et disait à sa femme : "couché ! Couché ! Mais mets donc cette bête dans le jardin !". L'ouragan passé, nous nous saluions et passions ensuite dans le salon, au milieu du salon, sur la table centrale du salon. Là, un jeu d'échecs en bois nous attendait. A côté du plateau se trouvait un calepin, un stylo, un verre de jus de fruits, et... un billet de 200 francs... Loucher pendant le cours eut été une faute professionnelle qui n'aurait pas échappé à mon disciple qui scrutait tout. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'avais mis en place avec une pédagogie adaptée, un système lent et progressif pour l'apprentissage des bases du jeu, que Pierre pensait connaître. Mais c'était désastreux. Il fallait défaire pour refaire par-dessus. Double travail. Je parlais pendant 20 minutes environ pour présenter différents principes fondamentaux, puis nous jouions une partie qu'il devait noter sur l'une des feuilles que je lui avais apportées, et enfin, nous examinions la partie de la semaine précédente ou bien celle qu'il avait jouée contre son échiquier électronique, qu'il appelait Agathe. Les progrès furent lents, et Pierre avait tendance à oublier ce qu'on avait vu la semaine précédente. Il me répétait chaque semaine, je dis bien chaque semaine ! exactement la même phrase : "et là, je ne savais plus quoi faire, je me suis senti comme une poule devant une brosse à dents !"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Cette phrase me résonnait à l'esprit pendant toute la semaine. J'ai fini par comprendre ce qu'elle voulait dire. Elle parlait clairement de la conscience de ce noble animal.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Malgré toutes les petites choses qui me faisaient frémir, tressaillir ou défaillir tout au long de ce chemin incertain, j'ai fini par apprécier le travail entrepris avec Pierre. On partait de tellement loin. Pierre a continué quelques années au club, et a bien progressé. Il a même joué en compétition, faisant souvent cadeau de ses pièces. Et je suis plutôt fier d'avoir réussi à l'aider dans sa quête de compréhension d'un jeu qu'il avait appris au régiment.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Et maintenant je le sais bien : tout le monde peut apprendre à jouer aux échecs !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Donner des cours particuliers n'est pas simple, mais c'est souvent une facette de l'activité de celui qui enseigne les échecs s'il veut manger à sa faim. Que l'on soit Grand Maître ou mini prof, il y a presque toujours une demande qui surgit un jour ou l'autre.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'ai eu plusieurs élèves, des enfants, surtout. L'idée était presque toujours venue des parents qui voulaient le meilleur (je ne parle pas du prof) pour leur petit. Ainsi, le futur champion aurait une chance de devenir un bon joueur...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Au rayon des adultes, je place à la première place indétrônable, mon élève Roi toutes catégories, Pierre V. Quand je repense à lui, une immense fierté m'envahit, mêlée à la pensée d'un forçat déplaçant des blocs de granit pas ronds. Cette autosatisfaction irradie mon esprit, et une larme pourrait me perler au coin de l'orbite lorsque je mesure la valeur des progrès effectués par mon élève à l'époque. On dit à l'époque quand on vient de citer une date. Mais là, vous n'aurez pas de date, pas d'âge non plus. Mon élève avait 60 ans, 70 ans, 77 ans ? Pas fastoche. Il me vouvoyait, alors je ne lui demandais pas son âge. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pierre V avait débarqué au Club de Pontoise un beau jour, l'allure voûtée mais vive toutefois. Un peu gros, bien dégarni, une moustache grise frétillante et un clin d’œil perçant persistant vous prévenait que ce nouvel arrivant allait bientôt s'installer dans votre paysage.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ce fut le cas. Il vint tous les vendredi soirs, mais pas trop tard, car il se levait à l'heure des poules, un animal noble dont on reparlera.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il eut tôt fait de faire le tour des humains du Club. Cet homme avait du être vendeur, négociateur dans la police ou quelque chose comme ça. Il entamait une discussion avec un membre, et c'était parti pour un long moment. Les yeux du malheureux interlocuteur cherchaient l'aide providentielle d'un camarade qui serait venu le sauver en prenant part au monologue. Mais tous évitaient soigneusement la zone de harponnage. Les visages se détournaient, les dos s'éloignaient. Il était devenu dangereux de rester seul, comme dans un film où des ados n'en finissent pas de se séparer dans une maison sinistre. Mais là, j'exagère, notre Club n'était pas sinistre, il avait tout d'une salle de bal. Mais une salle de bal où il fallait danser ! Sinon Pierre venait vers vous et vous invitait !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je faisais le mort en déplaçant de temps en temps une pièce sur l'échiquier. Mon adversaire faisait pareil. J'avais eu la chance de ne pas me faire coincer par Pierre pour un méticuleux inventaire des différents aspects de la vie d'un club d'échecs. Je le voyais tourner dans les locaux en dodelinant de la tête et du jabot, tout en cherchant un ami avec qui caqueter. Quand il entrait dans ma zone, je baissais vite les yeux en me prenant le crâne dans les mains, car à ce moment précisément, je devais calculer sans coup faillir une variante de la mort.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais comme un malfaiteur qui sait que l'étau se resserre et que la police va bientôt venir le cueillir, je vivais nerveusement, avec l'appréhension d'être appréhendé. Ce n'était quand même pas une obsession, mais j'y songeais assez fort tout de même. Surtout que Pierre avait déjà parlé avec beaucoup de joueurs. Au fil arachnéen des semaines, je voyais distinctement une toile se tisser autour de moi. Nos salutations aimables et nos sourires polis à distance n'étaient plus qu'une protection illusoire. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Tel un gallinacé, l’œil fixe, il me regardait régulièrement. Il était désormais prêt à changer de régime et pouvoir passer des grains de blé à un autre menu, moi qui me sentais de plus en plus ver de terre. S'il avait eu des cheveux, j'y aurais vu une crête, s'il avait levé un talon, je l'aurais imaginé gratter la terre de la basse-cour. Il cherchait maintenant à entamer une discussion avec moi. C'était devenu le but de ses soirées...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">A suivre...</span></p>
<p>
</p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai découvert les échecs par hasard, en fin d'année de CM1, lors de la dernière journée de classe, lorsqu'un dénommé Patrice C. un gars qui avait une mèche devant les yeux et qui écrivait la tête contre la table, avait amené un échiquier en classe. Ce jeu m'avait tout de suite captivé et je m'étais vite fait offrir par le "Noël du travail à mon père" (il n'était pas encore au chômage), un jeu d'échecs de taille moyenne, en bois. Je me souviens surtout des Cavaliers qui avaient des yeux bizarrement placés. L'un était même un cyclope. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai cherché partout des partenaires de jeu, que j'ai trouvés avec mes copains habituels. Mais ceux-ci, pas trop forts, trouvèrent bientôt des excuses pour ne plus jouer avec moi, qui étais dans une phase, disons, euphorique... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Il ne m'est rapidement resté que deux adversaires : d'abord mon grand-oncle Albert, le frère de mon grand-père Henri. Les frangins s'étaient mariés le même jour au même endroit avec deux sœurs, Jeanne et ma grand-mère Madeleine, vous suivez ? Ce n'est pas grave, c'est surtout important pour moi. J'allais donc voir l'oncle Albert qui habitait la maison voisine de celle de mes grands-parents, une fois par mois environ, car il habitait à Bombon, en Seine et Marne, mais surtout en 4L. Tonton Albert me mettait de belles roustes au début, puis, le résultat de nos quatre parties traditionnelles tourna vite en ma faveur. 2 à 2, puis quelque temps après, 4 à 0 pour moi. Il ne pouvait plus gagner. je me rappelle que lorsqu'il attaquait ma Dame, il me disait : "A la Dame !" Un dernier vestige du fameux "Gardez la Dame ! " du 19<sup>ème</sup> siècle sans doute, où l'on avertissait courtoisement son adversaire que sa Majesté était dans le viseur...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mon deuxième adversaire était mon copain d'aventures Jean-Yves. Enfants, on a joué plus de mille parties ensemble, dont les résultats étaient notés dans un petit cahier rouge. Je gagnais le plus souvent, mais je fus un jour traumatisé par un 10 à 1 en sa faveur. On croit <span style="mso-spacerun:yes"> </span>à chaque instant s'approcher de l'immortalité, mais on ne l'atteint jamais. Le jeu d'échecs est là pour nous le rappeler. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Nos parties se déroulaient sur la moquette beige de ma chambre, sur fond de Motörhead ou de Rose Tattoo, nos groupes de rock fétiches pendant si longtemps... On étaient allongés là, pendant des heures, la fenêtre ouverte, a inventer des débuts imparables, à raser toute une aile du camp adverse. Un jour, nous nous aperçûmes qu'en contrebas, dans le jardin d'à côté, par beau temps, la voisine, une peau de vache qui s'appelait Denise Leveau et que nous surnommions "Meuh", corrigeait les copies de ses élèves. Cette vieille carne était prof d'anglais dans un collège pontoisien. Elle terrorisait les élèves en leur collant leurs chewing-gums dans les cheveux. Je préférais encore être giflé au tableau par la naine Guillon en CM2 à l'école Ducher (photo sur "copains d'avant" pour les chasseurs de nazis).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Bon, on n'est pas là pour régler des comptes, c'est déjà fait, mais pour parler de "Meuh", que nous persécutâmes avec beaucoup de régularité et de différentes manières pendant quelques années. Elle était fort mauvaise, nous confisquant nos imprécises balles de tennis et martyrisait nos frères d'un autre collège. Fenêtre béante, nous nous complaisions dans l'ultra-son électrique lorsqu'elle prenait le soleil dans son jardin. Mais que voulez-vous, il ne nous était plus possible de jouer aux échecs dans le silence... Nous fûmes sans doute un peu responsables de ses énervements et griffonnages, rouges tous les deux, sur les copies de ses élèves, auxquels nous assistions entre deux parties, mais eux aussi devaient se soulever !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ah, comme il était bon de jouer aux échecs en ce temps-là, quand il n'y avait pas de clubs... Une situation qui n'allait pas durer. Hé hé...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Voici quelques lignes sur un membre historique du Club d'Echecs de Pontoise : Pierre B. Pierre était notre Monsieur "grande classe" à nous. Un cadre au costume toujours impeccable, éduqué et poli dans un univers de jeunes sauvageons en pleine ébullition. Il nous avait prodigué d'excellents conseils pour la modification et la modernisation de nos statuts associatifs. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Toujours calme mais avec un oeil aiguisé qui forçait le respect, il avait été naturellement adopté par tous. Ses grandes compétences diplomatiques ne l'avaient-elles pas propulsées en première ligne pour toutes les actions nécessitant un porte-parole crédible du club ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Les rencontres avec la Mairie ou avec les collectivités locales en avaient fait tout naturellement l'animateur du célèbre débat triangulaire des élections fédérales de 1996, organisé par notre club. Ce débat avait réuni au Novotel de Cergy-Pontoise, les deux principaux candidats de la joute : MM. Loubatière et Touzé. S'était mêlé à la Lutte un troisième concurrent, M. Petiteau, un drôle d'oiseau qui n'avait pas pesé bien lourd au moment des votes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pierre avait été excellent en animateur des débats. Sérieux, connaissant son sujet et distillant parfaitement les temps de paroles à l'un ou à l'autre. On aurait pu croire qu'il avait fait ça toute sa vie. Nous avions vraiment là quelqu'un de précieux.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Un jour il lui arriva cependant une incroyable petite histoire. Lors d'une soirée de compétition de FSGT (l'autre Fédération dans laquelle on joue aux échecs), il perdit sa partie tout à fait régulièrement. Il serra avec respect la main de son adversaire, se leva, et invita son vainqueur à le suivre pour analyser leur partie dans la pièce d'à côté. C'était en effet préférable afin de ne pas déranger par des commentaires pleins de vie les joueurs qui étaient encore en pleine réflexion dans la pièce principale. Les deux hommes disparurent donc de la salle de matches où je me trouvais, les mains sur les tempes, en train d'essayer de m'extirper d'une situation compliquée.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Dans cette salle, trois équipes de cinq joueurs du club affrontaient trois autres clubs franciliens. Des joueurs méditaient sur leur position, d'autres regardaient les bras de fer avec intérêt, et quelques-uns se promenaient, tout heureux de humer l'atmosphère de cette chaude ambiance. De l'autre côté de la pièce, un badaud faisait nonchalamment le tour des champs de bataille désertés. Il jetait un œil sur les parties achevées dont les pièces n'avaient pas été remises en place. Il s'appelait Denis S, et avait terminé sa propre partie depuis un bon moment.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Denis s'arrêta soudain devant les vestiges de la partie jouée et perdue par Pierre. Son regard se fit plus perçant au fur et à mesure qu'il tentait de comprendre comment le pauvre Pierre avait succombé. Il déplaça une pièce et leva la tête cherchant à communiquer avec quelqu'un. Il trouva un autre joueur, lui montra quelque chose sur l'échiquier et tous deux quittèrent la pièce d'un pas vif. Ils revinrent bientôt avec Pierre, lui montrèrent quelque chose sur la partie. Ce quelque chose fit se décomposer le visage de notre Monsieur "classe", qui se mit d'un coup la main sur le front, comme le célèbre inspecteur Colombo...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je pris congé de mon adversaire pendant quelques instant et rejoignis le petit attroupement. C'était bien ce que j'avais compris : le malheureux Pierre avait cru perdre sa partie et, certain de s'être fait mater, il avait serré la main de son adversaire un peu trop vite. Mais il n'y avait pas mat, car un coup fort subtil sorti de derrière les fagots sauvait la situation !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Trop tard... la cause était entendue et la partie perdue. Ce fut une petite tristesse de voir notre ami ainsi affecté par un manque de rigueur qui ne lui était pas coutumier. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ce fut là encore un enseignement de Pierre : il faut y regarder à deux fois quand on croit être mort... Pas bête !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Dix-sept ans de cabane, ça peut paraître long. C'est pourtant depuis tout ce temps que j'entre dans la Maison d'Arrêt du Val d'Oise d'Osny deux matinées par semaine. Mais moi, <span style="mso-spacerun:yes"> </span>j'ai aussi la chance de pouvoir en ressortir à chaque fois. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Je suis intervenu pendant dix ans, de 1998 à 2008 auprès des mineurs de l'établissement pénitentiaire, ce qui était un travail très "technique". Je n'avais là que des gars des cités, et pas des moindres... Mes années de colos à risques et de maison de quartier m'ont alors été bien utiles.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Hormis les cours, les tournois intérieurs et la supervision (je n'ai pas dit super-vision hein !) des parties libres, j'ai souvent organisé à la MAVO des stages et des tournois en invitant des joueurs extérieurs à participer.<br />
Il y a quelques années, j'y avais fait venir plusieurs amis de différents clubs, pour l'unique tournoi qui ait jamais eu lieu dans le quartier "mineurs". C'était une expérience intéressante, mais ce fut la seule avec les jeunes, étant donné que la population des 14-18 ans a ensuite été déplacée à Porcheville dans les Yvelines.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">L'intérêt de la petite aventure que je raconte ici ne réside pas dans le tournoi de ce jour-là, qui s'était bien déroulé, mais dans la blague faite par les surveillants du quartier des mineurs à Cyril W, l'un des visiteurs présents ce jour-là. Après avoir joué de fort belle manière son rôle de bol d'air frais aux enfermés, Cyril était tout heureux d'enfin repartir chez lui, le devoir accompli.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Mais avant de refaire le long chemin parsemé de portes fermées à double tour électronique, les surveillants demandèrent à Cyril s'il voulait visiter un peu les lieux. Ils lui proposèrent de lui faire voir l'endroit que l'on nommait l'isolement, la cellule des encore plus punis, en quelque sorte. Des anciens m'ont récemment raconté que cette cellule , spartiate et inconfortable, avec un lit et une table de béton, plus un wc crasseux et non dissimulé dans un coin, ressemblait aux anciennes cellules normales. Et l'ancien isolement, disparu aujourd'hui était, lui, beaucoup plus terrible. Les temps changent et prennent des allures plus confortables, en France tout du moins...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Mais bon, ce qui n'est plus inhumain pour un détenu peut le sembler, si on est, comme au monopoly, en simple visite. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Cyril, qui n'est pas quelqu'un de renfermé, accepta donc la proposition et entra dans cet endroit rudimentaire, confiant et tout emprunt de curiosité, comme pour l'exploration d'un musée. Sitôt qu'il fut à l'intérieur, il entendit la lourde porte se refermer derrière lui. Puis ce fut un sinistre "clic-clac" qui lui signala que ladite porte était close pour de bon. Les malicieux surveillants l'avaient incarcéré sans aucune forme de procès !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Seul à l'intérieur, au milieu d'un réduit de béton et derrière un porte indestructible, Cyril ne se démonta pas. En excellent joueur d'échecs, il convint avec logique qu'il n'était pas dans une série télévisée, la proie de quelque traquenard malveillant. Une imagination débordante, transformée peu à peu en la perte des réalités à cause d'une addiction à la télé, en aurait déstabilisé plus d'un. <span style="mso-spacerun:yes"> </span>Mais ce n'était qu'une blaaaague... Oui, une bonne blague. Ha ! Ha ! Ha ! Vous pouvez ouvrir la porte maintenant s'il vous plait ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Nous ne saurons jamais combien chaque seconde dura dans sa tête d'homme libre, mais elles durent paraître un petit peu plus longues que leur temps de passage, car il semble impossible de ne pas clairement s'imaginer en taulard un instant au moins pendant cette expérience unique. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Nous rîmes de bon cœur en libérant le sympathique repris de justice.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:red">Je peux maintenant rappeler à Cyril qu'il a fait de la prison, pour de vrai, et dans un quartier d'isolement, le scélérat ! Pas longtemps, certes, mais il en a fait. Heureusement, rien n'est inscrit sur son B2, l'extrait de casier judiciaire sur lequel sont notifiés les passages derrière les barreaux.</span></p>
<p>
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-fareast-font-family:"Times New Roman";
mso-bidi-font-family:Arial;color:red;mso-ansi-language:FR;mso-fareast-language:
FR;mso-bidi-language:AR-SA">Je compte sur vous et votre discrétion pour que son passé trouble ne soit pas étalé au grand jour...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Il me revient en mémoire un bref épisode de la magnifique saison de nationale 2 avec le club de Pontoise, en 1998.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Nous venions de jouer une double ronde (une le samedi et une le dimanche) à Avoine, une petite ville sympathique entre Tours et Angers. Après deux matchs gagnés et un fol espoir de titre de champion, nous nous en retournions pleins d'allégresse vers Pontoise dans le minibus municipal. L'équipe dont j'étais le capitaine était composée d'un savant mélange de bons joueurs du club que précédaient deux ténors du plateau Jabob Murey (GMI) et Arnaud Payen (MI). Aux dernières tables, il y avaient les jeunes du club, Olivier S, Carl S, et Cécile N, notre féminine. Les deux ados étaient vraiment des gars sympas, mais il fallait se les farcir... Au moindre relâchement de ma part, une idée d'une créativité toute particulière pouvait germer dans leurs cerveaux fertiles.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Que s'est-il passé ce jour-là ? Comment ai-je pu céder ? La décompression après la victoire, la gestion ultra technique du groupe ? Je ne sais pas.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Il me résonne encore aux oreilles la voix d'Olivier qui braillait à intervalles réguliers : "j'ai faim", sur le chemin du mini car, et le mini car en chemin... Je ne sais plus ce que disait Carl, mais il était d'accord.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Au bout d'une demi-heure et d'une douzaine (au moins) de "j'ai faim !", j'ai pensé que nourris, ces deux-là seraient plus paisibles et qu'ils ne casseraient plus les oreilles aux joueurs épuisés. En capitaine consciencieux, j'ai donc avant tout pensé au groupe et j'ai proposé que l'on s'arrête pour acheter quelque chose à manger, des sandwiches par exemple. Il fut donc convenu que chacun aurait un quart d'heure maximum pour dénicher ce dont il avait besoin pour se sustenter, car nous avions encore de la route. Quelque temps après, chacun revint donc avec un sandwich ou quelques gâteaux...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Il est convenu de dire qu'un sandwich, c'est du pain avec quelque chose dedans. Seulement, il existe plusieurs sortes de sandwiches, il y a nos traditionnels Jambon-beurre, les sandwiches anglais avec du pain de mie et des garnitures telles que du coleslaw dedans, les paninis chauds et parfumés au fromage fondu, et puis il y a ceux que l'on nomme les "grecs". Ces derniers ont pour caractéristiques d'être chauds et gras. Très gras. De la graisse des basses parties animales (on ne sait pas exactement quels animaux) dont ils sont composés. C'est ce que Carl et Olivier avaient choisi.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Nos joueurs d'échecs regagnèrent leurs places dans le véhicule, et l'on démarra.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">En un rien de temps, une odeur écœurante avait envahi notre habitacle. Nous avions l'impression d'être entassés dans la cuisine exiguë du restaurant douteux d'un quartier sordide. Nous ne pouvions déjà plus supporter ces vapeurs carnées, étant tous au bord de quelque malaise, lorsque nous vîmes qui était le plus malheureux d'entre nous. Il s'agissait de Philippe L, l'un de nos meilleurs joueurs. Il était agrippé à la mini fenêtre du petit bus, tentant désespérément de happer de l'air extérieur. Le pauvre était un végétarien assidu ! Pâle comme un linge, il donnait l'impression de quelqu'un qui sentait avec certitude qu'il vivait là ses derniers instants. <span style="mso-spacerun:yes"> </span>En vaillant guerrier de l'échiquier, il avait cru pouvoir dépasser cette effroyable épreuve olfactive, mais cela s'avérait impossible et suicidaire. Il gémissait : "on ne peut pas s'arrêter ? Je veux sortir !". On lui répondait : " On va quand même pas s'arrêter toutes les 5 minutes !". Un autre disait : " c'est vraiment horrible cette odeur... Laissez-moi aller devant !". Des voix s'élevaient : " J'ai mal au coeur !" ou " Jette-moi ça par la fenêtre !". Et moi, moins mal que les autres et tiraillé par deux décisions contraires à prendre : " allez, ils ont bientôt terminé..." Les sales gosses, plein d'humour en rajoutaient : "vous en voulez un peu ? On a du mal à finir !"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Pour conclure, ils terminèrent enfin leur mets délicat, dans une buée grasse et nocive. Nous aérâmes notre espace vital (si on peut dire) au maximum et poursuivîmes notre route dans de froids courants d'air salvateurs. De mémoire, tout le monde avait survécu à l'odyssée, mais Philippe L jura qu'il ne remonterait plus jamais avec nous et nous ne mangeâmes plus jamais dans le mini bus.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Cette année-là, nous terminâmes deuxièmes du championnat de nationale 2, juste derrière Le Chesnay.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">La montée en nationale 1 (avec les pros !) nous échappa de justesse le dernier jour, à la dernière ronde, au dernier coup de la dernière partie du match entre Tours et Le Chesnay. Alors que son équipe gagnait, le malheureux Tourangeau commit une gaffe fatale qui fit basculer le résultat final. Impuissants, nous repassâmes derrière nos concurrents au classement, nous les perdants magnifiques... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:olive">Ce fut vraiment une riche saison !</span></p>
<p>
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<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Difficile de changer l'image que les gens ont de vous. Ils vous voient souvent tel que vous êtes, physiquement ou dans votre comportement, ils vous voient aussi au travers de ce que vous faites dans la vie ou d'après votre lieu de provenance. Un métier ou une activité intensément pratiquée vont vite vous placer dans telle ou telle catégorie dans la tête des autres. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">D'ailleurs, l'origine de nombreux noms de famille a une signification précise. On s'appelle Legrand parce qu'on avait un ancêtre de grande taille ou on s'appelle Carpentier parce qu'on avait un ancêtre charpentier. Et on s'appelle aussi Pontoise parce qu'on joue aux échecs au Club de Pontoise.<br />
Rencontres internationales d'échecs du Cap d'Agde 2000 :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">dans le restaurant rempli d'affamés, un plateau repas dans les mains et cherchant à regagner ma place, j'entendis un autre joueur d'échecs, en chemin lui aussi, qui ricanait en disant "Ha lalalala, Pontoise..." Je fus tenté de dire : "qu'est-ce qu'il y a, Pontoise ? Il y a quelqu'un qui a un problème avec mon club ?"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais au lieu de ça, je baissai la tête et partis vivement vers ma table, en enjambant les milliers de minuscules billes de glace qui jonchaient le sol, toutes fondantes, le tout au milieu d'une foule hilare. Et un brin moqueuse.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">IRRUPTION</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Dans un grand réfectoire</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Où l'on mangeait fort bien,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je vais vous dire l'histoire</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Du cornet vésuvien : </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Tout heureux, tout content,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Bon Thomas retournait</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">D'un pas lambin pourtant,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Rare pour qui le connaît.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Car il avait en main</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Un cornet de billettes,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Après tout c'est humain</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">D'aimer bien les boulettes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il allait se rasseoir</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avec sa gourmandise, </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais c'était illusoire,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Elle n'était pas conquise.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Le récipient glacé</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Tenu bien fermement,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il rentrait relaxé, </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Un peu trop justement !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Pour d'inconnues raisons,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Ou avec déraison,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Bon Thomas avait trop</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Empoigné le fourreau.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Au milieu de la foule,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Comme une pluie glacée,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">S'envolèrent les boules,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Qui s'étaient dispersées...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">(Extrait du recueil des fables du Bon Thomas).</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Parmi les bons jeux que je me vantais d'avoir inventés, il en est un qui aura eu une courte durée de vie. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Au début des années 1990, avec mon ami Jean-Yves, nous nous retrouvions parfois au Club de Pontoise en plein après-midi pour se faire une petite partie d'échecs. Un trou providentiel commun dans notre emploi du temps, et hop ! On en profitait pour jouer</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">sans être dérangés. C'était facile</span><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> puisqu'en tant que Président du Club je possédais les clés! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">J'ai un jour proposé à Jean-Yves un jeu qui me semblait assez drôle et excitant, mais qui a vite tourné au cauchemar pour moi...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Il s'agissait de placer une vingtaine d'échiquiers sur des tables placées en carré tout autour de la grande salle du club, en laissant un espace entre ces tables et les murs, afin que quelqu'un puisse passer derrière.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">C'était le jeu de la "double simultanée". On devait affronter le même adversaire sur 20 plateaux, l'un jouant à l'extérieur, et l'autre à l'intérieur du périmètre. Le départ devait se faire depuis des points opposés et nous devions ensuite tourner dans le même sens. 20 parties contre l'autre en même temps ! Le tirage au sort m'avait attribué l'intérieur du carré de tables, une aubaine ! Ce serait terrible pour celui qui était à l'extérieur de courir comme un dératé autour des tables pendant que l'autre se promènerait tranquillement au centre en ne faisant que quelques pas... <span style="mso-spacerun:yes"> </span>Pour couronner ce jeu royal à 40 monarques, nous jouions avec des pendules ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Les fous, pensez-vous ? Il faut mieux dire "le" fou, car il y avait un léger détail auquel je n'avais pas pensé. Malin, et souvent avec un temps stratégique d'avance sur mes compagnons de jeu de société, j'avais la secrète idée de piéger mon adversaire. Mon intention diabolique était de lui faire souffrir le martyre en jouant approximativement mes coups, mais très vite pour le rattraper. Après chaque coup, je déclencherais les pendules. Ainsi, en le pourchassant, ce serait son temps à lui qui s'écoulerait sur toutes les horloges réglées à 15 minutes par joueur !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Ha ! Ha ! Imparable ! Démoralisé, la pression au front, il se retrouverait rapidement avec 17 ou 18 pendules qui tournent en même temps et perdrait toutes les parties au temps !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Seulement voilà. Dans l'euphorie des plans machiavéliques ourdis contre de prétendus plus faibles, on a souvent tendance à ignorer une partie des précautions d'usage.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Ma manigance tourna court. Sitôt le top de départ lancé, et alors que j'étais tout à fait serein, je vis mon bon ami accélérer comme s'il avait quelqu'un à ses trousses. Quelqu'un qu'il tentait de semer et en même temps de poursuivre, et ce quelqu'un, c'était moi. Et tout en jouant du plus vite que je pouvais, je me mis à réfléchir sur les failles de mon ingénieux système. Dire que ce jeu était à sens unique était à double sens, on courait dans la même direction, mais un seul des deux allait tout gagner : le plus rapide ! Et je voyais bien que ce ne serait pas moi. Jean-Yves, avec l'intelligence bestiale qui le caractérisait parfois, avait prestement réduit l'écart de départ, puis il avait fondu sur moi, impitoyable et malicieux. Au secours ! Je sentais son souffle court juste derrière moi, à l'échiquier suivant.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Ce genre de situation devient vite inexorable. La partie devient facile pour votre adversaire qui vous plonge, lesté, dans un bain peu à votre goût. <span style="mso-spacerun:yes"> </span>Il ne lui reste plus alors qu'à jouer juste après vous, en vous collant aux basques, tandis que vos 20 pendules tournent. Le score de cette joute inédite fut sans appel 20-0 pour mon ami.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Je vous déconseille ce jeu.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:purple">Mais soudain, aujourd'hui, près de 25 ans après l'humiliation, je pense avoir trouvé une variante qui me semble meilleure : c'est tout simple ! Il faut démarrer le duel dans des sens différents ! Vite, mon téléphone !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">L'histoire qui suit a sans doute influencé toute ma façon d'enseigner le jeu d'échecs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Elle se déroula aux championnats d'Ile de France des jeunes en 1992 ou en 1993. C'était l'une des toutes premières fois que j'accompagnais ma troupe de crevettes dans le panier de crabes parisien. Il fallait bien reconnaître que nous n'étions pas très forts. Les enfants de notre club venaient pour le plaisir, les parents étaient contents que leurs petits soient heureux, et moi j'apprenais mon métier avec curiosité.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Les jeunes jouaient à leur rythme et terminaient donc leur partie à des moments différents, cela va de soi. Ils arrivaient donc au compte-gouttes annoncer leur résultat (qu'on connaissait déjà en observant leur bouille du retour) à leurs parents et à leur entraîneur qui attendaient au QG, dans les tribunes. Ensuite, si on avait un jeu et si on trouvait une place libre, on pouvait aller jeter un coup d’œil sur la partie pour l'analyser.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">C'était mon rôle, entre autres.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Ce jour-là, j'analysais avec Hélène C, une très chouette ado du Club de Pontoise qui avait eu quelques ennuis dans sa partie du jour. Inexpérimentée, elle avait fait de son mieux mais son adversaire, sans pitié, avait mis un gros pétard au milieu des pièces d'Hélène. Et la position avait rapidement senti le roussi. N'ayant pas eu assez d'eau pour éteindre l'incendie, elle avait été réduite en cendres. Carbonisée et ne comprenant pas bien ce qui s'était passé, elle était arrivée au bout du rouleau pour analyser sa partie. Mon objectif était avant toute chose de la faire renaître de ses cendres. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Au bout de quelques minutes, elle avait repris ses esprits, au bout d'un quart d'heure elle avait repris espoir et au bout d'une demi-heure, elle avait repris goût à la vie, on rigolait bien ! Et là, arrive un entraîneur connu (même par moi), avec son Hélène à lui. Il s'installa juste à côté de nous et débuta l'analyse de la partie de son élève. Manifestement, il n'était pas très content. La feuille de notation à la main, il reproduisit la partie en déplaçant les pièces rapidement. Cette dernière était visiblement déçue, mais surtout soumise et sans réaction. L'entraîneur commença alors à commenter les coups qu'il voyait : </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">"Mais qu'est-ce que c'est que ça ? Il faut sortir tes pièces. Tu ne te développes pas..."</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">La subtile analyse se poursuivait. La fille était maintenant livide et pétrifiée. En plus, elle était coincée sur un banc du côté du mur...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">L'entraîneur reprit : "vraiment, c'est n'importe quoi, tu ne développes rien. Tu es la championne du non développement..."</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Nous étions, Hélène et moi affreusement gênés. Nous masquions cela par une super ambiance dans notre mètre carré. Nous assistâmes alors à une scène qui me traumatise encore :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">"C'est nul, tu es la championne du monde du non développement !"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">La jeune fille avait maintenant les mains sur son visage. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">"Qu'est-ce qu'il y a ? Ecoute ce que je te dis..."</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Elle éclata soudain en gros sanglots, épuisée, désespérée, voulant tellement s'échapper...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Et lui ne trouva rien de mieux à dire que : "<b style="mso-bidi-font-weight:normal">mais pourquoi tu pleures</b> ?"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Voyant enfin la catastrophe, il tenta enfin de rassurer son élève. Je n'ai pas su s'il y était parvenu. Avec Hélène, on s'est éclipsé en chantonnant...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Cet épisode me hante encore, et tous ces bons mots me raisonnent encore aux oreilles lorsque un(e) élève a fait n'importe quoi lors d'une partie de compétition, et que je dois commenter ses plus belles bêtises.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Pour finir, je peux dire que cet entraîneur de haut niveau est un type très bien. Il est devenu bien plus fin au fil du temps et est par la suite devenu un copain...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">A Pontoise, j'ai habité quelques temps un bâtiment flambant neuf de la rue de Gisors, au 66 exactement. Et par une pure coïncidence, à l'étage du dessus, habitait un certain Ahmed B, joueur d'échecs en club, lui aussi. Mais lui n'était pas inscrit au club de Pontoise, qui se trouvait à une rue de là (dans la rue Debussy pour les nostalgiques). Ahmed jouait à Herblay, nos ennemis intimes, les cadors de la FSGT, emmenés par leur célèbre Président Claude Colin, avant que nous ne les détrônions avec Pontoise. Ce bon joueur fort sympathique était resté fidèle au club de ses débuts et n'hésitait pas à faire des kilomètres pour retrouver ses copains, soit. Responsable d'une équipe devant affronter Herblay un prochain vendredi soir, je m'en fus avant l'heure du repas frapper à la porte de mon ami Ahmed.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Salut Ahmed, excuse-moi de te déranger, j'ai besoin d'un petit renseignement.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Vas-y, je t'écoute.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Sur la brochure, ce n'est plus le bon gars qui est capitaine de l'équipe B de chez toi, tu peux me dire qui c'est maintenant ? Faut que je l'appelle.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Oui, le capitaine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- C'est ça, donne-moi le nom de ton capitaine d'équipe.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Le capitaine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Oui, j'ai compris, je veux son nom pour me mettre d'accord avec lui pour le match !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- C'est ce que je te dis, le capitaine !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Tu le fais exprès ou quoi, je le sais que le capitaine, c'est le capitaine, ce n'est pas le sergent ! Comment s'appelle-t-il ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Gérard le capitaine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Arrête de rigoler, on ne va pas y passer la soirée. Merci pour le prénom. Dis-moi son nom Ahmed. Cesse de faire le fou.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Mais je te le dis depuis tout à l'heure, il s'appelle Gérard Lecapitaine, son nom, c'est Lecapitaine, en un seul mot.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Ha, ok, tu ne pouvais pas le dire tout de suite ? Merci Ahmed, passe-moi son numéro de téléphone en chiffres s'il te plait...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ca ne s'invente pas ! Je passe au passage un petit coucou à Ahmed et Gérard s'ils lisent un jour ces lignes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Dans le même genre, on me rapporta un jour l'histoire suivante :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<i style="mso-bidi-font-style:normal"><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;color:blue">Afin de remplir sa feuille de partie, comme il est d'usage avant de commencer à jouer, un gars demanda à son adversaire "Comment t'appelles-tu ?" Ce dernier lui répondit : "m'appelle Jacques". Le joueur le remercia pour son prénom et lui demanda son nom. L'autre répéta : "M'appelle Jacques". Ce monsieur s'appelait en réalité Jacques Mappelle.</span></i></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Au moins, aux échecs, on ne peut pas se blesser !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Combien de fois ai-je entendu cette stupidité inconsciente ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Mais mon cher, on peut se blesser n'importe où ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">L'écrivain italien Aretino n'est-il pas mort d'un fou rire en 1556 ? Le dramaturge allemand (et opposant d'Hitler) Von Horvath ne fut-il pas, sur les Champs-Élysées, écrasé en 1938 par un marronnier déraciné par la tempête ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Aux échecs, c'est pareil. Les dangers invisibles sont bel et bien présents. Voici quelques exemples de ce à quoi j'ai pu assister pendant toutes ces années : </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un jeune courant entre les tables trébucha et se cogna la tête. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un gars se bloqua le dos en voulant ramasser une pièce qu'il avait fait tomber au sol. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un enfant s'ouvrit le cuir chevelu en se heurtant à un coin de fenêtre. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un joueur s'assit à côté de sa chaise. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un petit, assis sur le bord d'une table, les pieds ballants, bascula en avant, vers le bord d'une autre table. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un collégien lança une pièce d'échecs dans l'oeil d'un camarade. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un enfant agité se blessa au front en le cognant contre ses propres pièces. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Une élève se retrouva coincée dans les toilettes. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un joueur voulant bien faire se fit tomber une lourde table sur le pied...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un blitzer se fit écraser un doigt par son adversaire qui appuyait sur la pendule avec une pièce.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">J'en passe, et des meilleures...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Mais la palme de la blessure la plus incroyable que j'ai vue revient, sans nul doute à mes yeux, à l'un de mes élèves de la Maison d'Arrêt d'Osny en 2003.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">En général, quand j'arrive dans la salle d'échecs, tout le monde est déjà présent depuis une heure environ. La raison en est simple, les détenus sont extraits vers de rares activités telles que les échecs avant les grands mouvements comme la promenade du matin qui dure deux heures et les trajets vers les ateliers, l'infirmerie ou le parloir. On ne peut raisonnablement pas faire se croiser dans les couloirs 600 prisonniers sans stress... J'arrive donc après tous ces déplacements bien coordonnés, entre 9h30 et 10h00. C'est un bon équilibre, mes gars peuvent jouer un bon moment, et se défouler avant que je ne leur prenne la tête pendant le reste de la matinée. Depuis 17 ans que j'interviens à la MAVO d'Osny, il y a toujours eu une bonne ambiance comme celle qui régnait dans les anciens clubs comme à Pontoise, Ermont où Le Perchay.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Ça bouge, ça chantonne, ça vanne sec et ça rigole beaucoup. Une certaine conception des échecs en club...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">J'arrivai donc détendu et heureux de retrouver ma douzaine de joueurs, car je savais que l'ambiance allait encore être très créative. Il fallait que j'atteigne le fond du couloir du secteur socio-éducatif, une aile de bâtiment où se trouvent aussi la bibliothèque, l'atelier maquette, l'atelier peinture. Là se tenait le "club d'échecs". Toc toc toc... un gars m'ouvrit de l'intérieur, car il n'y a pas de poignée extérieure et le surveillant d'étage ne ferme jamais à clé cette paisible activité.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Bonjour tout le monde ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Et là, ça part toujours à fond : - c'est à cette heure-là que t'arrives ? Faut que tu t'occupes de untel, il en gagne pas une, il est au fond du trou ! Viens je te prends... etc. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">C'est toujours un grand plaisir. Mais un des habitués n'était pas présent. Je questionnai l'assemblée : - et "X", il ne s'est pas levé, ce matin ? Il a préféré éviter les ennuis ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Un des tauliers me répondit : - ha oui, au fait, "X", il est parti à l'infirmerie, il s'est blessé ici tout à l'heure. Il s'est planté un Roi dans le menton !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- La vache, qui lui a fait ça ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Il se l'est fait tout seul !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Raconte !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Bah voilà, il jouait tranquillement quand "Y" (son adversaire), qui se balançait, a perdu l'équilibre. Il a commencé à tomber en arrière en bougeant les bras. Lui, pour le rattraper, tout en restant assis, il s'est jeté en avant pour le rattraper, et hop ! Il a eu une baisse de menton fatale vers ses pièces et s'est fichu son Roi dedans ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">- Bigre ! Ha, c'est ça le rouge par terre...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#A50021">Conclusion : il ne faut pas mésestimer les dangers cachés et périphériques du jeu d'échecs, et surtout, ne jouez jamais au jeu du "Je te tiens, tu me tiens par la barbichette" avec un Roi, c'est imprudent...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Alors celle-là, d'histoire, je ne veux même pas en parler... Je la raconte juste parce qu'il n'y a eu aucun blessé et pour que cela serve aux générations futures.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">A l'époque, j'étais directeur de colo, entraîneur de jeunes au foot, père de jeunes enfants et animateur de plein de choses dans les écoles.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Imaginez-vous être une poule (déjà pas facile) et qu'un fermier jongleur débutant s'exerce avec vos œufs devant vos yeux...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">L'HELICO PAR TERRE </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">(scène en un acte dans le hall du club d'échecs de Pontoise au milieu des années 1990 - Le décor est sobre. A gauche en entrant, deux portes, une porte mystérieuse et celle d'une petite salle où se trouvent une table, des chaises, des armoires et un réfrigérateur. Sur le mur face à l'entrée, des panneaux de liège où sont affichées de nombreuses informations. Sur la droite part un couloir vers trois salles de jeu. Dans ce petit hall, on trouve aussi une table collé au mur de droite ainsi qu'une porte donnant sur les sanitaires. Par bonheur, le sol est revêtu d'un parquet pas très reluisant, mais moins dur que du carrelage par exemple).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Bon Thomas, les enfants</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Il aime bien, c'est certain.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">C'est malin, c'est fripon,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Et l'on ne s'ennuie point.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Un tout petit enfant </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">S'appelant Aurélien,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Concevait Thomas bon,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Bien plus que son coin-coin.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ce tout petit enfant,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Qui cherchait un copain,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Trouva là son cochon</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Pour aller très très loin.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Et le petit enfant</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Demanda -c'est gamin-</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Qu'on lui fasse faire l'avion</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Par les jambes et pieds joints.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Bon Thomas le géant,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Accepta, eh ben tiens !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Tourniquet sans caution,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Se croyant très au point.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Dans les airs, c'est piaffant,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mais par terre, c'est moins bien,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ça ne tourne plus rond,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Dans la tête tout au moins...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Ma jeunesse aventureuse et tumultueuse, de laquelle je suis sorti vivant m'avait préparé à ne jamais paniquer. Du moins le croyais-je. Paniquer, c'est céder à l'affolement. Et l'affolement, c'est quand il faut décider en un temps trop bref de ce qu'il faut faire dans un cas critique. Pendant ce moment extrêmement court, nous sommes en lutte avec deux forces : celle de la raison, de l'instinct de conservation dans l'action, et celle de l'abandon, du laisser filer dans l'inertie. C'est propre à l'homme, les animaux, eux, ne connaissent pas l'angoisse de ce choix.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">J'ai la plupart du temps su anticiper les situations ou su réagir de la bonne manière dans des cas compliqués (tonneaux sur l'autoroute, coincé et oppressé en position allongée dans un profond souterrain, ou bien dehors 3 nuits de suite par moins 20 degrés...). Mais il est des circonstances qu'on n'imagine même pas en cauchemar ! </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Nous partions, ma fillotte Marieke (7 ans) et moi-même jouer le championnat de Paris 1994 par un beau mois de juillet, histoire de passer de bons moments ensemble. C'était l'affaire d'un coup de voiture jusqu'à je ne sais plus quelle gare, puis le train, et enfin le métro jusqu'à la grande salle de l'Aquaboulevard. Je ne me faisais pas de souci pour Marieke dans le métro, car elle était surentraînée à ne pas se faire larguer dans les brocantes quand je tentais de la semer en courant. Et puis je gardais toujours un œil sur elle.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Et pourtant. Je ne sais pas ce qui a occasionné cette faute de ma part, ni comment il se fait que je n'ai rien anticipé sur ce coup, mais ce jour-là, mon cerveau chauffa beaucoup plus que de coutume.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Voici ce qui c'est passé : lors d'un changement de métro à la station "gare Montparnasse", vous savez, la géante station avec des escaliers mécaniques partout et des tapis roulants d'un kilomètre, nous devions monter à l'étage supérieur pour suivre une nouvelle direction en métro. Là, deux escalators. Évidemment, Marieke en prit un, et moi je pris l'autre, premier arrivé ! Classique, quoi... Et après, youpi ! On irait jouer aux échecs !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Le problème, le très gros problème, c'est qu'au bout d'un moment, alors que nous nous regardions à distance depuis nos remontées mécaniques respectives, nous nous aperçûmes qu'ils n'allaient pas du tout au même endroit ! Je vis avec horreur ma fillotte disparaître dans les entrailles de la terre, tandis que moi, je continuais de monter ! Pas de possibilité, comme je l'ai instantanément pensé de redescendre l'escalier et de sauter sur l'autre pour la rattraper. C'était plein de monde, je ne pouvais pas redescendre. "Papa !!!" Ai-je entendu au moment où elle disparaissait de ma vue. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">A ce moment, dans ma tête, il y a eu la fameuse lutte. Quoi faire ? Vite ! Vite il faut choisir ! j'ai continué en me faufilant jusqu'en haut le plus rapidement possible. Arrivé au sommet, évidemment, pas de Marieke, pas d'autre escalator non plus. J'ai foncé dans tous les sens pour trouver un hypothétique chemin vers un étage inférieur. J'ai finalement trouvé un escalier qui descendait je ne sais où. Je l'ai dévalé à fond sans aucune garantie. Je ne savais plus où j'étais. Je ne savais pas retrouver notre point de départ commun dans ce labyrinthe. Une petite fille toute seule au milieu d'une fourmilière, sur quel genre de fourmi pouvait-elle tomber ? Rouge ? Noire ? Légionnaire ? Arrivé en bas de cet escalier, je vis tout de suite l'arrivée d'un escalier, et, se tenant sagement à côté, Marieke. Elle savait qu'un enfant perdu ne doit plus bouger pendant une heure, c'est la sa meilleure chance d'être retrouvé. Ça allait d'un coup beaucoup mieux...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">Je ne sais pas si j'ai un jour dû combattre autant d'horribles pensées à la fois, car c'était comme courir sur un muret de 10 mètres de haut et de 20 centimètres de large, sur lequel il faut se vider la tête de l'idée du vide...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:green">C'est là mon plus grand souvenir du championnat de Paris !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je n'ai pas souvent eu honte au cours de ma "longue" carrière dans le monde des échecs, mais je dois avouer qu'un jour, je n'ai plus su où me mettre tellement j'étais gêné. Gêné n'est en réalité pas le mot juste. je devrais mieux employer "indigné".</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Lors d'un tournoi lointain je me suis retrouvé à jouer assis à gauche d'une figure notoire des échecs en Ile de France, un certain Georges G., connu pour les problèmes qu'il a occasionnés en de maintes occasions. On ne compte plus les litiges sur l'échiquier avec ses adversaires, les scandales auprès des organisateurs pour réclamer des coupes auxquelles il n'avait pas droit, ou bien tout simplement, le comportement désagréable dont il faisait généralement preuve.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avant la partie que je devais disputer contre mon adversaire, je me rappelle m'être dit : "Tiens, c'est la première fois que je joue à côté de Georges G., j'espère qu'il va se tenir à carreau, je n'ai pas envie d'être emmer...bêté pendant ma partie". </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Les parties débutèrent et ce fut un réel plaisir de jouer aux échecs ce jour-là me semblait-il, puisque je pris rapidement un gros avantage dans ma partie et parce que mon voisin de gauche ne bronchait pas, silencieux et concentré sur son jeu. Son adversaire était un grand Monsieur bien habillé, très digne, qui ressemblait à un aristocrate tout droit sorti d'un château voisin. Il avait l'air doux, gentil et sa façon de jouer attestait de très bonnes manières. De plus, il semblait jouer fort bien, puisqu'il surclassa tranquillement son soi-disant pénible opposant. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">De mon côté, je continuais à chercher le chemin de la victoire tandis que le grand Monsieur avait fait table rase et allait facilement gagner sa partie avec une Dame et un Roi, contre un Roi tout seul. C'était dans la poche, et son vis-à-vis aurait très logiquement dû abandonner. Il est honorable et poli d'arrêter une partie quand il n'y a plus rien à faire.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais non, au lieu de ça, ce dernier, grimaçant, continuait de déplacer à reculons son pauvre Roi vers un coin de l'échiquier où il son sort serait réglé. Refusant toujours d'abandonner, il se mit à marmonner entre ses dents des sons de plus en plus audibles : "quelle chance...". Plus son Roi était repoussé, plus il râlait : "quelle bol, vous avez eu de la chance...". Quelques coups avant le mat inéluctable : "quelle chance, quel cul..." . Le grand Monsieur, continua sa manoeuvre gagnante et semblait rester concentré malgré les commentaires gênants et incessants du malotru. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Mais soudain, à un coup de faire échec et mat, sous les mots déplaisants dont il était aspergé, il fut si perturbé qu'il joua un fort mauvais coup. Il coinça le Roi adverse sans lui faire échec. C'était pat ! La partie fût ainsi déclarée nulle...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Avec un sourire moqueur, fier de lui et de sa stratégie de déconcentration irrespectueuse, l'insupportable Georges G. tendit la main à celui qu'il venait d'arnaquer.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Le grand Monsieur aux allures si nobles se leva calmement mais hébété, comme s'il n'avait pas compris ce qui lui était arrivé. Il sortit de la salle et rentra probablement chez lui car on ne le revit plus de la journée.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je crois me souvenir que j'ai gagné ma partie, mais je n'en suis plus certain. Et cela n'a aujourd'hui plus vraiment d'importance... Par contre, je suis encore indigné.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je me tenais sur l'estrade, face aux habitants de la classe CM1-CM2 de l'école primaire de Cormeilles-en-Vexin. Avant le cours d'échecs, j'ai toujours eu l'habitude de recueillir l'attention des élèves en leur racontant une petite histoire ou en leur parlant des tournois prochains auxquels ils pourraient participer.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">"Attention, la semaine prochaine c'est le grand tournoi de l'école ! " Leur dis-je.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Et à Cormeilles, le tournoi de l'école, ce n'est pas rien. La centaine d'élèves joue d'abord une phase de qualification sauvage, où chacun se voit attribuer un adversaire ayant le même nombre de points que lui. Les matchs sont déterminés dans la cour, à la table de marque où je me tiens régulièrement, en compagnie d'Antoine, un des supers instits de cette école. A cette table défile un flux ininterrompu d'élèves, venant à la fois annoncer leur résultat et chercher le nom du prochain adversaire. L'arbitrage dans les différentes salles est assuré par d'anciens élèves, trop heureux de revenir jouer un rôle dans leur école. Au bout d'une heure et quart de jeu environ, les 32 meilleurs joueurs sont qualifiés pour jouer un tournoi à élimination directe, 16<sup>ème</sup> de finale, 8<sup>ème</sup> de finale, etc. C'est très excitant et le spectacle est garanti !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je me trouvais donc face à une audience très attentive et très impatiente à l'idée d'arriver à ce jour spécial. Et comme d'habitude, je faisais les recommandations d'usage : "soyez prudents, ne tombez pas malade, ne vous cassez pas un bras maintenant, ce serait dommage..." Tout le monde souriait en espérant qu'effectivement cela ne lui arriverait pas. Tous sauf un CM1, Cédric M., qui lui, s'esclaffait, s'agitant et riant aux éclats d'une façon un peu moqueuse, d'un air de dire que rien ne pouvait lui arriver.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">La semaine suivante, c'était le grand jour. J'arrivai à l'école sur le temps du midi, et, accueilli très chaleureusement par de nombreux élèves enthousiastes, je me dis que ça allait encore être super chouette. Cette année, il y avait une belle concurrence avec deux grands favoris, Baptiste F et Cédric M dont on vient de parler. Mais les outsiders étaient nombreux. Ça allait vraiment être quelque chose ! Du regard, je fis le tour de la cour de récréation, et je fus alerté par mon radar interne qui me signala une anomalie du genre : "Attention, attention, élève manquant, élève manquant..." J'appelai donc des grands de l'école pour faire le point et leur demandai si tout le monde était bien présent. Ils me répondirent : "non, il manque Cédric, il est parti tout à l'heure à l'hôpital. Il s'est cassé le coude !!!"</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le destin était vraiment impitoyable. Et Baptiste gagna le tournoi.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">L'année suivante, au même endroit, c'est à dire dans la même classe, sur la même estrade, j'ai évidemment prononcé les mêmes recommandations de prudence aux élèves.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je me trouvais donc face à une audience très attentive et très impatiente à l'idée d'arriver à ce jour spécial. Et là, j'ai regardé Cédric. Il me fixait, pétrifié et blanc comme un linge. Et cette année-là, il a remporté le tournoi de l'école de Cormeilles !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mon ami Américain John Colwell m'avait en 1999 invité chez lui à Baltimore, une occasion inespérée pour moi de traverser l'Océan Atlantique. J'avais comme tout le monde entendu tellement de choses sur les Américains et leur pays, que je me faisais une joie d'aller illustrer mes propres idées par des images personnelles. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Une des premières faveurs que je demandai à John fut, à son grand étonnement, d'aller jouer aux échecs dans un parc de la ville. Il m'avait répondu : "tu es sûr ? Parce que les recoins de la ville, eux, ne sont pas sûrs...". A l'époque, Baltimore était la 4<sup>ème</sup> ou la 5<sup>ème</sup> pire ville des USA en ce qui concerne la criminalité (maintenant, ça va beaucoup mieux, elle est classée 9<sup>ème</sup> ville criminelle).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je lui avais assuré que rien ne me ferait plus plaisir, et que je n'étais pas du genre à me dégonfler face aux gars de la rue. N'avais-je pas une solide expérience humaine dans ce secteur, avec une somme d'expérience non négligeable en maison de quartier, de par mes cours en prison ou bien avec toutes mes colos avec les ados de villes un peu chaudes ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">"As you want ! " (comme tu veux) m'avait-il répondu. Il ajouta qu'il connaissait un parc au milieu de la ville dans lequel se réunissaient jour et nuit des joueurs d'échecs.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Le jour "D", en début d'après-midi, nous nous rendîmes, John, sa femme Dawn et moi-même aux abords du lieu qui excitait tant ma curiosité. J'allai enfin pouvoir jouer aux échecs dans le parc d'une ville américaine, comme dans les films où l'on voit les plus pauvres avoir une intelligence hors de portée des puissants...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Ils me dirent préférer m'attendre en dehors du petit parc, ce que je compris un peu en me disant que Dawn, une jolie femme élégante pourrait déconcentrer les joueurs. Je le compris mieux en entrant dans l'arène où, sur des tables de pierre, ne s'affrontaient que des noirs crasseux, déguenillés et à moitié saouls. Un reste du mépris total du danger qui habitait ma jeunesse, ainsi que la crainte de voir passer une occasion qui ne se représenterait pas de sitôt m'interdirent formellement de m'éclipser discrètement à toutes jambes de cet endroit.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je m'approchai donc des tables, impressionné par ce que je voyais. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Sur des plateaux en piteux état, les combats faisaient rage. On entendait le cliquetis de la capture d'un membre de l'armée adverse toutes les deux secondes. Manipulant leurs pièces avec vitesse et dextérité, les joueurs laissaient exploser leur imagination aiguë ainsi que des commentaires pleins d'un humour tranchant. Les paroles fusaient au gré des situations de jeu. Ca charriait sec. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je vis soudain un gars, du même acabit que ses collègues, seul à une table. Je vins le saluer et lui proposer de jouer avec lui. Il accepta et demanda combien on pariait. Etant bien certain de me faire ratisser la mise, je lui répondis que je voulais seulement faire une petite partie amicale. Il accepta à contrecoeur me sembla-t-il. Un rapide coup d'oeil me permit de situer mes amis, qui, à une quinzaine de mètres assistaient à la scène.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">L'opposition était telle que je me l'étais imaginée. Je jouais une des parties de ma vie, et mon nouveau copain était d'une décontraction que seuls l'alcool et le crack pouvaient expliquer raisonnablement. Lorsque l'on joue aux échecs, on entre toujours un peu dans l'intimité de son adversaire et si on le souhaite, on peut vraiment s'en faire un proche. Je sus donc rapidement à qui j'avais affaire : un clochard pas frais, crado avec des dents en moins, ce qui ne l'empêchait pourtant pas de mordre...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'avais les pires difficultés à contenir les assauts de ses Fous et de ses Cavaliers qui virevoltaient sur des cases aux couleurs incertaines. Je m'accrochai cependant. Au loin, je voyais mes amis avec de drôles de têtes. Ils étaient sans doute impressionnés par ma résistance.<br />
Mais la réalité était que ça chauffait dur pour moi. J'étais au bord de la rupture et mes pièces ne se tenaient qu'à un fil. La moindre imprécision n'aurait pas pardonné... Peut-être fatigué de ne pas voir de dollars posés sur la table, mon adversaires baissa un peu de régime, et moi, en mode finale de championnat du monde, je ne me contentai plus de calfeutrer les brèches de ma position. A la suite de plusieurs légères imprécisions indignes d'un génial clochard drogué des rues de Baltimore, je pris un net ascendant dans la partie. Ma position intrusive dans les rangs adverses laissaient maintenant présager la victoire prochaine.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">C'est alors que mon compagnon de jeu me lança, avec la voix de quelqu'un qui vient de se réveiller : "Do you want a draw ?" (Tu veux une partie nulle ?). Malin comme un imbécile, je répondis en anglais le fameux : "on va jouer encore un peu..." Bah oui, quoi, je peux gagner, non ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Rapidement, quelques coups plus tard, il me redemanda : "Do you want a draw ?". Et là, je remarquai un peu plus loin mes amis tout décomposés, me faisant signe qu'il était vraiment temps qu'on parte. Ils avaient sans doute autre chose à faire que me regarder jouer toute l'après-midi dans ce lieu sordide.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je tendis alors la main à mon adversaire pour accepter la partie nulle qu'il me proposait et le remerciai chaleureusement pour le temps qu'il m'avait consacré.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Je rejoignis donc tout fier mes bons amis qui m'avaient permis de vivre cette expérience unique. Unique à un point que je n'avais pas soupçonné, puisqu'ils me révélèrent en repartant une chose que je ne pouvais pas voir de ma chaise : mon adversaire avait à sa ceinture un révolver à moitié sorti et tout prêt à servir. Il ajoutèrent que finalement, j'avais bien fait d'accepter la nulle, car un petit Blanc venant donner des leçons aux Noirs des ghettos aurait sans doute été moyennement apprécié, et qu'à Baltimore, il y avait un mort par semaine dans les parcs ! J'en déduisis donc que nous étions partis à temps...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Après des années à me dire que je l'avais sans doute échappé belle, je ne peux aujourd'hui m'empêcher de penser que j'y retournerais bien, dans ce parc...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">De cours d'échecs donnés à Saint-Ouen l'Aumône, j'en ai plusieurs souvenirs, dont un à l'époque d'une activité périscolaire que m'avait proposée mon ami Thomas dans le quartier de Chenevières, appelé aussi "les Brouillards". Le lieu n'était pas très vaste au sol, mais il y vivait un grand nombre de familles perpendiculairement. J'y avais eu une amoureuse autrefois, et je voyais alors cet endroit différemment. Il était pour moi rose clair. Maintenant que j'y revenais pour apprendre à jouer aux échecs à des enfants agités, je le voyais rose foncé, entre le vert et le marron.<br />
Mais en ces temps reculés et difficiles où l'on n'avait pas grand chose à se mettre sous la dent, il ne fallait pas faire la fine bouche. Les petits n'y étaient pour rien et le peuple des Brouillard n'est pas le peuple élu, on le remarqua bien vite. Des signes laissaient percer une certaine envie de la part de ces enfants de ne pas faire comme les autres. Par exemple, quand ils jouaient aux échecs, ils ne disaient pas qu'ils capturaient les pièces, ni qu'ils les prenaient, mangeaient ou bouffaient, non, ils les volaient. "J't'ai volé ton Fou, bâtard !". Lorsqu'on leur demandait de s'asseoir, ils se levaient et lorsqu'on leur demandait de se lever car c'était terminé, ils restaient assis. J'ai moi-même eu dans ma vie un certain nombre de fois l'esprit de contradiction, alors je les comprenais, ces petits...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Ce qu'ils voulaient après l'école, c'était jouer un peu aux échecs et beaucoup au foot. Alors, après un petit temps de rapines de pièces d'échecs, on allait, Thomas, les enfants et moi, se défouler sur la pelouse avec un ballon. La pelouse était à dominante verte avec de légers contrastes bruns, mais on s'en accommodait, et on s'amusait bien. Ca jouait plutôt bien au foot et Thomas était à l'apogée de sa carrière de manieur de balle. Un jour, il arriva une histoire que vous ne pourrez lire qu'ici :</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<b style="mso-bidi-font-weight:normal"><i style="mso-bidi-font-style:
normal"><span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:
Arial;color:#996633">(Glissez le poème ci-dessous à cet endroit du texte).</span></i></b></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Ce soir-là, après ses petites mésaventures, Thomas était sensé aller jouer à Paris une ronde du championnat de France FSGT. Et ce, sans possibilité de détour par une quelconque douche. C'était un petit championnat de France, avec un nombre restreint de très bons joueurs, mais il y en avaient quand même quelques-uns et Thomas les avait tous battus, devenant champion de France !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Comment y est-il parvenu ? Comment a-t-il pu, le pied gras, garder son flair positionnel infaillible dans cette ambiance nauséabonde ?<br />
J'y ai longtemps réfléchi, et j'en ai déduit que si ce titre national n'avait été qu'une formalité pour lui, c'est surtout parce qu'il avait déjà l'expérience du haut niveau. Car dans de nombreuses disciplines stressantes et abracadabrantesques non homologuées de la vie de tous les jours, c'était lui le meilleur, ses amis vous le diront tous !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">ECHEC ET BALLE</span></p>
<p>
</p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Bon Thomas au football,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Même s'il est très adroit,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Ce peut être très drôle,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Ha ben tiens, je vous crois !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Un beau jour de printemps,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Après avoir fourni</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Des efforts éreintants</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Chez des jeunes démunis,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">On pensa peu inquiets,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Qu'il était important</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">De troquer l'échiquier</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Contre un gazon... mi-temps !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Au milieu des grandes tours,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Sur une pelouse douteuse, </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Un terrain sans contours,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Mais une joie toute footeuse.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Bon Thomas et les mioches</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Tapaient dans la baballe,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Ils avaient la patte croche,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">C'était du bon fout'balle !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Quand au moment crucial</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">D'une reprise de volée,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Bon Thomas, le génial</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Voulut se signaler.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Tout en haut dans les airs,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Un mocassin sauta,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Les lacets, faut les faire, </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Sinon c'est la cata !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Car un pied nu retombe</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Toujours vers l'origine...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Celui-là, comme une bombe,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#996633">Dans une colique canine !</span></p>
<p>
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<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Lors d'un championnat individuel FSGT de la fin des années 1990, à Beaumont-sur-Oise me semble-t-il, je fus le témoin d'une scène étonnante.<br />
Ce championnat se déroulait en 7 rondes dans différents clubs du département, ce qui lui conférait une atmosphère bien particulière, empreinte de camaraderie et de relâchement dans la compétition.<br />
Ce jour-là, je ne jouais pas, mais j'avais tenu à venir pour soutenir les membres de mon club, car la bonne ambiance des retrouvailles entre joueurs d'échecs sympas me plaisait bien.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Les parties étaient commencées depuis un petit quart d'heure et je déambulais paisiblement, exempt de toute pression dans les travées du tournoi, tel un promeneur curieux au milieu des stands d'une brocante. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">J'avançais heureux et serein, lorsque je me mis en arrêt comme un chien de chasse devant un lapin. Le lapin en question n'était autre que Gérard A., notre vieil ami du Club de Pontoise, le seul joueur que j'aie jamais essayé de débaucher de son club pour l'entraîner dans le mien, plus tard, au Perchay. A plus de soixante ans, Gérard n'était pas fort. Il avait passé sa première année à Pontoise à regarder les autres jouer, tout en restant debout. La deuxième année, il en avait fait de même, mais assis. Il avait commencé à jouer après de longs mois d'observation, mais sa progression avait été extraordinairement lente. Chacun se plaisait à reconnaître une gentillesse et une modestie sans limites chez cet homme discret. En bref, tout le monde aimait Gérard et tous auraient été bien indignés qu'il lui arrivât malheur. Même un petit malheur...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je ne compris pas du tout ce que je voyais. Gérard, à deux mètres de moi était assis face à une chaise vide (son adversaire s'était sans doute levé pour aller boire ou bien faire le contraire), et il me regardait, hoquetant un rire gêné. Il ne parvenait pas à s'arrêter et se mit soudain à se faire des oreilles de lapin avec ses mains. Il agitait ses nouvelles oreilles en remuant la tête à droite et à gauche, toujours en rigolant et en me fixant. Le tout au milieu d'une salle remplie de joueurs d'échecs qui restaient imperturbablement plongés dans leurs parties. Je me rappelle très nettement avoir compris qu'il s'agissait en fait d'oreilles d'âne et pensé qu'il était en train de devenir complètement fou ! Pauvre Gérard, c'était peut-être le début de la fin...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Après quelques longues secondes d'interrogations stériles, je me suis approché de lui pour lui demander ce qui lui prenait. Il ôta ses oreilles sans cesser de rire et m'expliqua qu'il avait joué en l'absence de son adversaire un coup perdant.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Il avait en effet placé sa Dame sur une case où elle serait évidemment capturée au prochain tour ! Et lui, le plus loyal des hommes n'osait pas reprendre son coup alors qu'il n'y avait personne en face de lui ! Il restait là, tel un condamné redoutant le retour du bourreau. C'était l'attente interminable et insupportable d'un honnête homme face à un cas de conscience terrible. Reprendre le coup discrètement ? Attendre et supplier honteusement son adversaire de pouvoir rejouer ? Voir avec horreur sa Dame disparaître ?<br />
C'en était trop. Ne voulant pas être traumatisé par la scène insupportable qui allait s'ensuivre, je souhaitai lâchement bonne chance à mon ami Gérard et partis loin de ses gesticulations désespérées. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:#993300">Je ne veux jamais savoir ce qui s'est passé ensuite !</span></p>
<p>
</p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">En 1992, j'avais une super élève à l'école primaire de Us, Emilie V. Pas super forte aux échecs, mais tellement forte par ailleurs, en gentillesse ou en bon sens, par exemple. Comme on s'entendait très bien, il était normal qu'elle me suive parfois sur des tournois. Oh, pas souvent, mais suffisamment pour que 20 ans plus tard elle en ait de merveilleux souvenirs (plein de médailles... m'a-t-elle dit il y n'y a pas très longtemps).</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Un jour où je me rendais à l'école de Us pour prêcher la bonne parole échiquéenne, elle m'aborda dès mon arrivée dans la cour de récréation et me dit : "tu sais Philippe, il y a des grands de ton club qui ont jeté des canettes de coca sur les gens dans la rue à Pontoise ! On les a vu avec ma mère.<span style="mso-spacerun:yes"> </span></span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- De quoi de quoi ? des grands de mon club ? Tu les connais ?</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Oui, ils étaient au tournoi l'autre dimanche.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Bon, tu ne te rappelles pas de leurs prénoms ? Ils étaient comment ? </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">- Il y avait un grand brun et un plus petit, blond".</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Il n'y avait plus de doute. Je les avais identifiés. Les rascals ! Mon sang ne fit qu'un tour. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">Mais il se glaça aussitôt. Je venais de me souvenir que les deux bandits, le vendredi soir après les cours m'avaient poliment demandé d'emmener avec eux un grand nombre de canettes vides de la géante poubelle qui se trouvait dans le hall d'entrée du Club de Pontoise. C'était pour construire un truc à eux, m'avaient-ils dit. Bien sûr, j'avais répondu oui, me disant que finalement ces deux-là ne faisaient pas que des bêtises, que c'étaient de bons petits qui allaient mettre leur énergie débordante dans la création de quelque objet d'art... Et en même temps, ça vidait la poubelle. Mais non ! Complice ! J'étais complice d'un canardage par canettes sur d'innocents piétons pontoisiens. J'avais fourni les munitions. Et eux , depuis l'arrière de la voiture, vitres ouvertes, ils avaient dégommé les passants dans les rues.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">J'ai bien sûr attrapé C. et O.* au club peu après. Honnêtes, ils ont tout de suite assumé leur bêtise et m'ont promis qu'ils ne recommenceraient plus...<span style="mso-spacerun:yes"> </span>...ça.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-size:14.0pt;font-family:Calibri;
mso-bidi-font-family:Arial;color:blue">*par souci de discrétion, et même si les faits sont aujourd'hui prescrits et pardonnés, nous préférons masquer la véritable identité des rascals qui sont aujourd'hui de respectables citoyens.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">S'il y a bien un club qui est actif dans l'organisation de petits tournois, c'est bien le "Chess XV" de Paris, un club qui organise au moins une dizaine de tournois chaque année.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">En ce qui me concerne, je n'ai pas souvent joué en tournoi. Le manque de temps, le fait d'être absorbé par mon club, mais aussi la crainte d'être fatigué par certains comportements sans doute...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Mais ce jour de 1997, je disputais le tournoi parisien, pour voir. Et j'en eus pour mon argent.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Le tournoi en lui-même n'avait rien d'extraordinaire. Nous étions tout serrés à l'étage d'un restaurant traiteur asiatique, et je remportais une partie sur deux. Je gagnais contre un joueur moyen et la partie suivante, j'en prenais pour mon grade contre une brute. Tout le charme du système suisse aux échecs...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Bon, aux trois quarts du tournoi, le sort me désigna un gars que je ne connaissais pas, un barbu aux joues creuses et à l'air sévère. "Il est drôlement concentré, ce brave homme", me dis-je. Concentré en quoi, je ne tardais pas à le découvrir. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">La partie était sérieuse. Le joueur, un certain Eric M., classé quasiment 1700 Elo, était robuste. Ça ne rigolait pas. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Nous nous rendions coup pour coup et mon adversaire, au fil du temps, jouait de plus en plus vivement en appuyant de plus en plus rudement sur la pendule. Évidemment, moi, dans ce genre de cas, je me transforme en calme excessif, du genre de ceux qui opèrent par gestes très lents et qui caressent la pendule pour inverser la fuite du temps... </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Le combat devenait en quelque sorte celui de "super-excité" contre "super-zen". Qui allait faire craquer l'autre ? Au bout d'un moment, la situation avait tellement dégénéré que mon adversaire frappait maintenant la pendule de toutes ses forces. Il semblait comme fou, avec des yeux de fou et une sueur de fou. Comme je ne voulais pas devenir comme lui, je me mis à jouer de plus en plus calmement, mais c'était plutôt compliqué.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Je savais que je contribuais à sa démence et cela m'amusait, mais non sans crainte, car je me souviens très bien avoir pensé à ce moment-là : "restons sur le qui-vive, il va finir par me sauter à la gorge. Pourvu qu'il n'ait pas de couteau sur lui". C'est vrai, j'ai pensé ça ! Surtout que je me retrouvais à présent dans une situation gagnante, une finale de pions, où l'un de mes petits allait bientôt être promu en Dame. Nous étions les derniers à jouer et toute une foule s'était agglutinée autour de notre échiquier. Sous ces multiples pressions, je réussis à peu près à démontrer un grand calme et une maîtrise de la finale, mais ce fût extrêmement difficile. Mon adversaire, à quelques coups de se faire mater et voyant que son drapeau, soulevé par l'aiguille de l'horloge allait tomber était maintenant devenu complètement incontrôlable. Je venais de jouer, et lui, appuyait comme un forcené avec ses deux mains sur son bouton de pendule en hurlant : vous n'avez pas joué ! Vous n'avez pas joué !" Je répondis d'un air calme, et la main légèrement tremblante : "mais si, j'ai joué !" </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Un arbitre vint lui demander de lâcher cette pendule à laquelle il s'était agrippé. Il perdit au temps à un coup du mat (pour moi) et la partie s'acheva. Je partis donner mon résultat et descendis au rez-de-chaussée prendre le frais et retrouver mes esprits et en me répétant que j'étais passé tout près de mon assassinat. J'en fis part au Maître International Shirazi, qui se trouvait là, bien tranquille. Il me répondit avec son flegme légendaire : "il ne faut pas lui en vouloir, il est comme ça, il a quelques problèmes...".</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#FF6600">Et ça, ça m'a énervé...</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"><span id="cke_bm_29S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_30S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_31S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_32S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_33S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_34S" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_35S" style="display: none;"> </span>L'A EU CHAUD<span id="cke_bm_35E" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_34E" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_33E" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_32E" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_31E" style="display: none;"> </span></span><span id="cke_bm_29E" style="display: none;"> </span><span id="cke_bm_30E" style="display: none;"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Bon Thomas avait soif.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Dans la salle du peuple,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Il suait sous sa coiffe.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Il voulait tellement boire...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">En Afrique il peu pleut,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">On s'y croyait ce soir.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Puisque les chefs parlaient</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Et que ça sonnait creux,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Il sortit sans délai.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Il revint peu après,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Ramenant tout heureux</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Un breuvage très très frais.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Dans la boîte métallique,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Plus une goutte le pèpère,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Tout est bu, fatidique !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Le Conseil s'épuisait,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Bon Thomas se figeait,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Et soudain se taisait...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Une horrible mimique</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Alerta son compère.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Il y avait un hic !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF"> </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Dans le trou, emboîté,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Bon Thomas, âne bâté,</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Calibri;mso-bidi-font-family:Arial;
color:#3366FF">Avait mis son doigté !</span></p>
<p>
<span style="font-family:Calibri;color:#993300">L'histoire se déroule en 1998, lors de la finale régionale à Créteil de la Coupe de l'Avenir, la Coupe nationale par équipes départementales, aujourd'hui disparue.<br />
Nous jouions un match au sommet hyper accroché entre les sélections val d'oisiennes et val de marnaises. Il ne reste plus qu'une partie entre Vincent Cozic pour le 95 et Marie-Pierre Anamba-Onana pour le 94. Le gagnant envoie son équipe en finale nationale à Autrans, dans le Vercors. Les deux équipes, ainsi que leurs encadrants sont agglutinés autour de l'échiquier où Vincent est archi-gagnant, à quelques coups du mat, mais également à quelques secondes de tomber (c'était à une époque où ce terme avait encore un sens, puisque les pendules, non électroniques possédaient un drapeau). Vincent n'est qu'à 2 coups du mat lorsqu'il tombe, ce que son adversaire ne voit pas !<br />
Intervient alors le petit-poussin de l'équipe adverse, un petit binoclard, qui crie : "tombé !". Toute l'équipe du 95 se rue alors sur l'inconscient (que Mathilde Congiu venait de battre aisément) qui termine en pleurs, ne comprenant pas trop ce qui lui arrive.<br />
Malgré nos protestations, l'arbitre valide la victoire de Marie-Pierre au temps, et envoie ainsi le 94 en finale nationale.<br />
Nous serons finalement repêchés et irons nous aussi à Autrans, ou nous prendrons notre revanche sur eux pour terminer premiers ex-aequo (encore avec le 94, décidément...) !<br />
Pour l'anecdote, le petit binoclard s'appelait Maxime Vachier-Lagrave !</span></p>
<p>
</p>
<p>
<span style="font-family:Calibri;color:#993300">Cette anecdote m'a été rapportée et a été rédigée par Gauthier Schaal, qui faisait partie de l'expédition. </span></p>
<p>
<span style="font-family:Calibri;color:#993300">Merci Gauthier ! Voir aussi la photo sur ma page facebook.<br />
Philippe.</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
</p>
<br style="mso-special-character:line-break" />
<br style="mso-special-character:line-break" />
<p>
<span style="font-size:12.0pt;font-family:Arial;mso-fareast-font-family:"Times New Roman";
mso-ansi-language:FR;mso-fareast-language:FR;mso-bidi-language:AR-SA">Avez-vous déjà perdu une partie stupidement ?<br />
Si on ne vous a pas déjà posé cette question, elle vous a probablement trotté dans la tête un jour. En ce qui me concerne, j'y ai répondu fréquemment sans être interrogé !<br />
Dans les années 1990, quand j'avais encore naïvement l'idée de devenir un fort joueur, alors que la densité de mon emploi du temps, mes enfants et mon petit cerveau auraient dû me laisser penser le contraire, je m'en vins à me retrouver en train de jouer un tournoi en Seine et Marne.<br />
Encore un coup de Thomas. Il m'avait entraîné jusqu'à Dammarie-les-Lys. Vous savez où c'est Dammarie-les-Lys ? C'est super loin de chez nous. Un tournoi de semi rapide classique, avec plein de monde, du carrelage au sol, des tables de cantine et des toilettes attenantes à la grande salle de jeu. Pourquoi est-ce que je vous parle des toilettes ? Eh bien parce que lorsque l'on joue un tournoi sur une journée, on y passe toujours deux ou trois fois, pour se soulager, pour se recoiffer, ou bien pour se laver les mains avant de manger.<br />
Je ne suis pas un raton laveur, mais j'aime bien avoir les mains propres, une déformation professionnelle sans doute.<br />
Je me trouvais en train de frotter mes mains savonneuses lorsque le brouhaha des joueurs de la salle de jeu m'avertit que chacun était en train de regagner sa place pour la prochaine partie.<br />
Fallait que je me dépêche. Le coup d'envoi oral de la ronde suivante n'allait pas tarder à être donné. Je m'essuyai donc les menottes, sortis des toilettes, et après un rapide coup d'oeil à la feuille d'appariements qui indiquait où chaque participant devait jouer, je m'empressai de regagner ma place.<br />
Top départ ! Avec mon adversaire, nous nous souhaitâmes réciproquement une bonne partie (je n'ai toujours pas compris cette hypocrisie aux échecs) et la bagarre commença.<br />
J'étais bien en forme et je pris le dessus en milieu de partie. Mais une partie gagnante n'est pas une partie gagnée, me plais-je à répéter à mes élèves. Je crois que ça vient de ce jour-là...<br />
Tout allait bien, et ç'allait être une formalité, car j'étais très lucide, lorsqu'un événement inattendu et tout à fait hors du commun se produisit. En mettant nonchalamment un doigt de ma main à la bouche (tous les joueurs d'échecs le font, j'ai les photos), un petit morceau de savon sournois, provenant certainement du coin d'un de mes ongles s'était glissé entre deux de mes dents ! C'est quelque chose d'avoir un petit morceau de savon coincé entre les dents, Mesdames-Messieurs !!! aurait dit Raymond Devos...<br />
En fait, c'est tout à fait horrible, et je ne connais qu'Averell Dalton pour aimer ça ! Ne parvenant pas à l'extraire, j'avais deux solutions : me précipiter aux toilettes et effectuer un bain de bouche express sur les cinq minutes qu'il me restait à la pendule, ou bien me concentrer sur la partie en tentant d'oublier les milliards de bulles microscopiques qui se répandaient sur ma langue.<br />
Je décidai de ne pas abandonner le champ de bataille et de terminer cette belle partie comme c'était prévu...<br />
Mauvaise variante !<br />
Au grand étonnement de mon adversaire, la situation tourna nettement à son avantage et sans savon, ce dernier termina proprement la partie !<br />
<br />
Je lance un de ces défis pleins de bon sens comme les affectionnent les joueurs d'échecs : un blitz de cinq minutes avec un petit morceau de savon que l'on doit garder sur la langue jusqu'à la fin du jeu... Mais moi, je ne joue pas !</span></p>
<p>
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<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Avec le club de Pontoise, on en aura fait des voyages...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Un jour des années 1990, nous partîmes avec l'équipe de N2 jeunes dans l'est lointain, à Kédange sur Canner, tout près du Luxembourg. Huit jeunes, deux de chaque catégorie d'âge, donc deux ados aux places des minimes.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Ces deux énergumènes-là, c'étaient nos Kad et Olivier à nous, sauf qu'ils s'appelaient Carl et Olivier. De super gentils garçons, mais fallait les avoir un peu à l'oeil, vous le verrez dans d'autres histoires racontées ultérieurement...</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Des ados, quoi. Bon, sous la bienveillance de l'adorable M. Georges Beck, le responsable du club local, nous étions logés (car on ne faisait pas l'aller-retour dans la journée) dans une structure type internat, avec des chambres au rez-de-chaussée, au 1<sup>er</sup> étage je crois, mais, et c'est ce qui nous intéresse, au sous-sol.</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Je ne sais plus bien comment ça se fait, mais nous nous retrouvâmes à visiter le sous-sol, où chacun jura bien qu'il ne dormira jamais dans un lieu aussi lugubre !</span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Au repas du soir, on nous servi des plats simples, une entrée, un plat, et un dessert, ce qui était quand même royal comme accueil. Je ne me rappelle plus du menu. Sauf des petits pois. C'est important les petits pois. Moi, je n'aime pas trop ça, mais je termine toujours mon assiette. Carl et Olivier, eux, (à l'anglaise ?) ne daignaient pas faire assiette rase. Bon, comme il ne fallait pas faire injure à nos hôtes, j'insistai pour qu'ils terminent. Mais non, ils ne voulaient pas ! Je leur dis alors que celui qui laisserait ne serait-ce qu'un petit pois sur fond blanc se retrouverait à dormir en bas, avec les fantômes et les souris. </span></p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Olivier n'avait pas envie et Carl ne le crût pas. Olivier avala tout et Carl dormit en bas tout seul ! Il me supplia de l'épargner, mais la faute était trop grave, il fallait être sévère... </span></p>
<p class="MsoNormal">
</p>
<p class="MsoNormal">
<span style="font-family:Arial">Je ne regrette pas aujourd'hui d'avoir été sans pitié, car ces "aventures extrêmes" ont forgé une belle amitié entre nous, mais aujourd'hui je peux le dire, je crois que j'ai pensé à la détresse de Carl une bonne partie de la nuit !</span></p>
<p>
Petiots, avec mon copain <strong>Jean-Yves</strong> (de passage par ici ce week-end après 20 ans d'absence), nous n'avions pas de pendule.</p>
<p>
Sans argent, sans même la moindre idée de l'endroit où nous pourrions nous en procurer une, nous avions un jour trouvé un moyen de limiter le temps de réflexion lors de nos parties d'échecs...</p>
<p>
Nous nous sommes emparés de ces fameuses pinces hyper dures à serrer, vous savez, qui servent à muscler poignets et avant-bras.</p>
<p>
Fastoche, on n'étaient pas des fillettes. La règle était simple : celui qui réfléchit serre la pince. Sauf qu'au bout d'un moment, on avait quelques difficultés pour se concentrer : penser à serrer la pince, penser à serrer la pince, ma Dame est attaquée, penser à serrer la pince... Un coup était joué, peu importe si on avait eu le temps de vérifier qu'il était valable, on avait relâché l'instrument diabolique... ...et l'autre répondait du tac au tac ! Arghh ! Comme on disait alors.</p>
<p>
J'ai toujours ces pinces. Quelqu'un veut jouer ?</p>
<p>
<strong>Pas de doubles !</strong></p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
Bon Thomas en jongleur,</p>
<p>
Ça n'attire pas grand monde.</p>
<p>
C'est un signe de malheur,</p>
<p>
D'étourderie profonde.</p>
<p>
</p>
<p>
Mais l'animal aime ça,</p>
<p>
Jeter tout ce qu'il tient.</p>
<p>
Il faudrait qu'il pense à</p>
<p>
Rattraper tout très bien !</p>
<p>
</p>
<p>
Pour trois objets flambés,</p>
<p>
Deux reviennent à la Main,</p>
<p>
La troisième retombée</p>
<p>
Tourne en eau de boudin.</p>
<p>
</p>
<p>
Comme une fois sur une route,</p>
<p>
Loin de tous les pelés,</p>
<p>
Bon Thomas sans un doute</p>
<p>
Jonglait avec ses clés.</p>
<p>
</p>
<p>
Des amis prévenaient :</p>
<p>
"Tu devrais prendre garde,</p>
<p>
Refermer ton poignet</p>
<p>
Bien avant que ça barde".</p>
<p>
</p>
<p>
Méprisant les avis,</p>
<p>
Bon Thomas fit son cirque.</p>
<p>
L'anecdote qui suivit</p>
<p>
S’avéra dramatique !</p>
<p>
</p>
<p>
Le trousseau voyageur</p>
<p>
Loupa l'atterrissage,</p>
<p>
Traversa son majeur,</p>
<p>
Et tomba d'un étage...</p>
<p>
</p>
<p>
Il regarda le sol</p>
<p>
Cherchant ses clés des yeux...</p>
<p>
Mais vraiment pas de bol,</p>
<p>
Elles avaient dit adieu !</p>
<p>
</p>
<p>
Comment donc cette grappe</p>
<p>
Métallique, imposante,</p>
<p>
Passa-t-elle à la trappe</p>
<p>
Dans une si maigre fente ?</p>
<p>
</p>
<p>
<strong>(poème anonyme tiré des "Fables du bon Thomas")</strong></p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>
<p>
</p>